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glise, ainsi que des gravures. Mais ni l'un ni l'autre ne trouvèrent, l'opération une fois terminée, le moyen d'enlever aux images reproduites la propriété de noircir à la lumière. Il en résultait que les copies qu'ils obtenaient ne pouvaient être examinées au grand jour; car, alors, tout y devenait, en très-peu de temps, d'un noir uniforme.

De ces essais imparfaits, l'on arrive, sans intermédiaire aucun, aux travaux de MM. Niepce et Daguerre.

M. Niepce père, propriétaire aux environs de Châlons-sur-Saône, consacrait ses loisirs à des recherches scientifiques. Ses études sur la photographie semblent remonter à 1814; ce ne fut, toutefois, qu'en 1827 qu'il arriva, par un procédé qu'il désigna sous le nom d'Héliographie, à reproduire spontanément, par l'action de la lumière, avec des dégradations de teinte du noir au blanc, les images reçues dans la chambre obscure. En 1829, il s'associa avec M. Daguerre, qui lui-même s'occupait, depuis quelques années, d'expépériences ayant le même but. Cependant, au moment de l'association, il paraît que M. Niepce n'avait de prétention qu'à la copie photographique des gravures; il avait, après une foule d'essais infructueux, renoncé à reproduire les images de la chambre obscure. Les préparations dont il se servait ne noircissaient point assez vite sous l'action de la lumière, puisqu'il lui fallait de dix à douze heures pour obtenir un dessin. Il arrivait donc que pendant un temps aussi long les ombres portées se déplaçaient, se portaient de la gauche à la droite des objets, que ce déplacement, partout où il avait lieu, donnait naissance à des teintes plates et uniformes; et cet inconvénient n'était pas le seul. Ce fut donc à perfectionner l'invention de M. Niepce que s'appliqua d'abord M. Daguerre.

Nous allons extraire du rapport de M. Arago à l'Académie des sciences une indication abrégée du procédé de M. Niepce et des perfectionnements que M. Daguerre y ap

porta.

M. Niepce faisait dissoudre du bitume sec de Judée dans de l'huile de lavande. Il obte. nait ainsi un vernis épais qu'il appliquait par tamponnement sur une lame de métal poli, sur du cuivre plaqué, par exemple.

La plaque, après avoir été soumise à une douce chaleur, restait couverte d'une couche adhérente et blanchâtre; c'était du bitume en poudre. Ainsi recouverte, elle était placée au foyer de la chambre noire. Au bout d'un certain temps, on apercevait sur la poudre de faibles linéaments de l'image.

M. Niepce eut l'ingénieuse pensée que ces traits, peu perceptibles, pourraient être renforcés. En effet, en plongeant sa plaque dans

un mélange d'huile de lavande et de pétrole, il reconnut que les parties de l'enduit qui avaient été exposées à la lumière restaient presque intactes, tandis que les autres se dissolvaient rapidement et laissaient ensuite le métal à nu.

Après avoir lavé la plaque avec de l'eau, il avait donc l'image formée dans la chambre noire, les clairs correspondant aux clairs et les ombres aux ombres. Les clairs étaient formés par la lumière diffuse provenant de la matière blanchâtre et non polie du bitume; les ombres, par les parties polies et dénudées du miroir, à la condition, bien entendu, que ces parties se miraient dans des objets sombres; à la condition qu'on les plaçait dans une position telle, qu'elles ne pussent envoyer spéculairement vers l'œil quelque lumière un peu vive. Les demi-teintes, quand elles existaient, pouvaient résulter de la partie du vernis qu'une pénétration partielle du dissolvant avait rendue moins mate que les régions restées intactes.

Le bitume de Judée, réduit en poudre impalpable, n'a pas une teinte blanche bien prononcée; on serait plus près de la vérité, en disant qu'il est gris. Le contraste entre les clairs et les ombres, dans les dessins de M. Niepce, était donc très-peu marqué. Pour ajouter à l'effet, l'auteur avait songé à noircir, après coup, les parties nues du métal, à les faire attaquer, soit par le sulfure de potasse, soit par l'iode; mais il paraît ne pas avoir songé que cette dernière substance, exposée à la lumière du jour, aurait éprouvé des changements continuels. En tout cas, M. Niepce ne prétendait point se servir d'iode comme substance sensitive; il ne voulait l'appliquer qu'à titre de substance noircissante, et seulement après le renforcement, ou, si l'on aime mieux, après le dégagement de l'image par l'action du dissolvant. Dans une pareille opération, que seraient devenues les demi-teintes ?

