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mentation dans les humeurs, les raréfient, & enflamment la bile dans les tempéramens où elle domine.

L'ufage de la glace a fans doute été encore introduit par la fenfualité. On ne fe contente pas d'en frapper les liqueurs, on veut prendre des glaces apprêtées pour la volupté. Mais leurs parties roides & groffieres choquent rudement les fibres des folides, troublent la digestion, excitent des vents par les crudités qu'elles caufent, offenfent la poitrine, fuppriment la tranfpiration, provoquent la toux, congelent les liqueurs, émouffent ou accablent les efprits, causent souvent des pleuréfies & des fluxions de poitrine. Hippocrate (a) dit qu'il eft dangereux d'échauffer ou de - refroidir tout d'un coup le corps, de quelque maniere que ce foit & que tout ce qui fe paffe d'une (4) Lib, 2. Aphor. 5.1.

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extrémité à l'autre est ennemi de a la nature. »

J'ai cru que ces détails feroient d'autant moins inutiles qu'ils expofent certains faux préjugés des gens du monde, & qu'ils regardent des chofes fort intéreffantes, la vigueur, la santé, la vie même. Qu'on pardonne cette digreffion au defir que j'ai d'être utile. Je reviens aux exercices du corps.

Toutes les nations illuftres ont pris autant de foin de former le corps que l'efprit. Les exercices propres à donner de l'adreffe & de la vigueur aux gens de guerre furent d'abord établis en Egypte; il y avoit des courses à pié, à cheval, & de chariots. Il y avoit auffi en Grece de tems en tems des jeux publics. On diftribuoit aux vainqueurs des prix qui n'avoient d'autre valeur que l'honneur de la victoire. Une couronne de Laurier,

d'Ache ou d'Olivier femble en effet être peu de chofe : mais les plus grands Hommes faifoient tous leurs efforts pour la mériter; c'étoit pour eux une gloire approchant defcelle des conquérans : à Olympie on érigeoit des Statues aux Athletes couronnés : les Romains avoient auffi plufieurs efpeces d'exercices, comme la lutte & les jeux du Cirque.

Les Tournois, les Joûtes, & les Carroufels faifoient autrefois en France l'amufement des plus grands Seigneurs, puifque l'histoire nous apprend qu'un de nos Rois Henri II. y périt par un funefte accident. Ces nobles exercices convenables à des Nations belliqueufes n'étoient pas feulement utiles au corps: mais ils accoutumoient l'efprit au defir de vaincre, & entretenoient l'inclination guerriere. En occupant la Nobleffe, ils éloignoient la corrup

tion du cœur toûjours inévitable dans l'oifiveté.

Notre fiecle eft à plaindre de ce que la molleffe & la volupté ont aboli peu à peu les nobles & utiles occupations, qui faifoient une efpece d'apprentiffage militaire. Tous les exercices du corps font bornés à une année d'Académie : le refte de la vie fe paffe, pendant la paix, dans une oifiveté qui amollit le coeur, & énerve le corps.

Je ferois fort d'avis d'apprendre de bonne heure aux enfans, l'exercice de l'Infanterie, pour les rendre agiles, leur bien difpofer le corps, les fortifier, & les affurer fur leurs jambes.

Il y a un air noble, aifé, agréable, en un mot, une certaine politesse extérieure qui femble être le premier caractere, où l'on connoît les gens de condition. Les enfans ont befoin pour l'acquérir, ou que

l'on corrige le naturel, ou qu'on le perfectionne : c'est par l'exercice de la danfe qu'on le peut faire. Le choix des maîtres eft difficile, il s'en trouve affez qui enseignent à figurer toutes fortes de danfe: mais je crois que le plus utile eft de donner de la grace dans le gefte, dans la démarche & dans la contenance. Rien n'eft plus oppofé à cela que l'affectation de la plupart des maîtres donnent à leurs écoliers: elle eft toûjours choquante. « Pour moi, << dit Locke, je crois qu'il vaut beaua coup mieux lever le chapeau, & faire la révérence.comme un hon• nête Gentilhomme de campagne, que comme un Maître à danfer qui eft trop concerté dans fes ma

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Je voudrois qu'un Maître expliquât à fon écolier la caufe de tout; qu'il lui fit fentir que ce qu'on lui demande eft naturel, conforme à

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