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RECHERCHES

SUR

L'HYPOCISTITE DES ANCIENS,

PAR M. GLEDITSCHT,

De l'Académie royale de Berlin.

LES corps du règne végétal se nourrissent, pour la plupart, non-seulement des sucs qui 's'insinuent dans la racine au sein de la terre, mais encore des particules plus déliées qui pénètrent les pores de la surface entière des feuilles, des tiges et des autres parties moins considérables. Le lieu de la nutrition varie relativement à plusieurs plantes: il y en a dont les racines sont attachées à la terre comme à leur matrice, tandis que le reste demeure en plein air; de sorte que ces plantes tirent leurs alimens et de l'air et de la terre. D'autres, destinées à séjourner perpétuellement dans les eaux, poussent leurs racines dans la terre du fond, s'accroissent, et vers le temps de la fructification s'élèvent

au-dessus de l'eau, pour s'y replonger ensuite. Les plantes de cette espèce tirent leurs sucs nourriciers de la terre, de l'eau et de l'air.

à

Mais il s'en présente d'un ordre bien plus étonnant. Ce sont celles qui, rejetant toute nourriture terrestre, et ne se bornant pas celle que l'air peut leur fournir, s'établissent dans d'autres plantes, aux dépens desquelles elles vivent après que leur propre semence y a été fécondée. Telle est la plante dont il s'agit ici, plante agréable à la vue, et connue des anciens sous les noms d'Hypocistite, d'Hypocistis ou de Cytisus.

Observons qu'on ne doit pas regarder comme parasites toutes les plantes qui, placées par quelque hasard dans des lieux qui ne leur sont pas naturels, s'attachent à l'écorce des arbres et revêtissent en grande partie leurs troncs. Un vent, même très-léger, suffit pour porter les semences d'une infinité de végétaux dans les cavités des arbres. Les animaux charrient encore quantité de ces semences; enfin plusieurs autres causes peuvent les épandre dans des creux garnis de mousse et un peu humides. Les plantes jeunes et tendres qui naissent en pareils endroits prennent pendant quelque temps un

accroissement rapide, mais bientôt après elles périssent ou ne traînent qu'une vie languissante.

Il est encore des plantes qui, sans être de l'espèce des parasites, s'unissent néanmoins comme par une. sorte de greffe avec d'autres plantes, dont elles attirent les sucs qu'elles convertissent en leur propre nourriture.

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• Tous les végétaux parasites qui naissent dans les contrées du nord se distinguent des autres plantes par plusieurs attributs constans et certains. Cette différence consiste, non-seulement dans le caractère externe que montrent les parties de la fructification, mais dans d'autres déterminations hors des parties florales, et dans les parties qui constituent proprement l'herbe. Cependant toutes les espèces qui appartiennent au genre des parasites suivent les lois de la nature: elles naissent de leur propre semence, au premier développement de laquelle toute sorte de corps naturel peut suffire, en lui tenant lieu de terre, du moins pendant quelque temps. - La terre elle-même fait éclore les semences de plusieurs plantes parasites; ces plantes s'accrochent par leurs petits filamens aux racines des plantes voisines, ou bien elles sont obligées de s'enfoncer davantage en terre. Les avances mammillaires des racines de ces plantes para

sites s'insèrent dans les pores de l'écorce des plus grandes plantes et en pénètrent aisément les interstices. Bientôt elles occupent plus exactement encore les couches fibreuses et vasculeuses de l'écorce intérieure, et parviennent enfin à former différens réseaux membraneux qui se présentent sous divers aspects dans diverses plantes à cause de la différence intrinsèque de leur structure.

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Quelques-unes de ces plantes parasites, ne trouvant pas la terre disposée à les faire germer, se développent en plein air, et y étendent leurs racines, qui, suivant le propre de cette espèce, s'insèrent en différentes manières dans l'écorce même du tronc et des branches, se répandent sous cette écorce comme un tissu réticulaire, et causent les plus grands désordres, en dérangeant, par exemple, la conformation des plantes ligneuses; en détruisant peu-à-peu le changement de l'écorce extérieure en écorce intérieure, et le changement annuel de celleci en bois, ce qui doit d'autant moins surprendre que les racines des plantes parasites jettent une plus grande quantité de filamens papilaires, lesquels rampent dans la substance ligneuse. En effet, ces petites racines extrêmement déliées, en formant des réseaux membra

,

neux,

s'écartent, se réunissent, et font chaque jour des entrelacemens nouveaux et plus com→ pliqués. Ainsi les plantes parasites dérobent sans cesse à celles qui les nourrissent les alimens qui viennent s'y rendre en abondance; et troublant l'ordre de la végétation, elles les frappent d'une stérilité presque toujours accompagnée d'une conformation monstrueuse, et bientôt suivie du dépérissement de la partie ainsi vitiée. Il est décidé que ce mal est sans remède ou qu'il faut recourir à l'amputation des branches; moyen qui réussit préférablement à tous les autrès surtout dans la culture des arbres fruitiers.

Du reste, toutes les plantes parasites ne sont ni également ni toujours funestes à celles dont elles tirent leur substance: il faut avouer néanmoins qu'elles sont rarement utiles, ou plutôt qu'elles ne le sont jamais. Quiconque voudra juger par ses propres yeux des dommages qui résultent de la multiplication des plantes parasites, n'a qu'à parcourir les campagnes, les prairies, les forêts, et particulièrement les vergers.

Parmi les plantes parasites d'Europe, j'ai fait choix d'une seule ; c'est l'hypocistite, ainsi appelée parce que, de l'aveu de tous les auteurs,

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