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5579.

PARIS, IMPRIMERIE A. LAHURE

9, Rue de Fleurus, 9

FRANÇAIS ET ÉTRANGERS

JOHN LOCKE

QUELQUES PENSÉES

SUR

L'ÉDUCATION

TRADUCTION NOUVELLE

AVEC PREFACE ET COMMENTAIRES

PAR

GABRIEL COMPAYRÉ

PARIS

LIBRAIRIE HACHETTE ET Cie

79, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 79

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Il n'entre pas dans notre plan de retracer ici, même sommairement, la vie de Locke, ni de raconter les divers incidents d'une existence, dont les études médicales, les affaires politiques, les travaux philosophiques, les voyages et les relations mondaines ont pris la plus grande part. Nous voulon seulement recueillir dans la biographie de l'homme illustre, qu'on appelle en Angleterre « le père de la philosophie anglaise », tout ce qui l'a préparé à écrire avec compétence et autorité les Pensées sur l'éducation, c'est-à-dire le premier ouvrage classique de la pédagogie anglaise.

En effet la première question qui se pose quand on ouvre un livre de pédagogie, c'est de savoir comment l'auteur est devenu pédagogue, et de quels titres il peut se réclamer pour prendre rang parmi les législateurs de l'éducation. Quelques-uns sont passés maîtres dans cet art, uniquement parce qu'ils avaient été élèves: c'est le ressouvenir de ses propres études, de l'éducation qu'il avait reçue dans la maison paternelle et plus tard au collège de

Guyenne, qui a surtout inspiré à Montaigne son bel essai sur l'Institution des enfants. D'autres, tels que Rabelais, Rousseau et Kant, ont été conduits aux études pédagogiques par le cours général de leurs pensées et de leurs méditations abstraites. D'autres et en plus grand nombre doivent leur compétence à une longue pratique de l'enseignement : leurs théories ne sont que le résumé de leur expérience. Certains sont devenus éducateurs pour avoir beaucoup aimė l'humanité, ou encore pour avoir tendrement chéri leurs enfants : c'est parce qu'il a passionnément rêvé, dès sa jeunesse, de la régénération morale du peuple, c'est aussi parce qu'il a suivi avec une tendre sollicitude les premiers pas dans la vie de son fils Jaqueli1, que Pestalozzi a été un grand instituteur.

De toutes ces influences diverses qui peuvent entrer dans la vocation des pédagogues, cherchons celles qui ont agi sur l'esprit de Locke, et qui font que le livre des Pensées sur l'éducation doit être considéré, non comme une œuvre de circonstance, une improvisation accidentelle dans la vie d'un littérateur, mais comme le produit d'une raison réfléchie, comme la conclusion logique et naturelle de toute une série d'expériences personnelles.

Locke n'est pas, comme tant d'autres grands hommes, « le fils de sa mère » : c'est à peine s'il a connu la sienne. Quant à son père, qui l'éleva jusqu'à sa quatorzième année (de 1632 à 1646), c'était un homme de loi dont les luttes civiles firent un homme de guerre. Le capitaine Locke, enrôlé dans l'armée du Parlement, soumit son fils à une discipline un peu rude, le tenant à distance, et le formant surtout aux habitudes de l'obéissance et du respect. Peu à peu cependant, et à mesure que l'enfant grandissait, le père se radoucit avec lui, le traita avec familiarité et comme un véritable ami. Locke s'est évidemment inspirė

1. Voyez le Journal d'un père, cité dans l'Histoire de Pestalozzi, de Roger de Guimps.

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