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moraux du père de famille et une atteinte injustifiable au droit de propriété, envisagées par d'autres et défendues comme la sauvegarde de l'égalité politique et la garantie la plus capable d'assurer la concorde et l'harmonie des familles.

Heureuses et salutaires controverses, dans lesquelles le désaccord des esprits, loin de troubler l'union des cœurs, ne fait que resserrer les nœuds d'une douce confraternité!

D'autres questions de droit, mais d'une nature moins militante, si je puis m'exprimer ainsi, ont occupé plus d'une de nos séances.

M. Thibierge, par exemple, vous a soumis une étude sur l'ouvrage de M. Ortolan intitulé Responsabilité pénale, et il a discuté, avec ce savant criminaliste, les degrés d'excusabilité que le juge aussi bien que le défenseur d'un accusé peut trouver dans le sexe ou dans l'âge, dans le rang ou dans l'éducation, dans l'égarement momentané d'une passion en délire ou dans les hallucinations d'une monomanie concentrée, en un mot dans ces innombrables variétés de circonstances extérieures qui, se groupant autour de deux actes matériellement identiques, feront de l'un un acte innocent ou du moins une faute vénielle, de l'autre un attentat monstrueux dont l'auteur est indigne de pitié.

M. Rudelle vous a fait assister aux efforts persévérants par suite desquels M. Dupin, triomphant de longues résistances qui auraient rebuté tout autre, parvint à fixer la jurisprudence du duel, et en permettant ainsi à la justice civile de sévir contre les combattants et contre leurs complices, contribua puissamment à réduire le nombre des victimes d'un préjugé si longtemps à la mode.

M. Rudelle vous a également retracé l'histoire de la

législation qui régit la chasse depuis les temps les plus reculés de l'histoire jusqu'à la dernière loi promulguée sur cette matière de toutes les législations, c'est peutêtre celle où se reflètent le plus fidèlement les mœurs et les idées qui les ont inspirées.

M. Digard vous a entretenus d'un procès récent dont il a suivi les débats, procès peu important par son objet, peu important par les parties, mais curieux par la sentence qui rappelait à quelques égards le célèbre jugement de Salomon.

M. Jeandel vous a présenté quelques considérations morales sur le parricide, et sur les mesures moitié judiciaires, moitié administratives édictées pour le supplice. et pour l'inhumation des coupables frappés par la vindicte publique.

M. Jeandel vous a aussi entretenus de l'Histoire du Barreau, par M. Gaudry, livre plein d'anecdotes et de détails intéressants, mais dont il semble que l'auteur se soit peut-être montré plus jaloux d'exciter une curiosité toute mondaine que d'élever un monument durable en l'honneur du barreau français.

L'archéologie, dont une branche, sous le nom d'histoire du travail, formait pour l'homme qui médite et qui pense la partie la plus intéressante peut-être de notre Exposition universelle, a eu sa part dans vos travaux, part modeste, mais à laquelle je ne serais pas surpris que la création du musée gallo-romain de Saint-Germain apportat bientôt un important contingent.

Vous devez à M. Decosse, instituteur à Sainte-Geneviève-des-Bois, une notice sur les antiquités de cette petite commune de Seine-et-Oise, et spécialement sur une fontaine de date encore indéterminée, mais d'une antiquité très respectable;

A M. l'abbé Barranger, curé de Villeneuve-le-Roi, outre plusieurs mémoires étrangers à nos études et qui n'ont pu vous être lus, une notice sur l'Alise du mont Auxois, en Bourgogne, et sur l'Alaise du mont Poupet, en Franche-Comté; une autre sur le val et sur le rû de Galie, sis à nos portes; une autre sur les haches celtiques recueillies à Villeneuve-le-Roi et à Soisy-sur-Ecole; une autre intitulée : Napoléon Ier, lieutenant à Auxonne, visitant la fontaine celtique de Notre-Dame-de-la-Levée; une autre enfin relative à trois médaillons plus ou moins frustes, en marbre blanc, représentant trois têtes de Césars vues de profil, et trouvés au hameau des Bosserons, non loin du magnifique domaine de Gros-Bois.

Un autre de nos correspondants, M. De Vals, archiviste de Tarn-et-Garonne, vous a adressé une curieuse noticé sur l'habitation troglodytique récemment découverte à Cros, commune de Léojac, à la porte de Montauban, et sur les résultats des fouilles que cette découverte a provoquées.