La méthode de M. Niepce présentant de nombreux inconvénients qu'il serait trop long d'énumérer, et la réussite n'en étant jamais assurée, M. Daguerre en imagina une autre, qui fut appelée la méthode Niepce perfectionnée. Il substitua d'abord au bitume le résidu de la distillation de l'huile de lavande, beaucoup plus blanc et beaucoup plus sensible. Ce résidu, dissous dans l'alcool ou dans l'éther, était déposé en couche mince el horizontale sur le métal, et y laissait, après l'évaporation du dissolvant, un enduit pulvérulent uniforme qu'on n'obtenait pas par le tamponnement.

Après l'exposition de la plaque, ainsi préparée, au foyer de la chambre noire, M. Daguerre la plaçaft, horizontalement et à distance, au-dessus d'un vase renfermant une huile essentielle, à la température ordinaire. Dans

cette opération, renfermée dans des limites convenables, et qu'un simple coup d'œil permettait d'apprécier, la vapeur provenant de l'huile laissait intactes celles des particules de l'enduit pulvérulent qui avaient reçu l'action d'une vive lumière, et pénétrait partiellement, et plus ou moins, les parties du même enduit qui, dans la chambre noire, correspondaient aux demi-teintes. Quant aux régions restées dans l'ombre, elles étaient entièrement pénétrées.

Par ce procédé le métal ne se montrait nulle part à nu; les clairs étaient formés par une agglomération d'une multitude de particules blanches et très-mates; les demi-teintes, par des particules également condensées, mais dont la blancheur et le mat étaient plus ou moins altérés par la vapeur ; enfin les ombres, par des particules, toujours en même nombre, mais devenues entièrement diaphanes.

On ignore encore quelle est la modification que la lumière apporte au résidu de l'huile de lavande, et à la suite de laquelle cette matière se laisse pénétrer plus ou moins difficilement par la vapeur des huiles essentielles. Peutêtre doit-on la regarder comme un simple desséchement des particules; peut-être ne faut-il y voir qu'un nouvel arrangement moléculaire. Cette double hypothèse expliquerait comment la modification s'affaiblit graduellement et disparaît à la longue, même dans la plus profonde obscurité.

La méthode de M. Daguerre était, comme on le voit, supérieure en tous points à celle de M. Niepce; mais elle présentait encore bien des imperfections : le résidu de l'huile de lavande, quoique plus sensible que le bitume à l'action de la lumière, était encore assez paresseux pour que l'image ne commençât à s'y montrer qu'au bout d'un temps fort long.

En prenant la contre-partie de toutes ces imperfections, on aura une énumération à peu près complète des mérites du procédé tout à fait nouveau que M. Daguerre découvrit, plus tard, à la suite d'un nombre immense d'essais minutieux, pénibles, dispendieux.

Dans ce procédé, auquel la voix publique donna le nom de Daguerréotype, la toile du tableau qui reçoit l'image est une couche jaunâtre dont se recouvre, par sa face argentée, une plaque de cuivre exposée, dans une boîte, à l'évaporation spontanée de quelques parcelles d'iode.

Quand elle sort de la chambre obscure, la plaque ne présente encore aucun trait; la couche jaunâtre d'iodure d'argent qui a reçu l'image paraît d'une nuance parfaitement uniforme dans toute son étendue. Mais dès que cette même plaque est exposée, dans une seconde boîte, à un courant ascendant de vapeur de mercure, on voit se manifester le plus

curieux effet. La vapeur s'attache en abondance aux parties de la surface de la plaque qui ont été frappées par une vive lumière; elle laisse entachées, au contraire, celles qui sont restées dans l'ombre; enfin elle se précipite, en quantité variable, sur les espaces occupés par les demi-teintes, selon que ces demi-teintes se rapprochent plus ou moins des parties éclairées ou des parties obscures. En s'aidant de la faible lumière d'une bougie, l'expérimentateur peut suivre, pas à pas, la formation graduelle de l'image; il peut voir la vapeur mercurielle aller, comme le pinceau le plus délicat, marquer, du ton convenable, chaque portion de la plaque.

