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4, Rue de Madame, et Rue de Rennes, 59,

PARIS.

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13

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JAA NN J44 1888

Imprimé par Desclée, De Brouwer et Cie.

LILLE, 1888.

୭୭ ୭୭ ୭୭ Gy ୭ ୭୭ ୭ ୭

AVANT-PROPOS.

Nous sommes au 10 juin 1837.

Furieusement assailli à ses débuts par la coalition du parti légitimiste, des bonapartistes fidèles au duc de Reichstadt et des républicains mécontents de l'issue des Trois Glorieuses, le gouvernement de Juillet semblait enfin inaugurer une période d'apaisement et de prospérité. Par sa force d'initiative, Louis-Philippe échappait aux conséquences de la machiavélique formule le roi règne et ne gouverne pas, dans laquelle M. Thiers avait essayé de paralyser sa volonté et son action. Grâce à la clémence du chef de l'Etat, le régicide Meunier se voyait sauvé de l'échafaud; grâce à son intelligent libéralisme, l'église Saint-Germain-l'Auxerrois était restituée au culte catholique; grâce à l'habileté de ses négociations, l'héritier présomptif de la couronne entrait dans l'alliance d'une des plus anciennes maisons d'Allemagne. A l'extérieur, la France se faisait respecter par ses expéditions à Buenos-Ayres, au Mexique, à Haïti. Le Château, débarrassé, depuis la mémorable journée du 15 avril, des ambitieux et remuants doctrinaires, avait un ministère de son choix, avec le comte Molé pour président du Conseil. La littérature ellemême, boudeuse de sa nature quand elle n'est pas servile, se ralliait de bonne grâce, car le ministre de l'instruction publique était le très justement sympathique Narcisse de Salvandy, le Mécène au toupet légendaire, l'auteur du roman d'Alonzo.

L'époque était douce à vivre, et certain critique bien connu depuis pour sa manie de citations latines, s'écriait avec ivresse que l'on vivait sous le Consulat de Plancus, Consule Planco!

Par une splendide matinée de juin 1837, une foule immense se pressait dans ce palais de Versailles depuis si longtemps désert. Etait-ce l'ombre du grand roi, étaient-ce les revenants du grand siècle qui animaient et réveillaient cette mélancolique et majestueuse solitude, ces corridors qui avaient entendu Racine et Bos suet, ces appartements où s'étaient rencontrés Turenne et Condé, Madame de Sévigné et la Grande Mademoiselle, ces galeries à perte de vue dont les murs avaient été recouverts de chefs-d'œuvre par le brillant pinceau de Vandermeulen, ces étages et ces salons encadrés d'or et tapissés de marbre ?

Partout l'ombre imposante du Roi-Soleil.

Ici, recomposée avec un soin pieux, la chambre de Louis XIV frappe le regard par les richesses intelligentes que l'art y a réunies: le plafond, qui est du maître de la couleur, de Véronèse, représente la défaite des Titans foudroyés par Jupiter: à ce panneau est suspendu le portrait de la fière Anne d'Autriche par le disciple préféré de Rubens. Le visiteur craint de profaner, en le touchant, ce couvre-pied constellé de dentelles, merveille de peinture brodée à l'aiguille par les jeunes filles de la Maison de Saint-Cyr; aucun indiscret ne se hasarde à s'approcher de la balustrade en or que personne, jadis, au règne de l'étiquette, n'avait le droit de franchir, sinon les princes du sang de Bourbon. Plus loin c'est la Salle des Pendules; plus loin encore c'est l'Eil de Boeuf, qui évoque tous les souvenirs de l'ancienne monarchie.

La masse des visiteurs suit le roi Louis-Philippe qui, accompagné de sa famille, entre, au milieu d'un tonnerre d'applaudissements, dans la Salle des Maréchaux où l'on voit représentées toutes les pages brillantes de notre histoire, depuis la victoire où Clovis se convertit au christianisme, jusqu'à Wagram, en passant

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