M. de Sadous, qui a entrepris et qui vient de mener à bonnne fin la traduction de la savante Histoire de la Grèce, par M. Grote, vous a lu cette année encore d'intéressants chapitres de ce beau travail : parmi ces fragments, je signalerai comme ayant principalement attiré votre attention, et par l'intérêt du récit et par l'élévation de la pensée, ceux qui se rapportent aux deux Denys, à Dion, et à leurs relations avec Platon; à Timoléon, le libérateur de Corinthe et de Syracuse et le vainqueur des Carthaginois; enfin, aux derniers jours d'Alexandre et au jugement qu'il sied de porter sur ce conquérant et sur les conquérants en général, dont l'espèce n'inspire à M. Grote qu'une très mince estime et une très médiocre sympathie, sur ces « joueurs de royaumes, » comme les

appelle lord Byron, « à qui les trônes servent d'enjeu, avec la terre pour tapis et pour dés des ossements humains. »

A cette œuvre immense, M. Grote doit joindre une Histoire complète de Platon et d'Aristote, et un vaste tableau de leurs doctrines philosophiques. Notre collègue, sur l'invitation flatteuse de l'historien anglais, continuera d'ètre son interprète; et déjà il vous a lu plusieurs chapitres de ce nouveau travail, notamment la biographie de Platon et l'exposition de ladoctrine psychologique développée dans le premier Alcibiade, où, pour la première fois dans l'histoire de l'esprit humain, l'étude de l'âme et la connaissance de soi-même, recommandée par l'oracle de Delphes, apparaît comme la base de toute philosophie.

Rousseau a prétendu que l'histoire, muette sur les peuples qui grandissent, ne les illustre que quand ils commencent à décroître. Si l'histoire est muette parfois sur les origines et sur les progrès des nations, il n'en est pas ainsi de la légende, et Rome en est la preuve. Mais le difficile est de démêler aujourd'hui dans l'histoire romaine la part respective de la légende et de l'histoire. M. Belot l'a essayé dans l'Histoire des Chevaliers romains, dont il vous a lu d'importants fragments, et dont l'Académie française couronnait récemment le premier volume; notre collègue poursuit courageusement sa tâche, et vous a lu cette année un important fragment du second volume, dans lequel il vous a exposé les causes multiples de cet agrandissement de la ville éternelle dont le poète a dit :

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M. G. Doublet vous a entretenus de deux publications

récentes qui se rattachent étroitement aux faits qui ont précédé la Révolution française, et qui ne sont pas sans rapport avec l'histoire de notre ville je veux parler des Mémoires secrets d'Augeard, secrétaire de Marie-Antoinette, et d'une correspondance anonyme adressée de Versailles à Varsovie en 1777, correspondance dans laquelle la situation de la cour et de la famille royale ne présage que trop sûrement les orages qui devaient éclater dix ans plus tard.

M. Le Roi, qui, dans la séance solennelle de l'an dernier, réfutait les calomnies infâmes inventées par la haine et acceptées par la crédulité sur les relations du serrurier Gamain avec Louis XVI et sur l'Armoire de fer, vous a lu ici même, dans une séance extraordinaire, le Récit complet des Journées des 5 et 6 octobre. L'impression de ces deux études historiques, qui feront partie du huitième volume de vos Mémoires, est terminée, et les souscripteurs pourront dans quelques jours réclamer les exemplaires auxquels ils ont droit.

Enlevé par une mort prématurée au moment même où nous pouvions espérer que le repos et le loisir lui permettraient de prendre une part plus grande à nos travaux, M. Chappe vous avait entrenus des derniers volumes de l'Histoire du dix-neuvième siècle depuis les traités de Vienne, par Gervinus, œuvre considérable dont M. Minssen poursuit avec succès la traduction dans notre langue, œuvre dans laquelle la sympathique impartialité du savant professeur d'Heidelberg s'est complu à rendre un hommage si flatteur au libéralisme si généreux et si désintéressé de la France.

« Heureux les peuples qui n'ont pas d'histoire,» a dit Jean-Jacques; comme si une agglomération d'hommes qui n'aurait pas d'histoire pouvait mériter le nom de

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