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Ces deux questions ont été résolues affirmativement, la première expressément, et la seconde implicitement, par arrêt de la cour de Bruxelles du 17

avril 1822.

Et en effet, la nomination de la personne aux fonctions dont il s'agit, équivalait bien à un acte de naturalisation, puisqu'aux termes de l'art. 9 de la loi fondamentale, l'étranger ne peut exercer de fonctions administratives s'il n'est naturalisé.

XI. A la suite de la contestation survenue dans la cause rappelée ci-dessus, remarque IX, les régnicoles avaient été condamnés par arrêt de la cour de Liége à payer à l'étranger C des sommes considérables. Sur le commandement qui leur fut fait de les payer, ils formèrent une opposition qu'ils basèrent sur ce qu'une saisie-arrêt avait été pratiquée entre leurs mainsp dont la demande en intervention avait été rejetée.

spar D. Cette saisie-arrêt ayant été faite en vertu d'une autorisation du président du tribunal de Liége, C prétendait que ce tribunal n'avait aucune juridiction à exercer entre lui et D, d'après l'arrêt de cassation ci-dessus rapporté, et demanda le rejet de l'opposition. Il reproduisait d'ailleurs les motifs qui avaient déterminé ledit arrêt. La cour de Liége, par un nouvel arrêt du 8 novembre 1822, a accueilli ces conclusions. Elle a décidé en outre qu'en s'agissant ici de l'exécution d'un de ses arrêts, elle seule pouvait en connaître, d'autant plus que tout ce qui pourrait être décidé en France entre B, C, et le tiers saisi, n'était d'aucune force dans ce royaume, conformément à l'arrêté du 9 septembre 1814.

TITRE II.

De la Privation des Droits civils par suite de condamnations judiciaires.

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LA privation des droits civils résulte, dans plusieurs cas, d'une condamnation judiciaire.

Quelquefois elle est prononcée comme peine principale: le plus souvent, elle est la suite nécessaire de la condamnation à une autre peine.

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Dans le premier cas, elle est ordinairement temporaire et partielle, [Sauf une seule exception que nous ferons connaître ci-après.] Dans le second, elle est quelquefois totale et toujours perpétuelle, sauf le cas de réhabilitation quand elle peut avoir lieu.

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[Mais comme, aux termes de l'art. 619 du Code d'Instruction criminelle, la demande en réhabilitation ne peut être formée qu'après que le condamné a subi sa peine, il s'ensuit qu'elle ne peut jamais l'être par celui qui a été condamné à la peine de mort, ou à une peine qui ne doit finir qu'avec sa vie, tels que la déportation ou les travaux forcés à perpétuité.]

Nous en traiterons dans deux chapitres différens.

CHAPITRE PREMIER.

De la Privation des Droits civils prononcée comme peine principale.

Les tribunaux, jugeant correctionnellement, peuvent, dans certains cas, interdire, en tout ou en partie, l'exercice des droits civiques, civils, et de famille, suivans; savoir: 1o. Ceux de vote et d'élection;

2o. D'éligibilité;

3o. D'être appelé ou nommé aux fonctions de juré ou autres fonctions publiques, ou aux emplois de l'administration, ou d'exercer ces fonctions ou emplois;

4°. De port d'armes;

5o. De vote et de suffrage dans les délibérations de famille;

6o. D'être tuteur, curateur, si ce n'est de ses enfans, et encore seulement sur l'avis de la famille;

7°. D'être expert, ou employé comme témoin dans les actes; Tia

8°. De témoignage en justice, autrement que pour y faire de simples déclarations. (Code Pénal, art. 42.)

Au surplus, les tribunaux ne peuvent prononcer cette interdiction, que lorsqu'elle a été ordonnée ou autorisée par une disposition particulière de la Loi. (Art. 43 dudit.)

CHAPITRE II.

De la Privation des Droits Civils, comme suite de la

condamnation à certaines peines.

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Nous avons dit que la privation des droits civils, qui a lieu par suite de la condamnation à une autre peine, était quelquefois totale: dans ce cas, elle se nomme Mort Civile. Nous en traiterons dans une première section.

Il est des peines qui n'emportent que la privation, perpétuelle à la vérité, mais de certains droits seulement. Nous les ferons connaître dans une seconde section.

SECTION PREMIÈRE.

De la mort Civile. [Voyez le Traité de la mort civile, par RICHER, en ayant soin d'omettre tout ce qui a rapport à la mort civile encourue par suite de la profession religieuse, et qui n'a plus lieu dans nos mœurs.]

La mort civile, considérée en elle-même, est l'état d'un individu qui a subi, en vertu de jugement, une peine ayant pour effet de retrancher celui qui en est frappé, du nombre des membres de la société. En effet, la jouissance d'un droit suppose toujours un devoir à remplir. Ceux donc qui, au lieu d'exécuter les engagemens qu'ils ont contractés envers le corps social, en troublent au contraire par leurs crimes, l'ordre et l'harmonie, méritent d'être privés des droits que l'ordre social leur assure.

