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AVIS.

J'ai publié, en 1848, un volume intitulé: La Réalité déterminée par le raisonnement, ou questions sociales sur l'homme, la famille, la propriété, le travail, l'ordre, la justice et sa sanction nécessaire, la religion. A la fin de ce volume se trouvent quelques pages qui portent pour titre : Liste alphabétique des principaux mots employés dans cet opuscule, avec la détermination de leur valeur.

Je fis en outre paraître cette Liste à part, et je l'intitulai : A, B, C de la science sociale.

Le présent Dictionnaire rationnel est la reproduction de cet A, B, C, mais refondu complétement, et plus que quintuplé par les additions faites à presque tous les anciens articles et par l'adjonction de près de six cents articles entièrement nouveaux; ce qui porte le nombre des mots définis et commentés à environ treize cents. -Les articles inédits sont distingués des autres, dans la table des matières, par un astérisque.

Un mot encore avant de clore cet avis préliminaire. Depuis quatre ans, mon fils prépare un travail qui, partant de la méthode pour rechercher la vérité, se terminera par la réalisation de la société régénérée, assise enfin sur la connaissance de cette vérité éternelle. Ce travail, exécuté avec la concision, la clarté et l'incontestabilité des traités de mathématiques, portera pour titre : Science sociale. Il est surtout destiné aux hommes d'étude et de réflexion. Les articles dont se compose ce Dictionnaire, plus particulièrement destiné aux gens du monde, en sont la paraphrase et le développement. Mon fils les a scrupuleusement revus, un à un, de commun accord avec moi. Je lui dois la plupart des définitions qui leur donnent quelque valeur.

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Décembre 1858.

PRÉFACE DE L'A, B, C DE LA SCIENCE SOCIALE.

Une organisation stable de la société suppose un bon raisonnement; un bon raisonnement est synonyme d'une langue bien faite; une langue bien faite implique des expressions nettement arrêtées.

L'AUTEUR.

Ces quelques pages sont un travail supplémentaire que nous avons cru utile d'ajouter à la seconde édition de La Justice et sa sanction religieuse, publiée récemment sous le titre de : La Réalité déterminée par le raisonnement (1).

Comme elles résument nos idées, nous en avons fait un petit traité particulier, qui du reste pourra être joint à la première édition par les personnes qui ne tiendraient pas aux additions dont nous avons augmenté la seconde.

Si nous n'avions eu que cette esquisse sur l'importante matière qu'elle annonce, nous nous serions certes bien gardé de la livrer isolément au . public, de peur qu'elle ne fût, par sa concision qu'on pouvait à raison accuser d'obscurité, un sujet d'étonnement et de scandale plutôt que de lumière et d'édification. En effet, une science nouvelle a besoin surtout d'être développée et expliquée surabondamment; se borner à la sécheresse d'un simple exposé, c'est vouloir qu'elle ne soit pas comprise.

Mais nous faisions paraître simultanément avec cet A, B, C, l'ouvrage plus considérable dont il n'est, pour ainsi dire, que la table raisonnée des matières.

Nous avons donc pensé que, par les indications des questions que nous traitons et de la manière dont nous les traitons, cette table alphabétique, facile

(1) Bruxelles, 1848, chez l'auteur, et chez tous les libraires.

à compulser, ferait peut-être naître chez quelques-uns le désir de recourir à ce qui doit nécessairement la précéder pour la rendre intelligible; tandis qu'à ceux qui nous auraient lu, elle servirait d'aide-mémoire pour leur rappeler au moins les points les plus frappants et les doctrines qui leur auraient paru les plus insolites.

Notre Table, au moyen de définitions et d'exemples toujours relatifs à la science sociale, a pour but de déterminer la valeur des mots les plus usuels dans cette science, et dont l'indétermination est la cause ordinaire des disputes sans fin auxquelles ils se prêtent.

Pour parler science et société, il faut s'entendre, et pour s'entendre, il faut donner aux mêmes expressions le même sens.

<«< On croit comprendre, dit Bentham, ce dont on parle habituellement, précisément parce qu'on en parle habituellement. Entre les mots et les choses il y a une telle connexion, que l'on est souvent porté à prendre les uns pour les autres quand on a des paroles dans l'oreille, on croit volontiers avoir des idées dans l'esprit. Un mot inusité se présente-t-il, le premier mouvement est de s'en défier; on l'examine avec soin pour savoir quel sens peut y être attaché mais quand un mot familier revient dans la conversation ou dans la composition, on le laisse passer sans contrôle comme une vieille connaissance. Cette longue habitude que l'on a d'user de telle ou telle expression, laisse croire que l'on en a vérifié la valeur. »

Cela posé, nous répéterons ici ce que nous avons dit en d'autres termes dans les prolégomènes de La Réalité, savoir que nous ne ménageons aucune opinion, aucun préjugé, aucune école, aucune secte, parce que nous ne voyons de preuves de certitude nulle part, et que nous découvrons le vague, l'absurde et le danger partout.

Nous attaquons hardiment, ouvertement et sous toutes ses formes le matérialisme, cette doctrine universelle aujourd'hui, tant de ceux qui l'avouent que de ceux qui s'en cachent, de ceux qui en ont la conscience que de ceux qui ne s'en rendent pas compte, de ceux qui croient fermement à sa vérité que de ceux qui ne font que mettre en doute s'il y a une autre vérité que la sienne, et si cette vérité est à notre portée, si nous pouvons nous assurer de son existence comme exprimant une réalité. Depuis que la société n'a plus le monopole des développements de l'intelligence, depuis que tout le monde peut librement voir, comparer, juger et prononcer, la vieille croyance vulgaire en un Dieu anthropomorphe, aussi bien que l'opinion philosophique moderne d'un Esprit suprême, distinct du monde, et celle qui sert de dernier refuge au dogme théiste, l'opinion d'un Dieu-Tout, se résolvent pour le raisonneur

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