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D'apres le dessin de M BRUNET DEBAINES, Architecte de l'Arrond" du Havre

Facade occidentale de l'Eglise de Montivilliers.

P

ÉGLISE SAINT-SAUVEUR

DE MONTIVILLIERS.

DÉTAILS ANECDOTIQUES,

PAR M. BARABÉ,

Comme l'église de Saint-Sauveur, considérée dans son ensemble, était à la fois conventuelle et paroissiale, son histoire se lie à celle du monastère. C'est pourquoi nous trouvons utile de parler au moins sommairement de ce dernier, afin de mieux nous rattacher aux époques de la construction, de la restauration ou de la reconstruction totale ou partielle de cette église.

Ce monastère, qui a donné son nom à la ville, avait été fondé vers l'an 682 par Saint-Filibert, abbé de Jumiéges, sur une terre que Waraton, maire du Palais, avait donnée à cet abbé, pour y établir une communauté de Religieuses (1).

Cette maison, richement dotée, éprouva, comme celles de Jumiéges, de Saint-Wandrille et bien d'autres, la fureur des peuples du Nord qui, dans le cours du 1x siècle, exercèrent leurs ravages jusqu'à Rouen.

(1) Duplessis, p. 106.

Ce fut pour réparer ces désastres que Robert due de Normandie, surnommé le Magnifique, sur les instances de Béatrix, sa tante, et de tous les fidèles, accorda en 1035 à l'abbaye de Montivilliers, où Béatrix avait pris le voile quelques années auparavant, divers priviléges (1), tels que ceux de Coutume ( totum suburbium cum teloneo et aliis consuetudinibus suis), et d'Exemption (Ecclesiam sanctæ Mariæ ab omni episcopali consuetudine absolutam), auxquels participèrent les autres églises de la ville, Sainte-Croix et Saint-Germain.

On voit qu'à cette époque, l'église de Saint-Sauveur n'existait pas en titre. C'est qu'en effet ce ne fut guère avant 1200 que la nef abbatiale fut affectée au service du culte paroissial.

La charte de donation ci-dessus accordée par Robert (père de Guillaume - le - Conquérant), sur le point de partir pour la Terre-Sainte, d'où il ne revint pas, étant mort à Nicée la même année, retrace les vicissitudes malheureuses éprouvées par ce monastère, et l'origine de sa fondation, tout en confirmant les droits et libéralités que Richard II son père lui avait concédés. Elle ajoute : « Quod quidem non nostræ potestatis violentiâ agitur, sed » donatione, voluntate, et concessione domini Roberti « Rothomagensis Archiepiscopi Patrui mei constituitur et « confirmatur. »

A Béatrix qui avait restauré le monastère, succéda Elisabeth, qui rebâtit, à ce qu'on prétend, presqu'à neuf, l'église abbatiale, et l'on ne peut nier du moins, dit Duplessis, que le portail et la tour ne soient au plus tard du X1° siècle (2).

1) Archives départementales.

2) Description historique de la Normandie, t. I, p. 108, no 114.

Les auteurs du Gallia Christiana reportent la mort de cette seconde abbesse à l'année 1116 ou 1117; puis, ajoutent «Creditur Basilicam monasterii sui, quæ adhuc « superest, a fundamentis excitasse.» D'après cette autorité, cette construction a pu aussi se terminer dans cette première période du x11° siècle.

Dans la suite, cette église a encore eu besoin de plusieurs réparations considérables. «On y employa, en 1370, la somme de 700 florins, à laquelle les habitants de la ville avaient été condamnés pour avoir causé plusieurs dommages aux Religieuses (1). »

Lors des troubles qui désolèrent la France, et surtout à l'époque de l'occupation anglaise, les Religieuses eurent à regretter la perte de beaucoup de titres. Telle était en effet leur triste position que, par le fait de la guerre, étant privées de leurs biens, et réduites même au faible revenu de deux moulins que les habitants voulaient encore assujétir à la taille, elles présentèrent requête à Charles VII, en 1439 (2), pour en être affranchies, comme n'étant pas tenues aux charges du guet et de la garde des portes de la ville : « Qu'autrement elles ne pourroient soutenir, ne « maintenir leur Esglise ne leurs maisons qui sont en voie « de descheoir en grant ruyne et diminution, ne aussy ne pourroient faire ne continuer le service divin ne « avoir leur vie, estat et substantation. »

Le Roi, étant à Orléans, fit droit à leur requête le 21 octobre de la même année, en considération de leur position, et en vertu d'ailleurs des priviléges qui leur avaient été accordés par ses prédécesseurs Rois de France

1) Dom Duplessis, ibidem.
(2) Archives du département.

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