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tons pas à proclamer que, à défaut de foi et de science, la société doit forcément avoir recours aux décisions par majorité, et que ces décisions ne peuvent être exécutées que par un homme qui se résigne à toujours faire la volonté des autres, sans jamais rien vouloir par lui-même. Nous avons démontré que ce n'est qu'une cheville. Or cette cheville est indispensable à l'agencement de notre ordre social qui, sans elle, se décomposerait en anarchie ou se concréterait en despotisme. Nous vivons donc sous une organisation bien pauvre et bien précaire. Celle conclusion n'est-elle pas irréprochable?

ROMANS.

La lecture des romans est dangereuse, surtout pour les jeunes gens qui, avant d'avoir vu le monde, en prennent une idée complètement fausse, et dès lors ne posent le pied sur le terre-à-terre de la vie qu'avec des dispositions à l'exaltation, propres seulement à faire prendre la vie en dégoût. Les jeunes gens timides et les jeunes filles, pour qui, pendant longtemps, il est impossible de rectifier les préjugés puisés dans les rêveries des romanciers, et qui ne parviennent jamais à les redresser tout à fait si ce n'est au prix de grandes et de longues douleurs, subissent pendant, pour ainsi dire, toute leur existence, le supplice d'aspirer vainement à des impressions qui ne peuvent se réaliser. De là l'impatience et l'ennui qu'excitent en eux le prosaïsme et la vulgarité de la vie qu'ils sont condamnés à subir, et qui les livre à l'atonie morale, s'il ne les jette dans le désespoir.

ROMANTIQUES.

Ce sont ceux qui cultivent l'indétermination, le

vague; ceux qui, dans l'obscurité qu'ils font autour d'eux, prétendent voir clair. Le romantisme est la doctrine de l'époque de doute, d'anarchie.-Voir le mot Classiques.

ROUAGES.

Sommes-nous de simples rouages, fonctionnant avec la grande machine que Dieu a confectionnée? Ne sommes-nous que quelque chose? En ce cas, laissons aller; rien d'ailleurs ne nous est possible que cela seulement. Si nous sommes autre chose ou plus que des rouages, en un mot si nous sommes quelque chose de réel, quelqu'un, ne cherchons qu'à nous connaître nous-mêmes, en partant de la perception de notre existence comme unité, pour arriver à la démonstration que le sentiment que nous en avons dérive de la sensibilité, réellement une, réelle en d'autres termes, immatérielle, éternelle.

ROUTINE.

La routine est au préjugé ce que la pratique est à la théorie. Tant qu'il n'y a que des préjugés, il ne peut y avoir que de la routine. Le préjugé a été jusqu'ici la seule théorie sociale, et la routine sa pratique.

RUSE.

Elle est la ressource des faibles sous le règne de la force, pour échapper le plus possible à la domination des puissants. Doit-on approuver la ruse? Non certes; mais il faut plaindre, plus encore que condamner, ceux qui y ont recours. Les seuls à condamner sont ceux qui obligent en quelque sorte les faibles à tromper pour ne pas être écrasés.

S

SAC

SACERDOCE. Ensemble des interprètes de la révélation.

Pendant toute l'époque d'ignorance sociale, la première profession est celle du prêtre; la seconde, celle du guerrier. L'accord entre les prêtres et les militaires a pour résultat l'ordre par la persuasion. La lutte entre ces deux classes engendre la liberté sans règle d'action; c'est-à-dire que, jusqu'à la découverte et à l'application de la vérité, elle favorise les progrès de la désorganisation sociale, qui ne peuvent être quelque peu ralentis que par l'emploi de la force non dissimulée. A toutes les époques sociales, le sacerdoce représente la science, la raison les armes, la force. Il y a justice par la soumission de la force à la raison. Sinon il y a anarchie.

