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sions à la fois remués! A quoi tout ce déchainement a-t-il abouti? à soulever l'opinion publique contre le clergé et à faire perdre à la religion catholique tout le terrain qu'elle avait gagné par dix années de modération.

Des représailles étaient inévitables; elles ont été vives, quelquefois jusqu'à l'excès. Mais s'aperçoit-on que les tentatives qui ont été faites pour ranimer l'esprit éteint du xvír° siècle aient réussi à entraîner l'opinion à leur suite, ou que meilleure fortune soit destinée aux esprits chimériques qui courent après le fantôme d'une religion nouvelle? On ne refuse point sans doute à ces esprits généreux une honorable sympathie. On admire les grâces et les vives saillies de leur talent; on applaudit à la noble ardeur de leur éloquence, mais on sent bien qu'il n'y a sous cette explosion brillante de nobles sentiments et d'ardentes paroles, aucune doctrine précise, aucun dessein bien déterminé, rien en un mot de substantiel et de durable.

Faut-il s'étonner ou s'affliger d'un tel résultat? assurément non; à moins de méconnaître le trait distinctif qui caractérise et honore le plus notre temps. Le XIXe siècle est ainsi

fait, grâce à Dieu, qu'il est incapable d'aucun fanatisme. Ce seraient deux entreprises également vaines de l'armer contre la philosophie qui a gagné sa foi et sa reconnaissance par des services immortels, ou d'allumer sa haine contre la religion catholique qui a civilisé l'Europe moderne et qui est appelée à maintenir son ouvrage et à civiliser l'univers entier. Il faut donc que les esprits ardents et enthousiastes en prennent leur parti. Certes l'enthousiasme est aujourd'hui comme toujours une sainte et divine chose; mais il ne peut se faire accepter de notre temps que réglé par une raison sévère et tempéré par la tolérance.

Mai 1845

DE

LA PHILOSOPHIE

DU CLERGÉ

DE LA PHILOSOPHIE

DU CLERGÉ.

Mai 1844.

Nous assistons, depuis quelques années, à un spectacle bien fait pour porter le trouble et le découragement dans une âme encore peu éprouvée. Suspendue pour un temps par la grande commotion politique de 1830, la guerre s'est rallumée entre le clergé et les philosophes avec une nouvelle ardeur, et, au moment où nous écrivons, elle est parvenue au dernier degré de violence et d'acharnement. La paix serait-elle donc impossible entre la philosophie et la religion, et faut-il absolument que l'une des deux périsse, pour faire place à l'empire exclusif de l'autre? Qui ne serait attristé par une telle pensée? Quelle âme élevée et généreuse n'a désiré, n'a espéré pour soi-même et pour ses semblables ce bel accord de la raison et de la foi, de la liberté et de la règle, des clartés de l'intelligence et des mystérieux besoins du cœur? Qui ne s'est complu à rêver pour l'espèce humaine, comme le dernier terme de ses agitations et de ses progrès, cet équilibre admirable qui s'est réalisé à un instant suprême

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