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[Il importait d'établir que la mort civile est un état, et non simplement une peine, parce que, dans le premier cas, elle suit l'individu partout; dans le second, elle n'aurait d'effet que dans le pays où elle a été encourue. Or, la mort civile me paraît avoir tous les caractères d'un état. Ce sera, si l'on veut, un état négatif; mais ce n'en sera pas moins un. Et en effet, qu'est-ce que l'état appliqué aux personnes? c'est la condition de chacune d'elles; c'est, dit M. d'AGUESSEAU (tom. V, pag. 426), une qualité qui rend ceux qui en sont revêtus, capables ou incapables de certains, ou de tous engagemens; capables ou incapables de recueillir certaines, ou même toutes successions; capables ou incapables de remplir certaines, ou même toutes places ou fonctions. Or, tous ces caractères ne sont-ils pas entièrement applicables à la mort civile? Aussi n'ai-je jamais hésité à la regarder comme un état; et j'ai toujours prétendu en conséquence qu'elle suit l'individu partout, même en pays étranger. En vain dirait-on qu'elle est le résultat d'une condamnation prononcée par les Tribunaux français, dont les jugemens n'ont pas force d'exécution en pays étranger. Mais les lois qui déterminent la majorité, celles concernant le mariage, la paternité ou la filiation, sont-elles exécutoires en pays étranger? Et qui doute cependant que les dispositions de ces lois ne soient personnelles, et ne suive.it conséquemment le Français, même dans l'étranger? Le Français majeur de vingt-un ans, n'est-il pas également majeur dans un pays où la majorité est fixée à vingt-cinq? L'étranger majeur de vingt-un ans, mais mineur de vingtcinq, ne serait-il pas regardé en France comme mineur, si les lois de son pays ne fixaient la majorité qu'à vingt-cinq ans? Et, d'ailleurs, ce n'est pas, à proprement parler, le jugement qui fait encourir la mort civile; c'est la loi qui a dit que, lorsqu'un individu serait condamné à telle peine, il serait réputé mort civilement, à compter de l'exécution. Or, si la loi qui a dit que le Français serait majeur à vingt-un ans, s'exécute à son égard en pays étranger, pourquoi lá loi qui a dit que, dans tel cas, la mort civile serait encourue, ne s'y exécuterait-elle pas également?

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Mais quid, si un Français a été condamné à mort et exécuté dans l'étranger? L'on pensait anciennement qu'il devait être considéré comme s'il était mort naturellement, et avant l'exécution. (ROUSSEAUD DE LA COMBE, verbo ACCUSATION, 11. 12.) Et en effet, cet individu ne pourrait être regardé comme mort civilement, qu'autant qu'on le regarderait comme ayant été valablement jugé. Or, les jugemens des Tribunaux civils étrangers, rendus contre des Français, ne sont exécutoires en France, qu'autant qu'ils ont été déclarés tels par un Tribunal français, et après révision de l'affaire. Donc, à plus forte raison, doit-il en être de même des jugemens criminels; mais, d'un autre côté, dans l'espèce, il ne peut y avoir révision, puisque nous supposons l'accusé mort, et que, d'après nos lois, la mort éteint le crime, et empêche conséquemment toute poursuite. Nec obstat ce qui est dit dans l'alinéa précédent; car il s'agit, dans cet alinéa, d'un individu condamné par les tribunaux et d'après les lois de la nation à laquelle il appartient, tandis qu'ici il s'agit d'un Français condamné par des tribunaux étrangers. Dans le premier cas, la force du jugement ne peut être contestée : secùs dans le second.

Cependant la Cour de Colmar a jugé, le 6 août 1814, qu'un jugement de condamnation pour vol, rendu en pays étranger, suffisait pour justifier le reproche d'un témoin. (SIREY, 1815; 2° partie, p. 20.) Mais c'est qu'en général les reproches sont pour la plupart basés sur la moralité des témoins. Or, une condamnation pour vol, même en pays étranger, suffit bien certainement pour entacher la réputation du condamné. Au contraire, la moralité de l'’individu n'est prise nullement en considération pour déterminer s'il est mort civilement, puisque, l'homme convaincu des plus grands crimes, et même condamné, conserve la plénitude de ses droits, s'il vient à mourir avant l'exécution.] Lorsque cette privation est totale, elle est appelée Mort Civile, parce que la société regarde celui qui en est frappé comme n'étant plus, en quelque sorte, par rapport à elle ? un être vivant : elle n'attend plus de lui aucun secours; et réciproquement, elle lui refuse, non-seulement tous les

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