Aussi longtemps qu'il y a foi socialement, le corps sacerdotal est le seul dépositaire de la science, l'organe et l'interprète de la vérité. Lorsque le doute est socialisé, les prêtres continuent à être des savants, mais ce sont des savants auxquels chacun fait concurrence. Les colléges de prêtres étaient quelque chose, lorsque tout le monde voyait dans les prêtres les savants par excellence. Une fois cette croyance détruite, le pouvoir a substitué, aux corps sacerdotaux, les corps appelés savants, les académies, les universités, dont bientôt tout le monde aussi s'est moqué, parce que chacun s'est estimé aussi savant, si ce n'est plus savant que les professeurs diplômés et les académiciens. Et comme les prêtres continuent à dominer sur plusieurs et qu'ils tendent toujours à dominer sur tous, ceux qui leur envient le pouvoir crient haro sur eux et vont jusqu'à prétendre qu'il n'y aura d'ordre et de paix que lorsque le dernier prêtre aura été supprimé. C'est du XVIIIe et du XIXe siècle à la 1793.

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SAC

prêtres, fût l'ordre véritable, la question est de savoir comment ils parviendraient à l'établir sans l'aide d'une révélation et malgré la prépondérance inévitable des organes du Révélateur. Ils extermineraient les prêtres, disent-ils. Fort bien. Mais le sacerdoce? Les prêtres ne sont pas, comme les loups, une espèce particulière, ou, comme les tribus indiennes, une race distincte, qu'on puisse détruire à la longue, en usant de force et de ruse sans cesse ni fin. Les prêtres morts, le sacerdoce renaît en se recrutant. Tout homme peut se faire prêtre, et tous les hommes de sens et de cœur se feront prêtres, ou du moins s'allieront avec les prêtres, le jour où la force seule sera invoquée contre ceux-ci, c'est-à-dire où leurs adversaires conviendront explicitement que les prêtres sont peut-être dans le droit et qu'eux-mêmes ont indubitablement tort.

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Le sacrifice inutile à celui qui se l'impose est une sottise. Il n'y a que le but qui rende le sacrifice rationnel, méritoire par conséquent. Le sacrifice pour se sacrifier est un acte dépourvu de raison, et par cela seul contraire à la raison, un acte de folie. Pourquoi sacrifierait-on les jouissances de cette vie, si l'on est incertain d'une compensation dans une vie future? Pourquoi se priverait-on du bonheur dont on est susceptible, pendant le peu d'instants qu'on a à vivre, si, avec la vie, toute possibilité d'être heureux s'évanouit sans retour, ou si du moins il ne reste que l'espérance de voir le sacrifice, l'abnégation trouver ailleurs un ample dédommagement? L'homme n'a de motif pour se dévouer au bonheur des autres hommes, que celui de son propre bonheur, soit qu'il le place, avec les religions, dans une existence ultra-vitale, soit qu'un sentiment vague le rattache à ses yeux à la satisfaction que

le souvenir de son dévouement lui fait éprouver. << Point d'ordre social, dit Lamennais, sans le sacrifice des intérêts de chacun à l'intérêt de tous : or le sacrifice est sans raison, c'est-à-dire absurde, quand c'est l'homme qui le demande à l'homme, parce qu'il ne peut rien offrir en compensation, et que ce sacrifice, qui n'est autre que la vertu, serait évidemment la plus inconcevable folie s'il n'existait une société plus excellente et plus durable où il recevra sa récompense. »>

Lorsque la société, connaissant la vérité, sera organisée rationnellement, il y aura entre les hommes concurrence pour se dévouer les uns aux autres, comme actuellement il y a concurrence pour s'exploiter les uns les autres : le résultat sera diamétralement opposé, puisque, le motif ayant changé, tout aura moralement pris une nouvelle face les hommes seront régénérés. La fraternité que des fous furieux veulent nous imposer, à coups du sabre légal ou de la hache révolutionnaire, ne se réalisera que par le dévouement basé sur l'incontestabilité. Inutile de dire que, quand on sera parvenu à ce point, la fraternité existera, pour la première fois, ailleurs que dans le sentimentalisme parlé, écrit, imprimé, décrété, constitutionnalisé, des prédicateurs, des moralistes, des philanthropes, des maçons, des amis forcenés de l'humanité, et des despotes ne laissant de choix à leurs frères qu'entre la liberté et la mort.

SACRILÉGE. Profanation des choses consacrées à la Divinité.