Dans cette partie de l'opération, si l'on veut que l'image produise le plus grand effet possible dans la position ordinaire des tableaux (dans la position verticale), il est nécessaire que la plaque se présente sous une inclinaison de 45°, au courant ascendant de vapeur mercurielle. Si la plaque était horizontale au moment de la précipitation du mercure, au moment de la naissance de l'image, ce serait sous l'angle de 45° qu'il faudrait la regarder ensuite, pour trouver le maximum d'effet. On n'a pu trouver encore l'explication de ce fait singulier.

L'image de la chambre noire reproduite, il fallait empêcher que la lumière du jour ne l'altérât; c'est à quoi parvint M. Daguerre, en plongeant la plaque dans une solution d'hyposulfite de soude, et en la lavant avec l'eau distillée.

Quand on chercha à expliquer les phénomènes que présentait la découverte de M. Daguerre, la première idée qui s'offrit à l'esprit, fut que la lumière, dans la chambre obscure, déterminait la vaporisation de l'iode, partout où elle frappait la couche jaune; que dans ces endroits le métal était mis à nu; que dans la seconde opération la vapeur mercurielle agissait librement sur ces parties dénudées, et y produisait un amalgame blanc et mat; que le lavage avec l'hyposulfite avait pour but, chimiquement, l'enlèvement des parties d'iode dont la lumière n'a pas produit le dégagement; artistiquement, la mise à nu des parties miroitantes qui doivent faire les noirs.

Mais, dans cette théorie, comment expliquer ces demi-teintes si merveilleusement dégradées qu'offrent les épreuves du daguerréotype? Un seul fait prouve, d'ailleurs, que les choses ne se passent point aussi sensiblement.

La plaque n'augmente pas sensiblement de poids en se couvrant de la couche d'iode. L'augmentation est, au contraire, très-appréciable sous l'action de la vapeur mercurielle; eh bien ! M. Pelouze s'est assuré qu'après le lavage avec l'hyposulfite, la plaque, malgré la formation d'une certaine quantité d'amalgame à sa sur

face, pesait moins qu'avant l'opération. L'hyposulfite enlève donc de l'argent; l'examen chimique montre qu'il en est réellement ainsi.

Au surplus, on n'a pu, jusqu'à présent, se rendre compte des phénomènes chimiques qui se manifestent pendant toute la durée de l'opération, et bien des années se passeront peut-être encore, des milliers d'images seront reproduites avec le daguerréotype, avant que son mode d'action soit bien analysé.

D'après l'exposé qui précède, nous voyons que le procédé de M. Daguerre comprend cinq opérations principales :

1o Le polissage et le nettoyage de la plaque ;

2o L'application de la couche sensible;

3o L'exposition de la plaque aux rayons lumineux dans la chambre obscure;

4° L'exposition de la plaque impressionnée aux vapeurs mercurielles;

5° L'enlèvement de la couche sensible et le séchage de la plaque.

L'analyse qui précède nous paraît suffisante, 'surtout aujourd'hui que l'usage du daguerréotype est généralement répandu; il faut ajouter toutefois que ces différentes opérations ont été modifiées ou perfectionnées, et qu'il n'est aujourd'hui aucun expérimentateur qui opère exactement d'après l'ancienne méthode, bien qu'elle ait servi de point de départ aux nouveaux moyens opératoires.

L'appareil de M. Daguerre présentait un volume considérable: il se composait d'une foule de boîtes, de fioles, de bassins, d'égouttoirs, de bouillottes, de lampes, qui le rendaient d'un transport et d'un usage difficile. Sa réduction était donc un but important à atteindre; mais il fallait surtout rendre la chambre obscure très-portative, puisque dans les excursions daguerriennes, il suffit de l'emporter, avec la boîte à iode, pour obtenir des épreuves que l'on peut terminer au retour. Ce but fut parfaitement rempli par un opticien d'une habileté reconnue, par M. Ch. Chevalier, qui, tout en modifiant l'objectif, et en le ren. dant plus parfait, sut réduire l'appareil, de manière à pouvoir le porter facilement sous le bras.

Pour le polissage des plaques, le tripoli a été substitué à la pierre ponce.

