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c'est à ce titre qu'il se rendit digne de la haute estime qu'il obtint dans l'opinion publique (1) » .

Une occasion peu commune se présenta bientôt de faire éclater ses talents comme praticien. La terrible épidémie du typhus que les prisonniers espagnols avaient apporté en 1813, désolait les départements de l'Yonne et de la Côte d'Or. A la recommandation de la Faculté de médecine, le ministre de l'intérieur choisit Guersant pour diriger le traitement à employer. Il remplit cette périlleuse mission avec tant de succès, qu'à son retour, en février 1814, il fut nommé médecin adjoint de la maison de Santé. Des articles remarquables, publiés dans le grand Dictionnaire des sciences médicales, un ouvrage spécial sur les épizooties (4 vol. in-8. Panckouke. 1815), ajoutèrent à sa réputation. Déjà il était connu pour s'occuper, d'une manière spéciale, de la pathologie de l'enfance, lorsque plusieurs vacances successives lui ouvrirent, en mai 1818, les portes de l'hôpital des enfants malades.

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« Ce vaste et triste champ d'observations, auparavant si peu exploré, était dès-lors aux mains d'un travailleur ardent, dévoué, infatigable, qui, trente années durant, le féconda et lui fit donner les plus riches moissons scientifiques. C'est, on peut

(1) Allocution de M. le professeur Duméril, aux funérailles de M. le docteur Guersant, au nom de l'Académie nationale de médecine.

le dire, en effet, de l'hôpital des enfants que sortirent les travaux si neufs, si intéressants, si nombreux que M. Guersant publia, dans le dictionnaire de médecine en 21 volumes (1828) sur la plupart des affections de l'enfance, sur le muguet, les convulsions, la méningite granuleuse, le croup, le rachitisme et les scrofules; travaux empreints d'une couleur pratique si remarquable, résultats éclatants et solides d'une expérience consommée. C'est à l'hôpital, en face même de la nature souffrante ou inanimée, qu'ont été tracées ces descriptions si vraies qui ont popularisé la connaissance des maladies de l'enfance; tableaux faits de main de maître et qui resteront à jamais dans la science. Grâce à ses écrits, grâce à une clinique savante qu'il fit pendant de longues années et qui attiraient une foule de médecins français et étrangers, bien des préjugés et des erreurs sur la pathologie de l'enfance se sont évanouis devant les lumières d'une observation exacte(1).

Depuis longtemps, et dès l'année 1814, Guersant avait été nommé l'un des seize membres adjoints à la Société de médecine établie dans le sein de la Faculté, ce qui l'appela de droit, et par ordonnance, à l'une des places de titulaire dans l'Académie de médecine. Plus tard, il fut nommé

(1) Discours prononcé sur la tombe de Guersant, par le docteur Roger, agrégé de la Faculté de médecine de Paris.

médecin consultant du roi et des maisons de SaintDenis, chevalier, puis ensuite officier de la légiond'honneur. Il était, en outre, agrégé libre de la Faculté de médecine.

Les exigeances d'une clientelle nombreuse, l'âge, n'affaiblirent point l'ardeur de Guersant pour la science; plusieurs de ses écrits, et ses meilleurs, datent de ses dernières années; la mort est venue interrompre un Traité complet de pathologie de l'enfance auquel il travaillait depuis longtemps, ouvrage assez avancé pour donner l'espoir qu'on ne laissera point perdre les fruits d'une incomparable expérience. Son fils et son gendre (M. Blache), ses élèves les plus distingués, et dont les noms sont déjà si avantageusement connus, tiendront à honneur d'élever ce dernier monument à la mémoire de leur savant maître.

Guersant a succombé le 23 mai 1848, à une double pneumonie. Il était âgé de 71 ans.

Aux regrets que lui inspire la perte de ses membres, l'Académie doit ajouter ceux qu'elle ressent par la mort de ces savants illustres qui appartiennent, pour ainsi dire, à toutes les corporations scientifiques. Notre compagnie n'a laissé échapper aucune occasion de témoigner de son respect et de son admiration pour ces grands génies qui font la gloire de la France.

Cette année, elle s'est empressée de s'associer, par une souscription assez forte, aux membres de l'Institut qui ont eu la bonne pensée d'élever, à Etampes, un monument en l'honneur de GeoffroySaint-Hilaire. Cet hommage de reconnaissance nationale était bien dù au zoologiste éminent, qui, par ses nombreux travaux et la tendance philosophique qu'il a su imprimer aux recherches des naturalistes contemporains, a contribué, d'une manière si remarquable, aux développements rapides que les sciences naturelles ont pris en moins d'un demi-siècle.

Je termine en regrettant de n'avoir pu imprimer aux divers travaux de l'Académie, cette physionomie animée et intéressante qu'ils avaient dans nos séances particulières, et qui eût aidé à supporter plus patiemment l'analyse incomplète, et pourtant déjà si longue, que mes devoirs de secrétaire m'obligeaient à présenter.

J'aurais voulu, surtout, faire naître cette conviction que notre Compagnie a pris une part honorable et large à ce mouvement intellectuel qui se manifeste de tous côtés; qu'elle a contribué à reculer, sur plusieurs points, les limites de la science, et qu'elle a répandu autour d'elle des notions utiles. Je serais heureux de penser que, sous ce rapport du moins, j'ai obtenu le résultat que j'ambitionnais.

SUR LES TRAVAUX

DE LA CLASSE

DES BELLES-LETTRES ET DES ARTS,

PENDANT L'ANNÉE 1847-1848,

PAR M. A.-G. BALLIN,

archiviste.

Messieurs,

La commotion qui, dès le commencement de cette année, a ébranlé notre patrie, ne pouvait manquer d'exercer une certaine influence dans la modeste région des Sciences, des Lettres et des Arts, où se renferme l'Académie; la Cité était livrée aux plus sinistres préoccupations, l'Hôtel-de-Ville avait un aspect guerrier qui devait en éloigner les muses. Aussi, n'avez-vous pas cru convenable de tenir votre séance publique et annuelle, à l'époque ordinaire du mois d'août; mais, vous avez pensé qu'il n'en serait pas moins utile de publier un compte fidèle de vos travaux, qui paraissent devoir

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