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âge, il l'eft encore plus dans la jeuneffe, il fortifie le corps, le rend vigoureux, lui donne de l'agilité, de l'adreffe, & de la grace à tout ce qu'il fait. Il contribue au bonheur de la vie en donnant une fanté robufte, & au bien de l'état en rendant les corps propres à foutenir les fatigues inféparables de la profession des armes.

Mais dans ce fiecle tout concourt à rendre les corps foibles & délicats. La plupart des meres, fi dangereufes dans l'éducation, accoûtument les enfans à toute forte de délicateffe & de fenfualité. Elles veulent qu'ils repofent avec molleffe dans des lits, où les rayons du jour même ne puiffent pénétrer, & que dans toutes les faifons ils refpirent un air chaud dans leurs appartemens. Quel abus ! Ce ne font point les lits qui donnent le fommeil, c'est la nature. On peut dor

mir en tous lieux ; l'expérience le fait voir, fur-tout à la guerre. Je crois, que les lits durs contribuent à fortifier le corps, & comme les jeunes gens ne font pas deftinés à être toûjours fous les ailes d'une mere, il leur eft fort utile d'être accoûtumés, dès l'âge le plus tendre, à coucher durement.

Je ne parle ici que pour les enfans depuis l'âge d'environ fix ou fept ans. Il eft vrai que le fommeil rafraîchit toutes les parties du corps, répare les efprits & les forces: l'eftomac fait paifiblement fes fonctions, les fucs nourriciers fe diftribuent avec facilité, les molécules groffieres du fang font attenuées, & la transpiration infenfible, la plus grande des évacuations, fe fait abondament: mais fix ou fept heures de fommeil fuffifent : l'excès en eft très-nuifible; il épaiffit & embarraffe les humeurs, appefantit le

corps, fur-tout le cerveau, & même l'efprit.

Comme dans les premieres années de la vie, on ne peut guere s'empêcher de laisser dormir les enfans autant qu'ils veulent, il faudra en faire perdre l'habitude par degrés, c'est la loi que fuit la nature: en toutes chofes elle agit infenfiblement, & jamais tout à coup: il faut l'imiter, quand on voudroit abandonner une mauvaise habitude, pour en prendre une bonne : il eft dangereux d'en ufer autrement.

Il à propos de mettre un intervalle d'environ une heure & demie, entre le dîner & le travail d'efprit, & entre le fouper & le coucher : quelque léger exercice du corps, la promenade, la récréation, raniment les efprits & facilitent la digeftion, un exercice violent la trouble, & précipite trop tôt les alimens. C'est à tort que quelques perfon

nes s'imaginent qu'il faut que les enfans foient couchés la tête basse; je ferois d'avis au contraire qu'ils euffent la tête un peu haute: le mouvement de leur fang eft vif, il eft porté à la tête par les arteres carotides & par les arteres cervicales, qui n'ont pas une grande courbure; fi elles font dans une fituation oblique, le fang monte avec moins de force & par conféquent peut beaucoup moins embarrasser le cerveau, & caufer d'accidens. On fera bien de les accoûtumer à fe coucher fur le côté droit, le fommeil doit en être plus tranquile, parce que, fuivant la conftruction, les alimens paffent plus facilement de l'eftomac dans les inteftins.

A l'égard du froid, il ne caufe point d'accidens, s'il n'est extrème: mais il en produit une infinité, lorsque d'un air chaud on passe à un air froid, & il eft prefque auffi

nuifible, dit Sanctorius, (a) de paffer tout d'un coup de l'air froid au chaud. Or comme les jeunes gens ne peuvent pas être toûjours renfermés dans une étuve, il vaut mieux les endurcir au froid, « il « diminue à la vérité la transpiraa tion, dit le même (b) Auteur a mais il refferre & fortifie les fia bres, en forte que le poids des

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<< humeurs retenues n'incommode point, & que le corps en eft moins pefant.

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Mais le plus dangereux abus est à l'égard de la nourriture des jeunes gens, on les rend fenfuels, délicats, gourmands, & on accable le tempérament avant qu'il foit formé. On irrite l'appétit par l'affaifonnement & la variété des mets: les épiceries, les viandes falées heurtent violemment les fibres délicates

(a) Med. Stat. Sect. 2. Aphor. 18. (b) Sect. 2. Aphor. 7.

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