L'opération de l'iodage se divise maintenant en deux temps: l'iodage proprement dit, puis l'exposition au chlorure d'iode, au bromure d'iode ou au brome. Ces dernières substances ont reçu le nom de substances accélératrices; et, en effet, avec leur aide, on obtient en quelques secondes, et même en fractions de seconde, des épreuves que l'on n'obtenait, avec le procédé Daguerre, qu'au bout d'un certain nombre de minutes, et même quelque. fois d'un quart d'heure ou d'une demi-heure.

MM. de Brébisson, Claudet, Fizeau, Gaudin, ont attaché leurs noms à cet important perfectionnement, qui permet maintenant de pren dre des portraits pour ainsi dire instantanément, et de reproduire, dans une vue, des personnages et des voitures en mouvement.

L'exposition à la vapeur mercurielle n'a guère subi que des modifications de manipulation. Cependant M. Charbonnier a annoncé, il y a quelques mois, qu'il employait avec succès le nitrate de mercure ammoniacal, au lieu de mercure coulant. Si les résultats sont identiques, le procédé de M. Charbonnier l'emporte sans contredit sur les autres.

M. Edm. Becquerel découvrit qu'il y a dans la formation de l'image deux modes d'action des rayons lumineux : l'action formatrice ou primitive, et l'action continuatrice ou consécutive; et il reconnut qu'en exposant un papier photogénique, pendant une seconde, dans la chambre noire, on pouvait terminer l'épreuve en soumettant ce même papier, recouvert d'un verre rouge, à l'action prolongée des rayons lumineux.

M. Gaudin appliqua la découverte de M. Becquerel aux épreuves métalliques, et en obtint d'heureux résultats. Voici son procédé. Lorsqu'on veut obtenir une épreuve sans mercure au moyen des verres colorés, on met la plaque, au sortir de la chambre noire, dans un étui dont l'une des faces est en verre coloré. Si l'on opère sur une plaque uniquement passée à l'iode, c'est le verre jaune que l'on doit employer de préférence, parce qu'il permet de voir facilement les progrès de l'image, à travers son épaisseur; avec des plaques soumises aux substances accélératrices, on est forcé d'employer du verre rouge... Par un temps couvert, les verres colorés produisent encore de l'effet; mais la lumière solaire est préférable, et il ne faut pas moins de dix minutes d'un soleil passable pour produire un résultat. Du reste, quand, au sortir de l'exposition au verre de couleur, l'épreuve, regardée à la clarté d'une bougie, ne paraît qu'indiquée, on la complète, en la soumettant, comme d'usage, à la vapeur de mercure.

Le lavage à l'hyposulfite de soude a pour but d'enlever l'iodure d'argent soluble qui recouvre l'argent poli; car s'il n'était point enlevé, il prendrait, sous l'action de la lumière, un ton qui se rapprocherait des blancs de l'épreuve. M. de Brébisson, qu'il faut compter au nombre des expérimentateurs les plus habiles, ajoute à la solution d'hyposulfite une certaine quantité d'alcool, et enlève ainsi la couche d'iodure avec une grande rapidité, sans être obligé d'employer une grande quantité de liquide.

Au lavage à l'hyposulfite succède un lavage à l'eau distillée, qui enlève la solution saline.

Ce qui manquait aux premières épreuves, c'était la vigueur de ton et surtout la solidité; il fallait encadrer l'épreuve à l'instant si on ne voulait la voir s'altérer par le plus léger frottement, celui d'une aile de mouche. Tous les vernis essayés par M. Daguerre changeaient tellement l'effet général, qu'il renonça bientôt à ce genre de recherches. La dextrine, proposée par l'un de nos plus savants chimistes, par M. Dumas, s'altérait trop vite, et il fallait en renouveler l'application de temps en temps, au risque de gâter l'épreuve. On faisait encore d'autres tentatives infructueuses, lorsque M. Fizeau découvrit que la solution de chlorure d'or double l'effet des dessins photogénés, en même temps qu'elle les rend inaltérables.

C'est après avoir enlevé exactement la couche soluble d'iodure d'argent, qu'il faut soumettre l'épreuve à cette espèce de régénération. La solution employée par M. Fizeau est un mélange d'une solution d'un gramme de chlorure d'or dans un demi-litre d'eau distillée, et de trois grammes d'hyposulfite de soude dans une égale quantité du même liquide. A l'instant où le mélange a lieu, la liqueur devient légèrement jaunâtre; mais elle ne tarde point à devenir parfaitement limpide; elle paraît contenir alors un hyposulfite double de soude et d'or, et du sel marin.

