Page images
PDF
EPUB

PERSONNAGE S.

CASSANDRE, fils d'Antipatre, roi de
Macédoine.

ANTIGONE, roi d'une partie de l'Afie.
STATIRA, veuve d'Alexandre.

OLIMPIE, fille d'Alexandre et de Statira.
L'HIEROPHANTE ou grand-prêtre, qui
préfide à la célébration des grands mystères.
SOSTENE, officier de Caffandre.
HERMAS, officier d'Antigone.

Prêtres.

Initiés.

Prêtreffes.

Soldats.

Peuple.

La fcène eft dans le temple d'Ephèse, où l'on célèbre les grands mystères. Le théâtre représente le temple, le périflile et la place qui conduit au temple.

TRAGEDIE.

ACTE PREMIER.

SCENE PREMIER E.

Le fond du théâtre représente un temple dont les trois portes fermies font ornées de larges pilaftres : les deux ailes forment un vafte périftile. SOSTENE eft dans le périftile; la grande porte s'ouvre; CASSANDRE troublé et agité vient à lui: la grande porte fe referme.

CASSANDR E.

SOSTENE, on va finir ces mystères terribles. (a)
Caffandre efpère enfin des dieux moins inflexibles.
Mes jours feront plus purs, et mes fens moins troublés.
Je refpire.

SOSTENE.

Seigneur, près d'Ephèse assemblés,

Les guerriers qui fervaient fous le roi votre père
Ont fait entre mes mains le ferment ordinaire :
Déjà la Macédoine a reconnu vos lois.
De fes deux protecteurs Ephèse a fait le choix.
Cet honneur, qu'avec vous Antigone partage,
Eft de vos grands deftins un augufte présage.

Ce règne qui commence à l'ombre des autels
Sera béni des dieux, et chéri des mortels.
Ce nom d'initié, qu'on révère et qu'on aime,
Ajoute un nouveau luftre à la grandeur fuprême.
Paraiffez.

CASSANDRE.

Je ne puis: tes yeux feront témoins

De mes premiers devoirs et de mes premiers foins.
Demeure en ces parvis.... Nos auguftes prêtresses
Préfentent Olimpie aux autels des déesses.
Elle expie en fecret, remise entre leurs bras,
Mes malheureux forfaits qu'elle ne connaît pas.
D'aujourd'hui je commence une nouvelle vie.
Puiffes-tu pour jamais, chère et tendre Olimpie,
Ignorer ce grand crime avec peine effacé,

Et quel fang t'a fait naître, et quel fang j'ai verfé!

SOSTENE.

Quoi! Seigneur, une enfant vers l'Euphrate enlevée,
Jadis par votre père à servir réservée,

Sur qui vous étendiez tant de foins généreux,
Pourrait jeter Caffandre en ces troubles affreux!

CASSANDRE.

Refpecte cette efclave à qui tout doit hommage;
Du fort qui l'avilit je répare l'outrage.
Mon père eut fes raifons pour lui cacher le rang
Que devait lui donner la fplendeur de fon fang....
Que dis-je? ô fouvenir! ô temps! ô jour de crimes!
Il la comptait, Softène, au nombre des victimes
Qu'il immolait alors à notre fureté....

Nourri dans le carnage et dans la cruauté,
Seul je pris pitié d'elle, et je fléchis mon père;
Seul je fauvai la fille, ayant frappé la mère.

Elle ignora toujours mon crime et ma fureur.

Olimpie! à jamais conferve ton erreur!

Tu chéris dans Caffandre un bienfaiteur, un maître; Tu me détefteras, fi tu peux te connaître.

SOSTENE.

Je ne pénètre point ces étonnans fecrets,

Et ne viens vous parler que de vos intérêts.
Seigneur, de tous ces rois que nous voyons prétendre
Avec tant de fureur au trône d'Alexandre,
L'inflexible Antigone eft seul votre allié..........

CASSANDRE.

J'ai toujours avec lui respecté l'amitié ;

Je lui ferai fidelle.

SOSTEN E.

.

Il doit auffi vous l'être;

Mais depuis qu'en ces murs nous le voyons paraître, Il femble qu'en fecret un fentiment jaloux

Ait altéré son cœur, et l'éloigne de vous.

CASSANDR E.

(à part.)

Et qu'importe Antigone?... O manes d'Alexandre!
Manes de Statira! grande ombre! augufte cendre!
Reftes d'un demi-dieu, juftement courroucés,
Mes remords et mes feux vous vengent-ils affez?
Olimpie! obtenez de leur ombre apaisée

Cette paix à mon cœur fi long-temps refufée;

Et

que votre vertu, diffipant mon effroi,

Soit ici ma défense, et parle aux dieux pour moi....

Eh quoi! vers ces parvis, à peine ouverts encore, Antigone s'approche, et devance l'aurore!

SCENE 1 I.

CASSANDRE, SOSTENE, ANTIGONE, HERMAS.

ANTIGONE à Hermas, au fond du théâtre.

CE fecret m'importune, il le faut arracher.
Je lirai dans fon cœur ce qu'il croit me cacher.
Va, ne t'écarte pas.

CASSANDRE à Antigone.

Quand le jour luit à peine,

Quel fujet fi preffant près de moi vous amène ?

ANTIGONE.

Nos intérêts. Caffandre, après que dans ces lieux
Vos expiations ont fatisfait les dieux,

Il eft temps de fonger à partager la terre,
D'Ephèse en ces grands jours ils écartent la
Vos mystères fecrets, des peuples respectés,
Sufpendent la difcorde et les calamités ;

guerre.

C'eft un temps de repos pour les fureurs des princes: Mais ce repos eft court; et bientôt nos provinces Retourneront en proie aux flammes, aux combats, Que ces dieux arrêtaient, et qu'ils n'éteignent pas. Antipatre n'eft plus. Vos foins, votre courage -Sans doute achèveront fon important ouvrage. Il n'eût jamais permis que l'ingrat Séleucus, Le Lagide infolent, le traître Antiochus, D'Alexandre au tombeau dévorant les conquêtes, Ofaffent nous braver, et marcher fur nos têtes.

« PreviousContinue »