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LA CATACH RESE.

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au lieu de fer. On dit de même aller à cheval sur un baton, c'est-à-dire, se mettre sur un bâton de la même manière qu'on se place à cheval.

Ludere par impar; equitare in arundine longâ (1).

Dans les ports de mer on dit bâtir un vaisseau, quoique le mot de bâtir ne se dise proprement que des maisons ou autres édifices: Virgile s'est servi d'adificare (2), bâtir, en parlant du cheval de Troie; et Cicéron a dit, ædificare classem, bâtir une flotte (3).

Dieu dit à Moïse, je ferai pleuvoir pour vous des pains du ciel, et ces pains, c'étoit la mâne: Moïse en la montrant dit aux Juifs (4), voilà le pain que Dieu vous a doné pour vivre. Ainsi la mâne fut appelée pain par extension.

Parricida, parricide, se dit en latin et en français, non-seulement de celui qui tue son père, ce qui est le premier usage de ce mot; mais il se dit encore par extension de celui qui fait mourir sa mère, ou quelqu'un de ses pasens, ou enfin quelque persone sacrée.

Ainsi, la Catachrèse est un écart que certains mots font de leur première signification, pour en prendre un autre qui y a quelque raport, et c'est aussi ce qu'on apèle extension: par exemple, feuille se dit par extension ou imitation des choses qui sont plates et minces, come

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les feuilles des plantes; on dit une feuille de papier, une feuille de fer blanc, une feuille d'or, une feuille d'étain, qu'on met derrière les miroirs: une feuille de carton le talc se lève par feuilles; les feuilles d'un paravent, etc.

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La langue, qui est le principal organe de la parole, a donné son nom par métonymie et par extension au mot générique dont on se sert pour marquer les idiômes, le langage des diférentes nations: langue latine, langue française.

Glace, dans le sens propre, c'est de l'eau gelée ce mot signifie ensuite par imitation, par extension, un verre poli, une glace de miroir, une glace de carosse.

Glace, signifie encore une sorte de composition de sucre et de blanc d'œuf, que l'on coule sur les biscuits, ou que l'on met sur les fruits confits.

Enfin glace se dit encore au pluriel, d'une sorte de liqueur congelée.

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Il y a même des mots qui ont perdu leur première signification, et n'ont retenu que celle qu'ils ont eue par extension : florir, florissant se disoient autrefois des arbres et des plantes qui sont en fleurs; aujourd'hui on dit plus ordinairement fleurir au propre, et florir au figuré : si ce n'est à l'infinitif, c'est au moins dans les autres modes de ce verbe; alors il signifie être en crédit, en honeur, en réputation: Pétrarque florissoit vers le milieu du XIV e siècle ; une armée florissante, un empire florissant. « La

langue grèque, dit madame Dacier, se main» tint encore assez florissante jusqu'à la prise de » Constantinople, en 1453. »

Prince, en latin princeps, signifioit seulement autrefois, premier, principal; mais aujourd'hui en français il signifie, un souverain, ou une persone de maison souveraine.

Le mot Imperator, Empereur, ne fut d'abord qu'un titre d'honeur que les soldats donoient dans leur camp à leur général, quand il s'étoit distingué par quelque expédition mémorable : on n'avoit ataché à ce mot aucune idée de souveraineté, du tems même de Jules César, qui avoit bien la réalité de souverain, mais qui gouvernoit sous la forme de l'anciène République. Ce mot perdit son anciène signification vers la fin du règne d'Auguste, ou peut-être même plus tard.

Le mot latin succurrere, que nous traduisons par secourir, veut dire proprement courir sous ou sur. Cicéron s'en est servi plusieurs fois en ce sens; succurram atque subibo. Quidquid (1) succurrit libet scribere, et Sénèque dit, obvios, si nomen non succurrit, Dominos salutamus; lorsque nous rencontrons quelqu'un, et que » son nom ne nous vient pas dans l'esprit » nous l'apelons Monsieur. » Cependant come il faut souvent se hâter et courir pour venir au secours de quelqu'un, on a doné insensible

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(1) Cic. ad Art. L. 14. Epist. 1. sub. finem. Senec. Ep. 111.

ment à ce mot par extension, le sens d'aider ou secourir.

Petere, selon Perisonius, vient du grec peto et petomai, dont le premier signifie tomber, et l'autre voler; ensorte que ces verbes marquent une action qui se fait avec éfort et mouvement vers quelque objet; ainsi :

1. Le premier sens de petere, c'est aler vers, se porter avec ardeur vers un objet, ensuite on done à ce mot par extension plusieurs autres séns, qui sont une suite du premier.

2. Il signifie souhaiter d'avoir, briguer, demander; petere consulatum, briguer le consulat; petere nuptias alicujus, rechercher une persone s'en mariage.

3. Aler prendre ; undè mihi petam cibum (1).

4. Aler vers quelqu'un; et en conséquence le fraper, l'ataquer. Virgile a dit: malo me Galatea petit (2), et Ovide, à populo saxis prætereunte petor (3).

5. Enfin petere veut dire par extension, ater en quelque lieu, ensorte que ce lieu soit l'objet de nos demandes et de nos mouvemens. Les compagnons d'Enée, après leur naufrage, demandent à Didon qu'il leur soit permis de se mettre en état d'aler en Italie, dans le Latium, ou du moins d'aler trouver le Roi Aceste.

(1) Ter. Heau. 5, 2, 25.

(2) Ecl. 3, v. 64.

(3) Eleg. de nuce, v. 27

JLL Italiam læti Latiumque petāmas (1).

At freta Sicaniæ saltem sedesque paratas, Undè huc advecti, regemque petamus Acesten. La réponse de Didon est digne de remarque:

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Sen vos Hesperiam magnam Saturniaque arva , Sive Erycis fines, regemque optatis Acesten. où vous voyez qu'optatis explique petamus. Advertere signifie tourner vers : advertere agmen urbi (2), tourner son armée vers la ville; nayem advertere, tourner son vaisseau vers quelque endroit, y aborder: ensuite on l'a dit par métaphore de l'esprit ; advertere animum", advertere mentem, tourner l'esprit vers quelque objet, faire attention, faire réflexion, considérer : on a même fait un mot composé de animum, et d'advertere; animadvertere, considérer, remarquer, examiner.

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Mais parce qu'on tourne son esprit, son sentiment, vers ceux qui nous ont ofensés, et qu'on veut punir; on a doné ensuite par extension le sens de punir à animadvertere; verberibus animadvertebant in cives (3); ils tournoient leur ressentiment, leur colère, avec des verges contre les citoyens, c'est-à-dire, qu'ils condanoient au fouet les citoyens. Remarquez qu'animus se prend alors dans le sens de colère (4). Animus, (1) Virg. Æn. I V. 558.

(2) Virg. Æn. 12, v. 555. (3) Saluste, Catil. 51.

(4) Basil. Fab. Thes. verb. animus.

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