plus amer que les herbes de Sardaigne, etc. (1), . Nos bergers disent plus aigre qu'un citron vert. Pyrrhus, fils d'Achille, l'un des principaux chefs des Grecs, et qui eut le plus de part à l'embrasement de la ville de Troie, s'exprime en ces termes dans l'une des plus belles pièces de Racine. Je souffre tous les maux que j'ai faits devant Troie ; Brûlé de plus de feux que je n'en alumai. (2) Brulé est au propre par raport aux feux que Pyrrhus aluma dans la ville de Troie; et il est au figuré par raport à la passion violente que Pyrrhus dit qu'il ressentoit pour Andromaque. Il y a un pareil jeu de mots dans le distique ani ect Hic jacet unoculus visu præstantior Argo, Nomen Joannes cui ninivita fuit. Visus est au propre par raport à Argus, à qui la fable done cent yeux ; et il est au figuré par raport à Despautère : l'auteur de l'épitaphe a voulu parler de la vue de l'esprit. Au reste, cette figure joue trop sur les mots pour ne pas demander bien de la circonspection; il faut éviter les jeux de mots trop afectés et tirés de loin. (1).... Ego Sardoïs videar tibi amarior herbis. Ibid. V. 41. (2) Rac. Androm, act. I. sc. 4. X I I. L'ALLEGORIE. L'ALLEGORIE a beaucoup de raport avec la métaphore; l'Allégorie n'est même qu'une métaphore continuće. L'allégorie est un discours, qui est d'abord présenté sous un sens propre, qui paroît tout autre chose que ce qu'on a dessein de faire entendre, et qui cependant ne sert que de comparaison pour donner l'intelligence d'un autre sens qu'on n'exprime point. Sé à quelque terme propre; par exemple, le feu de vos yeur, yeux est au propre : au lieu que dans l'allégorie tous les mots ont d'abord un sens figuré; c'est-à-dire, que tous les mots d'une phrase ou d'un discours allégorique forment d'abord un sens litéral qui n'est pas celui qu'on a dessein de faire entendre : les idées accessoires dévoilent ensuite facilement le véritable sens qu'on veut exciter dans l'esprit, elles démasquent, pour ainsi dire, le sens litéral étroit, elles en font l'aplication. Quand on a commencé une allégorie, on doit conserver dans la suite du discours, l'image dont on a emprunté les premières expressions. Madame des Houlières, sous l'image d'une ber gère qui parle à ses brebis, rend compte à ses enfans de tout ce qu'elle a fait pour leur procurer des établissemens, et se plaint tendrement sous cette image de la dureté de la fortune : Dans ces prés fleuris (1) J'ai fait pour vous rendre Tous mes soins pour vous Aux fureurs des loups. Mais il faut céder, Sans chien, sans houlète, Puis-je vous garder? L'injuste fortune (1) Poésies de Mad. des Houl. t. II. Me les a ravis, Le ciel par mes cris; Ces bois, ces prairies, Du Dieu des pasteurs Et vous font avoir Du matin au soir De gras pâturages, Tant que je vivrai En mille façons Porteront sa gloire, Du rivage heureux, Les nuits et les jours, Toute sa parure; Cette allégorie est toujours soutenue par des images qui toutes ont raport à l'image principale par où la figure a comencé ce qui est essentiel à l'allégorie (1). Vous pouvez entendré à la lettre tout ce discours d'une bergère, qui touchée de ne pouvoir mener ses brebis dans de bons pâturages, ni les préserver de ce qui peut leur nuire, leur adresseroit la parole, et se plaindroit à elles de son impuissance mais ce sens tout vrai qu'il paroît, n'est pas celui que Madame des Houlières avoit elle étoit ocupée des besoins de dans l'esprit (1) Id quoque imprimis est custodiendum, ut quo ex genere cœperis translationis hoc desinas. Multi enim, cum initium à tempestate sumpserunt, incendio aut ruinâ finiunt: quæ est inconsequentia rerum fœdissima. Quint. 1. VIII. c. 6. Allegoria. |