Il n'y a de sacrilége que pour celui qui croit aux choses sacrées. Ce que le fidèle appelle sacrilége est, du moins sous le rapport religieux, pour le non-croyant un acte sans conséquence. Quand la société reposait sur le principe de la foi, elle punissait rigoureusement comme sacriléges, même les incrédules qui témoignaient le moindre mépris pour les objets les plus vulgaires offerts à la vénération publique, et elle avait raison car ces insensés, innocents, nous le voulons bien, devant la justice éternelle, étaient évidemment coupables comme perturbateurs de l'ordre, et mettaient en péril l'existence même de cette société. — Voyez le mot Blasphème.

SAINT-SIMONISME.

La doctrine de Saint-Simon est la volonté d'un seul substituée à la volonté de tous, le despotisme de l'arbitraire accepté comme raison suprême et absolue. Les saint-simoniens avaient compris qu'il faut, pour maintenir l'ordre : 1° une loi commune, basée, à défaut d'une démonstration incontestable,

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Salarier, c'est appliquer le principe sur lequel repose notre organisation sociale, en attribuant aux travailleurs une part dans la richesse qu'ils ont produite. Jusqu'à présent, cette répartition a été aux mains de quelques hommes, que la nécessité sociale a rendus maîtres de toute la richesse, et dont cette même nécessité force la société à maintenir la puissance avec la richesse, afin qu'ils continuent à ne laisser aux travailleurs que ce qui leur est strictement indispensable pour leur subsistance. Le salaire ne sera proportionné au mérite de chacun qu'à l'époque de connaissance de la vérité et d'application de la justice. Maintenant il est et doit être le moins élevé possible, quoi que puisse valoir le travail, et quel que soit le temps qui y est employé.

SALARIÉS (Cultes).

Dans la plupart de nos États constitutionnels représentatifs, on paye les rabbins juifs, successeurs de ceux qui ont crucifié Jésus, le Christ, et qui enseignent qu'il n'y a qu'un Dieu, celui d'Abraham, et qu'une loi, celle de Moïse; on paye

les prêtres catholiques qui établissent qu'il y a trois personnes en Dieu et que Jésus, Dieu luimême, une de ces personnes, est venu substituer sa loi à celle des Juifs qui l'ont mis à mort; on paye les pasteurs réformés qui démontrent que le chef de l'Église catholique est l'antechrist et cette Église elle-même une école d'idolatrie. Le bon sens le plus vulgaire suffit pour faire comprendre que c'est là entretenir la confusion dans les esprits, justifier l'indifférence religieuse, renverser la morale et préparer l'anarchie.

Mais est-il possible de faire autrement? Avec un tel état social donné, non certes. Il faudra même que, pour être conséquent, on fasse encore quelques pas de plus dans l'absurde : il faudra finir par rétribuer, de l'argent de tous, le premier débiteur. de sornettes quelconques, décorées du nom de culte, de religion, qui aura été assez adroit pour grouper autour d'elles un certain nombre de fous. Après quoi, la société deviendra ce qu'elle pourra.

SANCTION. Ce qui rend une loi obligatoire; ce qui garantit son exécution.

L'exécution de la règle morale, de la règle du devoir, ne peut être garantie que de deux manières, savoir, par la sanction éternelle, religieuse, ou par la sanction temporelle, légale.

L'homme qui raisonne remplit son devoir ou ce qu'il croit son devoir, par la crainte du mal que lui attirerait la violation de la règle morale. Cette crainte en est la sanction.

Il n'y a de sanction possible que celle de la force ou celle de la raison. Tant que la raison est socialement indéterminée, la force règne, sous le masque de la raison pour les temps de foi, sans masque aucun à l'époque du doute. La sanction véritable ne se dévoile qu'à l'époque sociale de connaissance. Tout autre droit que celui de la force, qui n'a point sa sanction inévitable et incontestable, est un droit pour rire.

