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gage réduits à leurs principes par M. Gamaches, le Recueil (a) de Differtations fur plufieurs pieces de Corneille, & de Racine, avec des Réflexions pour & contre la critique des ouvrages d'efprit, & des jugemens fur ces differtations, les Effais de Littérature de M. L. Trublet. Il y a beaucoup d'autres ouvrages en ce genre qu'on peut lire utilement.

Mais en étudiant les préceptes, il faut lire les ouvrages de nos plus célebres Orateurs François. Voilà ce qui eft le plus utile: c'eft à quoi les jeunes gens doivent s'appliquer davantage. Le maître les fera lire, d'abord en fa présence, & leur fera remarquer l'ufage des préceptes qu'ils auront étudiés ; ce qu'il y a d'élevé dans les fentimens, de beau

(a) 2. Vol. in-12, chez Bordelet & chez Gilley, rue S. Jacques. Paris 1740, donné par M. l'Ab. Granet.

dans les penfées, & dans l'expreffion, les moeurs & les paffions, l'artifice, l'oeconomie du difcours, les bienféances, l'invention, le deffein de l'ouvrage, l'ordre & la jufteffe, la différence du ftyle, pourquoi il eft tantôt fuccint & ferré, & tantôt étendu & abondant ; tantôt doux & tendre, tantôt mâle & véhément; pourquoi l'Orateur diftile quelquefois le miel & répand les fleurs, & quelquefois paroît armé de foudres. Comme il n'eft guere de pieces d'éloquence qui n'aient quelques défauts, on aura foin auffi de les faire remarquer aux jeunes gens. Je ferois d'avis de leur don→ ner d'abord le Recueil de Harangues fur toute forte de fujets, avec l'art de les composer, par Vaumoriere: s'il n'y a rien de nouveau dans les préceptes qu'il donne, le Recueil eft curieux, & utile à toute forte de perfonnes. Il contient, en

tre autres chofes, des Harangues, & des Complimens faits au Roi ou à la Famille Royale, ou dans l'Académie Françoise, ou prononcés dans le Confeil & dans le Barreau. On y trouve plufieurs pieces d'éloquence qu'on ne voit pas ailleurs.

Nous avons en notre langue un grand nombre d'ouvrages, parmi lefquels on choifira quelques pieces comme dans les Oraifons funebres de Meffieurs Boffuet, Mafcaron & Fléchier; dans les Panégyriques & Sermons des Peres la Rue, Bourdaloue, Cheminais & de M. de Maffillon; dans le Recueil des Harangues prononcées par Meffieurs de l'Académie Françoife, dans celui des pieces d'éloquence & de Poëfie qui leur ont été préfentées, dans les Plaidoyers de le Maître, de Patru, & de Gillet, ainsi que dans les Eloges des Académi

ciens; dans les ouvrages de Sarazin, de Saint-Evremont, de la Bruyere, de Peliffon, du Duc de la Rochefoucault, de M. de Fenelon, de l'Abbé de Vertot, &c. Je ne parle point des Auteurs vivans, nous en avons de bons en différens génres: mais je n'ofe en citer dans la crainte de bleffer la modeftie des uns, ou d'offenfer les autres. Je ne prétends point qu'on faffe lire, d'abord en entier, tous ces ouvrages aux jeunes gens: on en choisira des morceaux. Après que le maître les leur aura fait lire de la maniere que je viens de dire, ils feront l'analyse de quelques-uns par écrit, obfervant la méthode qu'on aura fuivie en les lifant avec eux : on leur fera tranfcrire les plus beaux endroits. J'approuverois fort de les leur faire apprendre par coeur pour les décla mer enfuite.

La lecture des Poëtes François

ne fera pas moins utile à ceux qui étudient la Rhétorique. Il ne faut pas regarder la Poëfie comme n'étant propre qu'à nous amuser : elle n'est pas moins utile qu'elle eft agréable. Elle enfeignoit aux Payens toute leur Théologie : elle nous fournit de grands principes de morale & de politique, des inftructions pour la guerre, & des exemples de vertu dans les grands hommes qu'elle célebre. On (a) fait qu'Alexandre préféra les œuvres d'Homere à tous les écrits de l'antiquité. Il portoit toûjours l'Iliade avec lui, & la faifoit mettre fous fon chevet avec fon épée. Il trouvoit dans cet ouvrage cette fage politique qui foutient les Empires, il le confidéroit comme le plus puiffant attrait de la vertu, & comme le modele de fes moeurs. Il l'appelloit fon art militaire, & la meilleure (a) Quint-Curc. Sup. Freinfem.

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