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des caractères, en montrant que cette modification n'est pas essentielle à l'organisme, mais qu'elle a un but final, qui ne doit préjudicier en rien à la détermination du caractère essentiel et de première valeur de l'organe.

Vicq-d'Azir a encore remarqué, d'après Daubenton, l'articulation de la tête avec l'atlas, tantôt verticale, comme dans l'homme, le plus souvent horizontale dans les animaux ; la diminution du cerveau, en rapport avec l'augmentation des filets nerveux de la périphérie; la clavicule; sa présence dans les uns, son absence dans les autres. La langue, l'os hyoïde, les organes de la digestion, ont des rapports constants avec le genre de nourriture autre loi analogue à la loi des milieux, et dont M. de Blainville fixera également la valeur.

Il a encore remarqué la diverse position du cœur suivant les divers animaux; le rapport des organes de la phonation et de l'audition; le nombre et la grosseur des mamelles en rapport avec l'étendue des cornes utérines, parce que les unes et les autres sont relatives au nombre des fœtus à loger et des petits à nourrir.

« A l'aide de ces caractères, ajoute-t-il, nous déterminerons ce qui est propre à l'homme, et ce qu'il partage avec les quadrupedes1.

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Voilà donc les principes de l'anatomie comparée, et de l'anatomie de signification, posés; suivons-le maintenant dans l'application de ces principes, pour voir ce qu'il a apporté à la science dans l'étude des divers organes et de leurs fonctions.

Nous y verrons comment, prenant toujours l'homme pour mesure, il le sépare totalement de tous les ani

'Disc. prélim. de l'Enc, méth.

maux en montrant sa supériorité; thèse qu'il pose nettement dans son premier Discours sur l'anatomie en général, en même temps qu'il développe, sous un autre point de vue, ce qu'il entend par anatomie comparée.

« L'homme, dit-il, occupe, sans doute, le premier rang dans ce bel ensemble (de la nature), puisqu'il connaît sa place, et qu'il en a mesuré tous les rapports; il est sans doute le roi de animaux, puisqu'il les subjugue et qu'il leur commande. Sa description doit être faite la première; elle doit être la plus étendue, soit parce qu'elle nous intéresse de plus près, soit parce que, indépendamment de ce motif, les organes étant toujours composés en raison de leurs effets, c'est-à-dire, de l'industrie de chaque classe d'animaux, c'est encore l'homme qu'il faut, sous cet aspect, étudier avec le plus de soin et le plus longtemps.

Il entre dans mon plan de considérer le corps humain dans tous les âges et dans les diverses circonstances où il peut se trouver, d'en examiner toutes les parties, et d'écrire l'histoire de leurs phénomènes, objet trop négligé par les physiologistes...

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Mais, dans ce travail, il ne faut pas considérer l'homme seul; on doit le rapprocher des autres animaux : ainsi rassemblés, ils forment un tableau imposant par son étendue, et piquant par sa variété. L'homme isolé ne paraît pas aussi grand; on ne voit pas aussi bien ce qu'il est : les animaux, sans l'homme, semblent éloignés de leur type, et on ne sait à quel centre les rapporter.» Les différents corps organisés et vivants devaient donc être réunis dans cet ouvrage, comme ils le sont dans la nature.

Combien de fois, dans le cours de mes recherches, j'ai joui d'avance du plaisir de voir rangés sur une

même ligne tous ces cerveaux qui, dans la suite du règne animal, semblent décroître comme l'industrie; tous ces cœurs dont la structure devient d'autant plus simple qu'il y a moins d'organes à vivifier et à mouvoir; tous ces viscères où se filtre de tant de manières, le fluide élastique que nous respirons; tous ces foyers où s'élaborent tant de substances différentes, destinées à se convertir en chyle, et d'où se séparent les molécules grossières des os; l'esprit éthéré, dont les nerfs paraissent être les conducteurs; le ferment de la digestion, qui maintient la vie au dedans de l'individu, et cette liqueur, plus surprenante encore, quoiqu'elle ne coûte pas plus à la nature, qui propage l'existence au dehors, et qui contient mille fois en elle l'image ou plutôt l'abrégé de toutes ces merveilles ! >>

Dans le même discours, après avoir donné de nombreux et intéressants détails d'anatomie comparée, sur les muscles, les os, etc., il conclut : « Mais ne retrouve-t-on ici évidemment la marche de la nature, qui semble procéder toujours d'après un même modèle primitif et général, et dont on rencontre partout des

traces ? >>

pas

Il prépare donc des éléments à la démonstration de la série dont il a senti le plan. Entrons dans les détails.