Quand une épreuve a été passée à l'hyposulfite de soude et lavée convenablement, le traitement par le sel d'or est de la plus grande simplicité; il suffit de placer la plaque sur un châssis en fil de fer, de verser dessus une quantité de solution de sel d'or suffisante pour que la plaque soit entièrement couverte, et de chauffer fortement avec une lampe; on voit alors l'épreuve s'éclaircir et prendre une grande vigueur en une minute ou deux. Quand l'effet est produit, il faut faire écouler le liquide, laver la plaque et la faire sécher.

Dans cette opération, dit M. Fizeau, de l'argent s'est dissous, et de l'or s'est précipité sur l'argent et sur le mercure, avec des résultats bien différents. En effet, l'argent, qui par son miroitage forme les noirs du tableau est en quelque sorte bruni par la couche d'or qui le couvre, d'où il résulte un renforcement dans les noirs; le mercure, au contraire, qui à l'état de globules infiniment petits forme les blancs augmente de solidité et d'éclat par son amalgame avec l'or: de là une fixité plus grande et un accroissement dans les lumières de l'image.

La découverte de M. Jacobi, de Saint-Pétersbourg, découverte qui consiste à décomposer des sels métalliques par la voie humide, sous l'influence de petites forces électriques, a donné naissance à un art nouveau, à la Gal

vanoplastie (Voyez ce mot), dont la plus heureuse application a été faite à la reproduction des épreuves daguerriennes.

En examinant une de ces épreuves, en considérant la finesse, la délicatesse du dessin, il paraît impossible de pouvoir la reproduire, et cependant rien n'est plus facile; il suffit d'immerger la plaque photogénée dans une solution concentrée de deutosulfate de cuivre, et de la mettre en contact avec un fil ou une plaque de zinc communiquant avec le pôle négatif d'une couple ou de plusieurs couples voltaïques.

Lorsqu'on juge suffisante l'épaisseur du dépôt, et dans ce cas celui d'une forte carte suffit, on le sépare de la plaque avec les précautions convenables, et l'on obtient une seconde image dont la fidélité de reproduction est telle, que l'on peut croire, au premier aspect, avoir sous les yeux une image photogénée, obtenue sur une plaque de cuivre; peut-être même l'effet est-il plus harmonieux; d'ailleurs l'épreuve est redressée. Si l'opération a été conduite avec soin, la plaque originale n'est point altérée et peut servir à une nouvelle épreuve. Il est impossible d'effacer la contre-épreuve sans user le cuivre; en un mot, c'est le nec-plus-ultrà du moulage.

Les procédés de MM. Ruolz et Elkington, pour dorer par la voie humide au moyen de la décomposition du chlorure d'or par un faible courant électrique, ont été également appliqués aux images photogénées, et l'on a pu, de cette manière, leur donner un ton doré d'une grande beauté. C'est surtout à M. Boquillon, habile expérimentateur, qui s'est occupé d'une manière toute spéciale de la galvanoplastie, que sont dues les deux applications que nous venons de signaler.

Malgré la longueur de cet article, nous n'avons pu qu'indiquer les différents phénomènes qui se passent pendant l'opération, sans la décrire elle-même; mais elle est tellement complexe, elle est accompagnée de précautions tellement minutieuses, qu'il nous aurait fallu, non point quelques colonnes, mais un demi-volume pour la traiter convenablement. Nous avons donc dû nous borner à quelques indications générales, que nous avons puisées aux meilleurs sources; tels sont : l'Historique des procédés du Daguerréotype, par Daguerre (1839); les Nouvelles instructions sur l'usage du Daguerréotype, par Ch. Chevalier (1841); les Derniers perfectionnements apportés au Daguerréotype, par Gaudin et N.-P. Lerebours (1842). De plus, nous avons été dirigés dans la rédaction de cet article par M. Gourjon, conservateur des cabinets de machines à l'École polytechnique, qui se livre, avec une rare habileté, à la pratique du daguerréotype.

