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propre national ne dût pas voir sans ombrage et sans ennui l'immense popularité d'un étranger et d'un nouveau venu dans le monde de la Renaissance.

M. Noël vous a entretenus de la pièce espagnole intitulée la Jeunesse du Cid, par Guilhem de Castro, titre qui ressemble assez à une antiphrase, puisque aussi bien le héros est déjà fort mûr. Il vous a montré combien Corneille a fait sagement de délaisser cette suite du véritable Cid, auquel elle ressemble si peu.

Il vous a lu un essai sur la vie et sur les ouvrages de Fléchier, à l'occasion du remarquable travail dédié à la mémoire de l'évêque et de l'orateur sacré par l'un des chanoines de la cathédrale de Nîmes.

Il vous a rappelé aussi la carrière littéraire d'un écrivain trop vite oublié, le fabuliste Naudé, poète simple et gracieux, spirituel sans afféterie, sensible sans tristesse morose, et dont les œuvres reposent agréablement l'esprit des violences boursouflées et du brutal sensualisme affecté par un trop grand nombre de nos contemporains.

Enfin, il vous a entretenus d'un important ouvrage de M. Legrelle, l'un de nos correspondants, dans lequel celui-ci a étudié le poète danois Holber comme imitateur de Molière.

Faites tous vos vers à Paris,

Et n'allez point en Allemagne :

Ainsi parle dans son temple le dieu du goût par la bouche de Voltaire; et ce distique peut me servir à résumer et à traduire ici le jugement porté par M. Edm. Chardon sur l'auteur des Chansons des rues et des bois.

M. Anquetil vous a présenté une étude sur le Lion

amoureux, cette pièce à laquelle ne sied guère le nom de comédie et où l'on peut relever plus d'une infidélité à l'histoire, plus d'une défaillance dans la peinture des caractères et dans la conduite de l'action, plus d'une tirade déclamatoire que n'explique pas toujours assez le ton déclamatoire de l'époque, plus d'un sacrifice de la vraisemblance fait au désir de ménager des convictions inconciliables et irréconciliables, enfin plus d'un péché contre la langue et contre le goût, mais que le public. avec raison n'en a pas moins prise sous son égide comme l'une de ces œuvres trop rares d'où la bassesse et la trivialité sont bannies, une pièce dont l'auteur respecte son art, respecte sa personne, respecte son auditoire. Ce n'est pas M. Ponsard qui consentirait à venir étaler sur la scène les grossiers propos ni les torchons radieux des lavandières.

Vous devez à M. Gueullette deux nouvelles intitulées : 1° le Ruban de la Sainte-Madeleine; 2° une Coquille;

A M. le marquis de Gaillon, un fragment d'un Voyage sentimental à la façon de Sterne.

Le roman même, car je ne dois rien omettre, a été essayé dans des conditions assez originales et assez fantasques par je ne sais combien de collaborateurs travaillant à part sur un cadre donné, et courant au dénoûment par monts et par vaux, sans aucun autre concert. L'œuvre n'est point achevée, et les auteurs vous ont prié d'avance de ne pas attacher à cette fantaisie plus d'importance qu'ils n'y en attachent eux-mêmes.

M. Cougny vous a lu la traduction en vers français: 1o d'un très beau fragment des hymnes orphiques sur l'essence et sur les attributs de la divinité; 2o de deux courtes idylles de Bion; 3° de la dernière élégie de Properce.

M. Lottin vous a lu la traduction en vers de la première élégie de Tibulle, traduction longtemps attendue que nous avons saluée comme un gage des suivantes.

M. Anquetil vous a lu la douzième épitre du premier livre d'Horace et celle de sept satires sur les dix qui composent le premier livre.

M. Noël vous a lu la traduction de deux célèbres passages de Lucain: l'Eloge de Pompée, par Caton, et le Portrait d'Alexandre; d'un fabliau du moyen âge intitulé: Argentine, et de l'un des plus remarquables poèmes de Jasmin l'Aveugle de Castel-Cuillié. Mais, ne se bornant pas à de simples traductions, il vous a lu plusieurs compositions originales: le Pays natal, le Rêve de Marguerite et la réponse à l'Epitre de M. Viennet à Boileau sont des excursions dans le domaine infini de la poésie légère et de la poésie philosophique.

Vous devez à M. Lécuyer une fable intitulée : le Supplice d'une ânesse;

A M. Lafosse, une fable intitulée une Métamorphose;

A M. Loir, des fragments poétiques sur le Portail de la Collégiale de Mantes;

A M. Courteville, deux pièces intitulées : 1° le Berceau vide; 2o la Visite du printemps;

A M. Fr. Barré, deux petits poèmes intitulés : 1° les deux Roses; 2° la Chanson du pauvre homme;

A M. Digard, un proverbe : A bon chat, bon rat, et quelques stances intitulées : Ce qu'il faut pour être heu

reux;

A M. Aug. Michaut, une Chanson de noces;

A M. Chappe, un poème sur Vercingétorix, couronné par l'académie de Mâcon ;

Enfin, à M. Montalant-Bougleux, deux élégies patrio

tiques le Crucifix de Hougoumont et le Soir de Waterloo, et une troisième pièce intitulée : Doit-on se taire? Doiton crier? commentaire rectificatif de la morale d'une fable de M. Lottin:

A quoi sert de crier contre un gouvernement?

La séance a été terminée par la lecture des morceaux suivants :

1° Pibrac et Marguerite de Navarre, par M. Cougny;

2o Les Mânes, élégie, par M. Montalant-Bougleux;
3° Louis XVI et le serrurier Gamain, par M. Le Roi;
4° Un Roi sourd, fable, par M. Lafosse.

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SOCIÉTÉ DES SCIENCES MORALES, DES LETTRES ET DES ARTS

DE SEINE-ET-OISE.

SÉANCE SOLENNELLE

DU VENDREDI 6 DÉCEMBRE 1867

SOUS LA

PRÉSIDENCE D'HONNEUR DE M. PLOIX

Maire de Versailles.

Discours de M. G. DOUBLET, Président titulaire.

La Société des Sciences morales a toujours dû se féliciter de l'empressement avec lequel vous voulez bien répondre à ses invitations; et certes je ne dois pas cette année vous adresser, au nom de cette Compagnie, de moindres remercîments: un public d'élite, des fonctionnaires éminents ont accepté notre hospitalité, et, grâce à eux, cette séance est en réalité solennelle. Aussi j'aurais voulu qu'il me fût permis, ce soir, de m'arrêter à ces compliments de bienvenue; j'aurais voulu quitter la présidence dans une séance plus intime. Mais, puisqu'il faut qu'un discours public la termine, j'espère du moins que vous n'oublierez pas qu'en le prononçant je fais acte d'obéissance; pourrais-je d'ailleurs ne pas retrouver

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