1o Organes des sens. 1° Toucher. « On sent combien l'homme a d'avantage pour la délicatesse et l'étendue du toucher ses doigts sont un instrument d'adresse et de sensibilité; il n'y a pas, dans toute l'étendue de son corps, un point où cette fonction ne s'exerce, tandis que presque toutes les parties externes des animaux sont encroûtées et endurcies 1.»

1 De la Sensibilité Mor., t. V, p. 35.

T. III.

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2o Le goût. Il n'a fait aucun travail spécial sur ce sens; mais il l'a étudié dans les animaux dont il a fait l'anatomie.

3o Il en est de même de l'odorat et de la vue.

4o Mais il a étudié d'une manière spéciale l'organe de l'ouïe des oiseaux, comparé avec celui de l'homme, des quadrupèdes, des reptiles et des poissons. Après les détails les plus intéressants sur cet organe dans la série, il tire immédiatement les conséquences suivantes, qui traduisent nettement l'état de la science, et auxquelles on a fort peu ajouté.

1° L'existence des osselets, si elle n'est pas essentielle, est au moins très-utile pour la perception des sons, puisqu'on la trouve, sans aucune exception, dans tous les animaux susceptibles de les entendre: mais il n'est pas nécessaire qu'il y en ait plusieurs, puisqu'un seul suffit aux oiseaux et aux reptiles.

«< 2o Il est également démontré que les conduits demicirculaires sont une partie essentielle à l'organe de l'ouïe, puisqu'ils existent dans tous les animaux, où cet organe a été aperçu et bien décrit.

« 3o Enfin, le limaçon, qui est particulier à l'homme et aux quadrupèdes, n'est pas indispensablement nécessaire aux fonctions de l'oreille interne, puisque les oiseaux, qui en sont dépourvus, entendent très-bien.

<«<lly a apparence (nous prions qu'on veuille bien nous permettre cette conjecture), que le limaçon forme, avec les conduits demi-circulaires, dans chaque oreille, un double instrument composé de deux parties trèsdistinctes, dans lesquelles la perception des sons se fait séparément, mais avec des rapports déterminés, ce qui doit ajouter à l'harmonie, à la sensibilité, et, pour ainsi dire, à l'intelligence de l'organe.

« Ne pourrait-on pas, d'après ces réflexions, considérer le sens de l'ouïe sous un double point de vue: premièrement, par rapport aux parties essentielles à sa structure, qui sont une membrane, au moins un osselet, des conduits demi-circulaires et une pulpe nerveuse; secondement, par rapport à ses parties accessoires, qui sont la conque, le conduit auditif interne, plusieurs osselets, des muscles, la corde du tympan, et surtout le limaçon ? Ainsi les animaux dans lesquels on a démontré cet organe, pourraient être divisés en deux classes les uns réunissent, en effet, toutes les parties qui le constituent; les autres ont seulement celles que nous avons dit lui être essentielles. L'homme et les quadrupèdes doivent être rangés dans le premier ordre: outre que les oiseaux sont à la tête du second, on peut encore ajouter qu'ils ont les parties essentielles à l'organe de l'ouïe, les seules dont ils soient pourvus, beaucoup plus développées que l'homme et tous les autres animaux; de sorte que le sens de l'ouïe, dans les oiseaux, est aussi parfait qu'il est simple; et jusqu'à ce que l'on ait déterminé, avec plus d'exactitude, l'ude la lame spirale du limaçon, qui leur manque, sage nous ne croyons pas que l'on puisse rien dire de plus précis sur la place qu'il convient de leur assigner. »

Ce mémoire, si plein de faits neufs, est un modèle admirable de méthode en anatomie comparée. Il y définit l'organe, et le décrit dans son état complet dans l'homme, puis il le décompose, en en faisant voir les différences dans la série.

Locomotion. Ostéologie. Il a traité en détail du squelette des poissons, des oiseaux et des mammifères, dans des mémoires spéciaux et dans le Système anatomique de l'Encyclopédie méthodique. Il nous serait impos

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