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AUX

AMES DÉVOTES

DE LA PAROISSE DE VÉRETZ,

DÉPARTEMENT D'INDRE-ET-LOIRE.

AUX

AMES DÉVOTES

DE LA PAROISSE DE VÉRETZ,

DÉPARTEMENT D'INDRE-ET-LOIRE.

ON recommande à vos prières le nommé Paul-Louis, vigneron de la Chavonnière, bien connu dans cette paroisse. Le pauvre homme est en grande peine, ayant eu le malheur d'irriter contre lui tout ce qui s'appelle en France courtisans, serviteurs, flatteurs, adulateurs, complaisants, flagorneurs et autres gens vivant de bassesses et d'intrigues, lesquels sont au nombre, dit-on, de quatre ou cinq cent mille, tous enrégimentés sous diverses enseignes et déterminés à lui faire un mauvais parti; car ils l'accusent d'avoir dit, en taillant sa vigne:

Qu'eux, gens de cour, sont à nous autres, gens de travail et d'industrie, cause de tous maux;

Qu'ils nous dépouillent, nous dévorent au nom du Roi, qui n'en peut mais (1);

Que les sauterelles, la grêle, les chenilles, le charençon ne nous pillent pas tous les ans, au lieu que lesdits courtisans des hautes classes s'abattent sur nous chaque année, au temps du budget, enlèvent du produit de nos champs le plus clair, le plus net, le meilleur et le plus beau, dont bien fâche audit seigneur Roi, qui n'y peut apporter remède (2);

Que tous ces impôts qu'on lève sur nous en tant de façons, vont dans leur poche et non pas dans celle du Roi (3), étant par eux seuls inventés, accrus, multipliés chaque jour à leur profit comme au dommage du Roi non moins que des sujets (4);

Que lesdits courtisans veulent manger Chambord et le royaume et nous, et le peuple et le Roi devant lequel ils se prosternent, se disant dévoués à sa personne (5);

་་

Que les princes sont bons, charitables, humains, secourables à tous et bien intentionnés (6), mais qu'ils vivent entourés d'une mauvaise valetaille (7) qui les séparé de nous et travaille sans cesse à corrompre eux et

nous;

(1) Voyez la page 153. (2) Voyez page 156.

(3) Même page.

(4) Voyez page 157.

(5) Même page.

(6) Voyez page 169.

(7) Voyez pages 170 et suiv.

Que c'est là un grand mal, et que pour y remédier, il serait bon d'élever les princes au collége, loin desdits courtisans (1), comme on voit à Paris le jeune duc de Chartres, enfant qui promet d'être quelque jour un homme de bien, et dont on espère beaucoup;

Que par ce moyen lesdits princes, instruits à l'égal de leurs sujets, élevés au milieu d'eux, parlant la même langue, s'entendraient avec eux contre lesdits gens de cour, et peut-être parviendraient à délivrer le monde de cette engeance perverse, détestable, maudite;

Qu'ainsi, on ne verrait plus ni Saint-Barthélemy, ni frondes, ni dragonnades, ni révolutions, contre-révolutions (2), qui, après force coups et grand massacre de gens, tournent toutes au profit de la susdite valetaille;

Qu'un tel amendement aux choses de ce monde, bien loin d'être impossible (3), comme quelques-uns le croient, se fait quasi de soi, sans qu'on y prenne garde; que le temps d'a-présent vaut mieux que le passé, que princes et sujets sont meilleurs qu'autrefois (4); qu'il y a parmi nous moins de vice, plus de vertu; ce qui tend à insinuer calomnieusement, contre toute vérité, que même les courtisans, exerçant près des rois l'art de la flagornerie,

(1) Voyez page 160.

(2) Voyez page 159.
(3) Même page.
(4) Voyez page 161.

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