IV. Le Héron. Un jour sur ses longs pieds alloit je ne sais où N Le héron au long bec emmanché d'un long cou L'onde étoit transparente ainsi qu'aux plus beaux jours; Ma commere la carpe y faisoit mille tours Le héron en eut fait aisément son profit: Mais il crut mieux faire d'attendre Qu'il eût un peu plus d'appétit : Il vivoit de régime, et mangeoit à ses heures. Des tanches qui sortoient du fond de ces demeures. Comme le rat du bon Horace : Moi, des tanches! dit-il : moi, héron, que je fasse Du goujon! c'est bien là le dîner d'un héron! La faim le prit: il fut tout heureux et tout aise Ne soyons pas si difficiles : Les plus accommodants, ce sont les plus habiles; On hasarde de perdre en voulant trop gagner. Sur-tout quand vous avez à-peu-près votre compte. V. La Fille. CERTAINE fille, un peu trop fiere, Jeune, bien fait, et beau, d'agréable maniere, Qu'il eût du bien, de la naissance, De l'esprit, enfin tout. Mais qui peut tout avoir La belle les trouva trop chétifs de moitié : L'un n'avoit en l'esprit nulle délicatesse, C'étoit tout, car les précieuses Après les bons partis, les médiocres gens Elle de se moquer. Ah! vraiment je suis bonne La belle se sut gré de tous ces sentiments. Un an se passe et deux avec inquiétude : Le chagrin vient ensuite; elle sent chaque jour Déloger quelques Ris, quelques Jeux, puis l'Amour; Puis ses traits choquer et déplaire : Puis cent sortes de fards. Ses soins ne purent faire Se peuvent réparer : que n'est cet avantage Sa préciosité changea lors de langage. V I. Les Souhaits. Il est au Mogol des follets Qui font office de valets, Tiennent la maison propre, ont soin de l'équipage, Et quelquefois du jardinage. Si vous touchez à leur ouvrage, Vous gâtez tout. Un d'eux près du Gange autrefois Et le jardin sur tout. Dieu sait si les zéphyrs, Pour plus de marques de son zele, Chez ces gens pour toujours il se fût arrêté, Nonobstant la légèreté A ses pareils si naturelle : Firent tant que le chef de cette république, Ordre lui vient d'aller au fond de la Norvege En tout temps couverte de neige : Je ne sais pas pour quelles fautes; Mais enfin il le faut : je ne puis arrêter Qu'un temps fort court, un mois, peut-être une se maine. Employez-la : formez trois souhaits; car je puis Trois, sans plus. Souhaiter, ce n'est pas une peine Ceux-ci, pour premier væn, demandent l'abondance. Et l'Abondance à pleines mains Verse en leurs coffres la finance, En leurs greniers le blé, dans leurs caves les vins : Tout en creve. Comment ranger cette chevance? Quels registres, quels soins, quel temps il leur fallut! Tous deux sont empêchés si jamais on le fut. Les voleurs contre eux comploterent, Otez-nous de ces biens l'affluence importune, O Médiocrité, reviens vîte! A ces mots La Médiocrité revient. On lui fait place : Au bout de deux souhaits, étant aussi chanceux Qui souhaitent toujours, et perdent en chimeres Pour profiter de sa largesse, Quand il voulut partir et qu'il fut sur le point, VII. La Cour du Lion. Sa majesté lionne un jour voulut connoître Ses vassaux de toute nature, Avec son sceau. L'écrit portoit Par ce trait de magnificence Le prince à ses sujets étaloit sa puissance. Quel louvre! un vrai charnier, dont l'odeur se porta |