5 ΙΟ Gras, poli, qui s'était fourvoyé par mégarde. Et le mâtin était de taille A se défendre hardiment. Le loup donc l'aborde humblement, Sur son embonpoint, qu'il admire. «Il ne tiendra qu'à vous, beau sire, D'être aussi gras que moi, lui repartit le chien. Quittez les bois, vous ferez bien: Vos pareils y sont misérables, Cancres, hères, et pauvres diables, 15 Dont la condition est de mourir de faim. Car, quoi! rien d'assuré! point de franche lippée; Suivez-moi, vous aurez un bien meilleur destin.>> 20 25 Presque rien, dit le chien: donner la chasse aux gens Flatter ceux du logis, à son maître complaire, Moyennant quoi votre salaire Sera force reliefs de toutes les façons, Sans parler de mainte caresse.» Le loup déjà se forge une félicité Qui le fait pleurer de tendresse. Chemin faisant, il vit le col du chien pelé. 30 «Qu'est-ce là? lui dit-il. — Rien. - Quoi! rien! -Peu de chose. — Mais encor? — Le collier dont je suis attaché De ce que vous voyez est peut-être la cause. - Attaché! dit le loup: vous ne courez donc pas Où vous voulez? - Pas toujours; mais qu'importe? Il importe si bien, que de tous vos repas Je ne veux en aucune sorte, Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor.» 4. Le rat de ville et le rat des champs I. 9 Autrefois le rat de ville Sur un tapis de Turquie Le régal fut fort honnête: A la porte de la salle Ils entendirent du bruit; Le rat de ville détale; Son camarade le suit. Le bruit cesse, on se retire: 5 IO 15 20 25 5 ΙΟ 15 Et le citadin de dire: — C'est assez, dit le rustique; De tous vos festins de roi; Mais rien ne vient m'interrompre; Adieu donc: fi du plaisir Que la crainte peut corrompre!>> 5. Le loup et l'agneau I. 10 La raison du plus fort est toujours la meilleure: Un agneau se désaltérait Dans le courant d'une onde pure. Un loup survient à jeun, qui cherchait aventure, «Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage?»> «Tu seras châtié de ta témérité. Sire, répond l'agneau, que Votre Majesté Ne se mette pas en colère; Mais plutôt qu'elle considère Que je me vais désaltérant Dans le courant, Plus de vingt pas au-dessous d'elle; Et que par conséquent, en aucune façon, Je ne puis troubler sa boisson. -Tu la troubles, reprit cette bête cruelle, Et je sais que de moi tu médis l'an passé. - Comment l'aurais-je fait si je n'étais pas né? Reprit l'agneau; je tette encor ma mère. - Je n'en ai point. — C'est donc quelqu'un des tiens; Car vous ne m'épargnez guère, Vous, vos bergers, et vos chiens. On me l'a dit: il faut que je me venge.» Le loup l'emporte, et puis le mange, 6. La mort et le bûcheron I. 16 Un pauvre bûcheron, tout couvert de ramée, 1 Les soldats étaient logés chez les particuliers à cette époque, les casernes n'existant pas. 2 Travail gratuit qui était dû par le paysan à son seigneur. 5 ΤΟ 15 20 25 5 ΤΟ 15 20 25 Lui font d'un malheureux la peinture achevée. «C'est, dit-il, afin de m'aider A recharger ce bois; tu ne tarderas1 guère.»> Le trépas vient tout guérir; C'est la devise des hommes. 7. Le renard et la cigogne I. 18 Compère le renard se mit un jour en frais, Le régal fut petit et sans beaucoup d'apprêts: Avait un brouet clair; il vivait chichement. La cigogne au long bec n'en put attraper miette; Pour se venger de cette tromperie, A l'heure dite, il courut au logis Bon appétit surtout; renards n'en manquent point. |