A moins qu'on n'ait affaire à des automates, l'ordre ne s'obtient que par la soumission générale à une même règle des actions, et cette soumission doit être libre, c'est-à-dire motivée par la seule conviction que la règle est obligatoire parce que sa sanction est assurée, incontestable, réelle. Selon Platon, « on s'est attaché à la justice, non qu'elle soit un bien en elle-même, mais parce que l'impuissance où l'on est de nuire aux autres la fait regarder comme telle. Car, celui qui peut être injuste, et qui est vraiment un homme, n'a garde de s'assujettir à une pareille convention; ce serait folie de sa part. » En effet, être juste à son détriment, quand on peut impunément être injuste et même

y gagner, n'est rationnel que pour l'homme qui a la certitude que ses actions seront punies ou récompensées.

Pour que la société se conserve, il faut, en dernière analyse, que la raison se constitue en sanction absolue et incontestable. Nous avons dit à plusieurs reprises pourquoi jusqu'à présent la force a été et pourquoi elle continue à être l'unique sanction temporelle possible, et pourquoi depuis qu'il n'est plus possible de comprimer l'examen, la raison est devenue l'unique sanction éternelle, réelle, qui puisse être admise socialement, qui puisse conserver l'humanité.

La sanction ultra-vitale est la seule qui ne soit pas relative à la force, la seule par conséquent qui soit infaillible et inévitable pour chaque vie, tandis que toutes les sanctions imaginables relatives seulement à une vie sont arbitraires, sont incertaines pendant cette vie même. Pourquoi? Parce qu'il n'y a de sanction d'une règle morale que s'il y a des êtres moraux, c'est-à-dire des êtres qui raisonnent leur conduite et, pour mériter le bonheur, font ce qu'ils croient le bien, pour échapper au malheur, évitent ce qu'ils estiment le mal. Or cette sanction ne saurait, rationnellement, avoir de la réalité à leurs yeux, que s'ils la puisent en eux-mêmes. S'ils placent la sanction hors d'eux, en Dieu par exemple, ou dans la nature, dans la nécessité, dans l'arbitraire, soit de la volonté des hommes, soit des lois, la logique les contraint d'avouer qu'il n'y a pas d'autre sanction que la force, sanction qu'eux-mêmes ont toujours le droit de fouler aux pieds, bien entendu, quand ils disposent d'une force plus grande. La sanction réelle ne peut donc être découverte, déterminée, démontrée, que par le raisonnement sur l'ordre moral, par le raisonnement métaphysique : elle ne saurait être constatée par l'observation ou l'expérimentation, comme un fait physique, ni induite de l'enchaînement des faits elle n'appartient à aucune vie particulière, car elle doit dominer toutes les vies possibles; elle est éternelle.

- M. Proudhon clôt une tirade extrêmement remarquable, et d'autant plus remarquable qu'il la met dans la bouche du président du tribunal qui, en dernier lieu, l'a condamné, par la phrase que nous allons reproduire. Nous avons donné ce qui, dans cette tirade, se rapporte à Dieu et à l'âme, à la fin de l'article Ames immortelles; elle se termine ainsi : « La justice subsiste par elle-même, gratuite et sans autre espoir. Cet athéisme légal qui a soulevé tant d'anathèmes, est le sublime de la vertu. » Ce ne sont pas des anathèmes que nous opposons à M. Proudhon; ce sont des raisonnements. Qu'est-ce

qu'une justice qui se sanctionne elle-même ? La force. Eh bien, la force n'a qu'elle-même pour appui. Sous le bâton d'un être fort, l'être faible esquive le coup ou le pare; l'être fort le prévient en frappant plus brutalement. C'est là l'athéisme légal appliqué. M. Proudhon n'a point prouvé qu'il n'y ait pas d'autre justice que celle-là. Sa devise: Destruam et ædificabo ne s'est encore réalisée qu'à demi : il est expert en démolition; mais de reconstruire, il ne l'essaie même pas.

M. Proudhon affirme que la justice est immanente dans l'âme de l'homme. Nous avons vu que l'éloquent écrivain ne reconnaît dans l'individualité qu'un groupe. La justice fait donc partie de ce groupe; c'est un des organes qui constituent le fonctionnement général, au même titre que la circulation, la digestion, la sécrétion. Nous acceptons ces dernières fonctions dont l'immanence a la vie pour résultat. Mais des hommes très-vivants et se portant à merveille font fi de la justice, sans qu'il leur arrive rien de fâcheux, à moins qu'ils n'aient eu la maladresse de s'exposer à la rigueur des lois sans être plus forts qu'elles. Où est alors l'immanence?

