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nôtre Chafleur propofa par ces fignes, à une perfonne qui étoit avec lui, d'aller à l'affut du liévre. L'heure de cette chaffe approchoir, & ils partirent tous deux enfemble. Quand ils furent fur le lieu, M. de Tréfarius plaça la perfonne dans un pofte, & avançant un peu plus loin, en choisit un autre pour foi; peu de temps après s'être placé, il fit un violent effort pour prononcer quelques paroles; ce fut le feize du même mois, vers l'entrée de la nuit. A cet effort il fentit tout-d'un-coup fa langue fe délier & il articula quelques paroles, puis il prit fon fufil, courut à la perfonne dont nous venons de faire mention & lui parla; cette perfonne effrayée de l'entens dre parler, crut d'abord que c'étoit un fpectre, & tout tremblant s'en retourna avec lui, dans la maifon de M. Cafa Major Seigneur de Geftas, où étoit toute la famille, laquelle ne fut pas moins. tranfportée de joye que faifie d'étonnement, d'un changement fi étrange. M. de Tréfarius depuis ce moment a toû❤ jours parlé. Il ne parla pas d'abord auffi facilement qu'il fait aujourd'hui, quelques mots l'embaraffoient & fur tout la prononciation des I, mais infenfible, ment il a acquis l'aifance avec l'ufages.

&

& à préfent que nous fommes en l'an née 1741. peu de mots l'arrêtent. Le même jour que fa langue fe délia, on lui préfenta un Livre, & il fçut lire. *

3. Mutisme provenant d'une trop grande humidité de la Langue.

Une trop grande humidité de la n gue, fans que la paralyfie s'en mêle, peut auffi rendre muét. Quand le mall procéde de cette caufe dans les enfans, il guérit quelquefois de lui-même par le: defféchement que le progrès de l'âge a coûtume de produire. On en a un exemple bien authentique dans la perfonne de Maximilien fils de l'Empereur Frede ric III. Ce jeune Prince demeura jufqu'à l'âge de neuf ans fans pouvoir parler, & au bout de ce terme, qui eft le temps où les humidités de l'enfance: commencent à fe diffiper, fa langue fe: débarraffa fi fort, qu'il parla fans aucu ne peine, & qu'il devint même dans la fuite très-éloquent. Ainfi lorfqu'on voit des enfans demeurer muéts quelques an X3 nées,

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Je dois cette curieufe relation à M: Cafa. major, Docteur, Regent de la Faculté de Médecine de Paris, duquel j'ai l'honneur d'étre confrere. Mercurialis Lib, a. de morb: pueror. cap.8.

nées, il ne faut point pour cela defefpeFer de leur guérifon; & fans attendre que la nature agifle d'elle-même, comme elle le fait en certaines rencontres, il est toûjours à propos d'employer les remédes.

Si l'on voit, par exemple, qu'un en fant foit d'une complexion extrêmement phlegmatique & pituiteufe, on ne fçauLoit agir que très-prudemment de le purger quelquefois avec un peu de pou dre cornachine, & autres remédes propres à évacuer les férofités. On peut auffi lui faire boire de temps en temps. un peu de vin, pourvû qu'il foit bien trempé je dis un peu, car en fait de vin, ce n'eft que dans des occafions très-preflantes qu'on en doit donner aux enfans.

Il arrive quelquefois que le mutifme qui vient de la caufe précédente, eft pé riodique, enforte qu'il prend par accès. On lit dans le Recueil des plus importan zes Obfervations de Médecine, faites en Angleterre, en Allemagne, en Dannemarck & autres Lieux, lesquelles ont été raffemblées par Théophile Benet qu'un jeune homme, après avoir été muét pen dant quelques années recouvra de luimême,

Theophili Boneri Doct. Medici, Medicing Septentrionalis collatitia, &c. Geneva, 1684,

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même l'ufage de la langue, mais de maniere qu'il ne parloit que depuis midi. jufqu'à une heure; après lequel temps il redevenoit comme auparavant.

Il y a des muéts qui ne le font que pendant deux, trois ou quatre jours les uns plus, les autres moins, fe por tant bien d'ailleurs; après quoi ils recouvrent la parole, puis la reperdent pour la recouvrer de nouveau, & la res perdre de même, à intervalles reglés. Ce genre de-mutilme eft rare; celui fur tout de ce jeune homme qui ne pou voit parler que depuis midi jusqu'à une heure, eft des plus finguliers.. Il y a toute apparence cependant, que ce mal ne quittoit ainfi dans le milieu du jour, que parce que c'eft le temps où le Soleil diffipe une grande partie des humidités du corps. Mais pourquoi la force du: Soleil ne produit-elle pas un femblable effet à l'égard des autres muéts lorfque teur maladie vient tout de même d'hu. midités? C'est une queftion à laquelle

Je

* Vifus eft cui leviore ex caufâ, biduum vel Briduum, vel longiùs, loquela adimeretur, moxque repentè & inopinatè redderetur ; & qui fœ Biùs ex intervallis circuitibus modò loqueretur, modò matefceret, integrè fano corpore. Foreft. Ob. fervat: Libro decimo quarto, Obfervatione stiges femá primâ, colum. 2. jug. 1173

je n'entreprendrai point de répondre quoique ce ne fût peut-être pas une cho fe abfolument impoffible; mon deffein n'eft point ici de foutenir thefe. Je remarquerai en général, que tout mutisme qui vient d'une furabondance d'humidi tés demande des remédes defféchans. Un célébre Medecin de la Ville d'Ulm rapporte dans un excellent Traité qu'il a donné de la vertu des remédes tirés des

poisons, *. qu'un de fes amis voyageant. en France, fe trouva attaqué d'une maladie qui lui ôta lufage de la parole: que comme il ne pouvoit s'exprimer, & qu'il faifoit figne qu'on lui donnât dụ tabac, on lui en mit auffi-tôt dans les narines, & qu'en même temps il rendie par le nez une grande quantité d'eau, & parla.

4°. Mutisme procédant de piqueuro..

Il y a des cas où une legere piqueure eft capable d'âter l'ufage de la parole; on s'enfoncera, par m'égarde, dans le poulce de l'une ou de l'autre main, la pointe d'une épingle d'une aiguille ou de quelque autre chofe de piquant.. Il n'en faut pas davantage en certaines

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occa.

Friccius, de virtute venenorum medicâ.

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