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& leur durée ou leur fréquence peut changer ces fentimens en habitude.

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Une paffion violente porte une forte d'excufe avec elle: mais fuccomber fous une médiocre, c'est lâcheté.,, Si je pouvois dormir, difoit un ami à un autre qui le confeilloit; fi je pouvois manger, ou prendre quelque plaifir à quoi que ce foit, fi je pouvois chaffer l'ennui qui me dévore, je prendrois patien,, ce: mais il vaut mieux périr que de vivre ,, ainfi, & avant de fuccomber je veux du ,, moins être heureux. "

Princes de la terre! afferviffez-nous: notre défunion le permet, nos foibleffes l'exigent; mais respectez les plaifirs qui ne nuifent point aux vôtres. Ne nous laiffez pas amollir dans l'excès; mais préfervez nous auffi de végéter dans la langueur: vous étes coupables de toute jouiffance que vous nous raviffez fans une néceffité abfolue. Voyez la beauté inutile fe deffécher fans fruits fous vos arides loix : cherchez s'il n'eft pas poffible d'allier l'ordre avec nos penchans, la juftice avec la nature: affurez nous l'ufage de fes bienfaits, & les confolations les plus douces qu'elle entremêle à la foule de nos maux.

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Et toi jeune homme! fait pour plaire, n'abufes point de ce dangereux don: ne te fais pas un jeu barbare de troubler des familles & corrompre l'innocence n'ériges pas une fauffe gloire fur les larmes de la beauté...Si elle a jeté fur toi un œil de faveur, probablement tu l'auras; mais ce triomphe est trop facile pour t'honorer: la nature l'amene au-devant de toi, la fimplicité l'accompagne, le defir feme de fleurs les avenues du précipice, & affure les pieges les plus groffiers: oui, tu l'auras. Mais fois généreux; la force eft l'appanage de ton fexe, la foibleffe eft celui du fien: donnes lui de te trouver aimable, n'immoles pas l'enfant qui te fourit, & qui te tend les bras: vois le regret qui fuit de près l'ivreffe; la honte, qui fuccede à la candeur, & cette foule d'écarts qu'entraîne le premier prefque fans résistance..... Oui, fois généreux.

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par

Sans doute qu'il eft pénible de s'arracher au penchant mais entre deux maux il faut choifir le moindre; & d'après ce même principe, fi, condamné au célibat, une nature de feu reclame avec violence l'épanchement d'un fuperflu de fanté, qui pourroit la détruire, calcules du moins tes plaifirs avec la probité. La différence

différence de circonftances en met fouvent une prodigieufe entre les mêmes actions. Ne ravis pas une fille à elle-même, une femme à un époux tendre, & toutes deux à des parens respectables ; n'empoisonnes pas ton fang & celui de ta poftérité, avec les malheureuses victimes du libertinage; ayes recours à quelque objet dont la position ait moins d'influence fur le bonheur particulier & public:.. vieille ou laide.. peu importe: elle eft femme, elle eft faine, elle ne peut nuire : c'eft affez. Mais fi une jeune innocente, naïve, sensible, convenant de ce qui eft en elle, & avouant le befoin d'aimer & de l'être;.. fi elle demandoit timidement: Et moi que dois je faire? Hélas! que répondre?

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DE L'AMBITION.

Le defir de s'élever eft divifé en différentes branches, par la diverfité des caracteres & des jugemens. L'amour de la gloire eft la principale, paffion noble, quoiqu'elle ne foit en partie que la dépendance de l'opinion; mais elle devient le fléau de l'humanité lorfqu'elle poursuit indiftinctement fon but, fans égard aux conféquences. On l'a répété fouvent; un conquérant, qui, fans autres vues que celles de fa gloire, répand la défolation, le meurtre & le brigandage, fait fimplement en grand ce que Cartouche faifoit en petit; & loin que cette grandeur dût nous infpirer de l'admiration, elle devroit plutôt étendre notre mépris proportionellement au tort fait à l'hu manité.

Un fragment intéreffant dans l'hiftoire de l'ambition, feroit celui qui nous détailleroit la marche & les refforts fecrets de ce.grand nombre d'hommes, qui, des derniers étages de la fortune, s'élancerent aux premiers. Nous

connoiffons plus de quinze Empereurs a), autant de Rois, plufieurs Papes & une foule d'autres perfonnages illuftres, qui, de la naisfance la plus commune, s'éleverent au faîte du pouvoir. En fuivant leurs moyens on verroit probablement que la prudence y contribua beaucoup, le courage encore plus, & la fortune autant que les deux.

Un autre fragment plus utile, feroit celui qui nous offriroit des tables de proportion entre le nombre des ambitieux qui échouerent & ceux qui réuffirent. L'extrême prépondérance des premiers feroit des plus calmantes, &, ce qui le feroit encore davantage, c'est de voir combien dans les fortunés mêmes, il y eut peu d'heureux. En lifant dans leurs cœurs nous verrions les defirs fe multiplier avec les fuccès, & nous frémirions probablement d'entrer dans une carriere auffi parfemée d'inquiétudes, d'obf tacles, de dangers & fouvent de remords.

a) Vitellius, fils de favetier. Pertinax, d'un faiseur de briques. Macrin, d'un affranchi. Dioclétien, d'un esclave. Valentinien, d'un cordier. Bafile le Macédonien, d'un efclave. Léon d'Ifaurie, d'un berger. Puppien, d'un maréchal. Galerius avoit été boucher; Justin, vacher; Andrifque, foulon &c. Ext. de le Gendre

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