On pourrait multiplier les exemples de cette sorte de répétition et en déduire cette généralité, qui n'est qu'une conséquence du grand principe énoncé pag. 1144. Un des beaux effets de l'art d'écrire est de multiplier les répétitions dans le méme degré. 1 Mais OEdipe héritier du sceptre de Corinthe, | Guidé par la fortune en ces lieux pleins d'effror, Jeune et dans l'âge heureux qui méconnaît la Vint, vit ce monstre affreux, l'entendit et fut crainte, roi. b Nous construirons idéologiquement ce passage et le suivant autant que nous en avons besoin pour déduire une nouvelle conséquence. OEdipe, nom primordial ou sujet, a huit compléments, tous str la même ligne. Les compléments ainsi placés ne fatiguent jamais, quel qu'en soit le nombre. « Il nous fait voir tous les hommes renfermés en un seul homme, et sa » femme même tirée de lui; la concorde des mariages, etc., etc. a Il nous fait voir tous les hommes renfermés en un seul homme, et la concorde des mariages et la société du genre humain établie sur ce fondement; la perfection et la puissance de l'homme, tant qu'il porte l'image de dieu en son entier; son empire sur les animaux ; son innocence tout ensemble et sa félicité dans le paradis, dont la mémoire s'est conservée dans l'âge d'or des poètes; le précepte divin donné à nos premiers parents; la chute d'Adam et d'Eve, funeste à leur postérité; b Que de rameaux partis du même tronc ! Quelle abondance d'effets produits par la même cause, ou, pour parler le langage des grammai riens, que de régimes à la suite du seul et même verbe voir! Les auteurs sont pleins de semblables exemples, où cet art de grouper ainsi les compléments sur la même ligne est porté plus ou moins loin. D'où cette nouvelle conséquence. L'art d'accumuler les compléments dans le méme degré est un de ceux qui constituent l'habile écrivain (407). Mais cet art est difficile, car il faut que, quelque nombreux que soient les compléments, chacun d'eux convienne au mot causatif, et fasse avec lui une alliance légitime. Les phrases suivantes sont donc incorrectes. par la mémoire qu'il avait portée par l'amitié à son père. On lit avec plaisir un livre où le bon sens, l'érudition.... brillent de toutes parts. c Il le conjure par la mémoire et par Ille conjure et l'amitié qu'il avait portée à son père. d On dit bien qu'il ne vient point de vivres dans un camp, on fait incivilité à une personne, l'érudition peut briller dans un livre, on porte de l'amitié à quelqu'un. Mais on ne dit pas que la communication vient dans un camp, on ne fait pas rudesse à quelqu'un, le propre du bon sens n'est pas de briller, on ne porte pas la mémoire de quelqu'un. Ainsi pour ne pas faire de liaisons ou alliances de mots illegitimes, il faut donc bien s'assurer, lorsqu'on multiplie à la suite d'un mot les compléments, si tous lui conviennent également bien. (407) Cette conséquence n'est guère autre chose qu'une autre rédaction du principe énoncé page 1114. Le seul moyen de s'en assurer, c'est de compter, de confronter un à un chacun des compléments avec le mot complété. Il prit, quitta, reprit la cuirasse et la haire. Deux causes contribuent à faire mal additionner les compléments. On oublie de les comparer tous au mot auquel on les rapporte, ou bien on croit pouvoir faire des alliances de mots que l'usage n'a point consacrées. Car une des plus grandes difficultés de l'art de parler et d'écrire consiste à connaître les alliances qu'autorise l'usage. Par exemple il faut savoir Ce sujet est immense, il est du ressort du dictionnaire. Le plus complet et sans contredit le meilleur est encore celui de l'Académie. Dieu.... préside et règle avec sagesse Dieu préside (NOTA. On dit préside à) et le mouvement des astres. a règle le mouvement des astres. Le maréchal d'Hocquincourt attaqua, et se rendit maître d'Angers. b ...d'Hocquincourt (attaqua (Angers) Il s'est acquis une estime générale Il s'est acquis (c.-à-d. il a acquis à soi). et rendu célèbre. c rendu ( il a rendu soi). Je désire et j'espère que nous serons Je désire (que nous soyons vainqueurs) vainqueurs. d espère que nous serons vainqueurs. Je les ai vu mourir et enterres.... J'ai { eux vus mourir La cause de cette sorte de faute, qui est très - fréquente dans les auteurs de seconde et troisième classe, c'est qu'on ne songe qu'au dernier mot régissant ou complété, et qu'on croit faire le rapport du complément à un des mots qui ont même régime, tandis qu'en effet ils en ont plusieurs. L'art de l'écrivain est de savoir choisir pour mot régisseur un mot qui convienne à tous les mots régis. Revoyez les belles phrases, les sublimes périodes de Chénier, Corneille, Racine, Voltaire, Bossuet, que nous avons citées. a Phr. blámée par Wailly. b Id. c Phr. blámée par Wailly. d Phr. blimée par Wailly, i |