Nous professons des idées diamétralement opposées. Pour nous, il n'y a que raison et force: aussi longtemps que la force peut imposer silence à la raison, elle règne seule; dès que la raison peut la contrôler, elle est sur la voie pour la dominer complétement. La justice relève exclusivement du raisonnement : c'est ce qui fait sa valeur, ce qui la rend méritoire. Si l'on était juste comme on respire ou comme on laisse battre son cœur, il n'y aurait ni mérite ni démérite, et logiquement toute peine et toute récompense seraient absurdes. L'athéisme légal serait une vérité.

Le raisonnement en partant, soit d'une révélation (époque de foi), soit de la démonstration scientifique (époque de connaissance de la vérité), parvient à établir le devoir d'être juste sur l'intérêt de celui qui agit, intérêt ultra-vital surtout puisque le plus souvent les passions organiques lui opposent un intérêt contraire.

Du reste, nous savons parfaitement que les doctrines de M. Proudhon sont généralement professées in petto par ceux-là mêmes qui lui appliquent les doctrines contraires. C'est la conséquence inévitable du doute social, que l'athéisme légal, prêché sur les toits par des intelligences hors ligne, n'a pas peu contribué à répandre et à consolider. Nous nous sommes donné la mission de démontrer aux maîtres des sociétés que ce n'est point en demeurant dans cette voie qu'ils conserveront ce dont ils jouissent. Nous leur montrons la voie où ils devraient se hâter d'entrer pour que,

tous étant heureux autour d'eux, ils le fussent eux-mêmes désormais sans crainte et sans remords.

C'est ici le lieu de répondre à une objection qui aura été souvent formulée contre nous à propos de nos fréquentes discussions avec M. Proudhon. Pourquoi, aura-t-on dit, s'en prendre toujours au même publiciste pour combattre des idées qui sont celles du siècle, que tous mettent en pratique, et que quelques-uns des plus éminents érigent hardiment en théorie... Pourquoi? Parce que, de tous nos adversaires, M. Proudhon est celui que nous estimons le plus. Nous donnons là, nous le savons bien, un immense avantage à ceux qui concluront de notre aveu que les idées de M. Proudhon ne sont donc pas aussi dangereuses que nous avons voulu le faire croire. A cela, nous répondons, une fois pour toutes, que jamais nous n'avons soutenu que les hommes fussent conséquents dans leur conduite avec les principes de conduite qu'ils ont réduits en système. S'il en était ainsi, il y a longtemps que la société aurait péri ès mains de ses prétendus régénérateurs. Nous devions exposer les conséquences funestes des théories proudhoniennes ; cela ne nous empêchera jamais de témoigner toute notre sympathie pour le noble caractère de leur auteur, et de nous tenir pour fort honoré de l'amitié qu'il a pour nous.

SANG.

On dit les liens du sang, le cri du sang. L'expression, quoique figurée, n'en est pas moins impropre; car elle mène à l'erreur. Personne, nous le savons bien, ne prétend que le sang crie; qu'il est sensible, intelligent; qu'il attache ou sépare; qu'il perçoit ou qu'il exprime quoi que ce soit. Nul n'ignore que le mouvement du sang est une des conditions de certaines vies particulières, et que tout se borne là. Mais ce qu'on n'attribue pas au sang seul, on l'affirme de l'organisme complet, et c'est également faux. On soutient, par exemple, que le contact physique de deux individus, qui n'avaient préalablement aucune idée l'un de l'autre, suffit pour qu'ils se reconnaissent respectivement comme père et fils. Cela rentre dans la catégorie des sympathies et des antipathies, simples mouvements physiques d'attraction et de répulsion, qui au moral, c'est-à-dire, pour l'intelligence, la raison, n'ont pas d'autre valeur que celle de faits, et ne prouvent rien au delà du fait même.

SANTÉ.

La santé est une condition sine qua non pour qu'il y ait possibilité de travail. Or, si le travail exigé surpasse les forces, ou si le salaire est au

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