On a vainement tenté jusqu'à ce jour de reproduire, photogéniquement, les couleurs des objets on n'a pu obtenir que des résultats partiels, intéressants pour la science, mais de nulle valeur sous le rapport artistique. Si cet important problème est un jour résolu, les épreuves photogénées, et surtout les portraits, doués d'une vie nouvelle, ne laisseront rien à désirer. Dans l'impuissance actuelle de l'art, M. Ch. Chevalier a eu recours à un artifice qui produit quelquefois des effets remarquables.

Avant de fixer le verre qui doit protéger un portrait, par exemple, il faut l'appliquer sur l'épreuve dans la position exacte qu'il doit occuper, et calquer sur la face extérieure, la silhouette du buste entier, et le trait des différentes parties du visage; puis, après avoir enlevé le verre, on applique sur le côté opposé, et avec des couleurs transparentes, des teintes plates, correspondant autant que possible à celles des parties qu'elles doivent représenter. Lorsque la peinture est bien sèche, on fixe la glace et on efface le calque. La teinte et les demi-teintes de l'épreuve, visibles à travers les couleurs transparentes, leur communiquent les nuances qui leur manquent, et l'on obtient un effet à peu près semblable à celui que produisent les lithographies coloriées...

Nous ne ferons que citer les diverses tentatives faites par MM. Herschell, Talbot, Lassaigne, Bayard, etc., pour produire des épreuves sur papier. Quoique les résultats obtenus par ces expérimentateurs ne soient pas sans mérite, ils n'ont point encore atteint le degré de perfection convenable, pour que l'on puisse substituer le papier sensible aux plaques métalliques. On conçoit, du reste, quelle voie nouvelle s'ouvrira au dessin photogénique si l'on parvient à opérer cette substitution.

Quel rôle le daguerréotype est-il appelé à jouer dans les arts? quelle révolution doit-il amener dans la peinture? Son rôle est tracé, et la peinture restera ce qu'elle est. Au daguerréotype appartient de reproduire avec fidélité les formes des objets, de donner des modèles parfaits de perspective et d'entente de lumière; de faciliter l'étude des corps de la nature et de leur organisation; peut-être même pourra-t-il, jusqu'à un certain point, remplacer le portrait à la miniature. Mais la peinture, la véritable peinture inspirée par le génie, n'aura jamais à craindre sa concurrence. L'un et l'autre suivent une ligne parallèle, et ne se rencontreront par conséquent jamais.

A. DUPONCHEL.

DAHLIA. (Botanique.) Le nom de dahlia fut donné, à peu près vers la même époque, par Thunberg et par Cavanilles, en l'honneur du docteur André Dahl, botaniste suédois, à deux genres de plantes tout différents. La ques

tion de propriété ayant été décidée en faveur du premier par Wildenow et de Candolle, le genre dénommé par Cavanilles dut recevoir une autre dénomination; or, ce fut précisément la plante généralement connue sous le nom de Dahlia, qui quitta ce nom pour prendre celui de Georgina.

Le dahlia des botanistes n'est donc pas ce lui des jardiniers, mais bien un petit arbrisseau des environs du cap de Bonne-Espérance, le Dahlia crinita, que Persoon appelle Trichocladus crinitus.

Quoi qu'il en soit, comme le public n'a point adopté le changement établi par les savants, nous pensons que le mieux est de nous conformer aux usages reçus, en conservant, ici, à la Georgina le nom vulgaire de dahlia.

Le Dahlia (Georgina variabilis Kunth) appartient à la grande famille des synanthérées, tribu des corymbifères (Radiées), (dicotylédonées monopétales épicorollées, à anthères réunies); il présente les caractères suivants Involucre double; l'extérieur formé de cinq à huit folioles unisériées, égales, étalées ou réfléchies, et simulant des bractées; l'intérieur composé de huit folioles sur un seul rang, appliquées, ovales-oblongues, obtuses et un peu membraneuses. Réceptacle plane, garni de paillettes égales aux fleurs, obtuses et membraneuses également; fleurons du disque tubuleux, nombreux et hermaphrodites; ceux de la circonférence ligulés. (en bandelette), très-grands, sur un seul rang et neutres. Akènes (fruits) munis d'un bourrelet au sommet, mais dépourvus d'aigrette.

La G. variabilis, originairc du Mexique, et transportée d'abord en Espagne d'où elle se répandit dans toute l'Europe, a la tige herbacée, de deux mètres environ de hauteur, rameuse, tantôt lisse, tantôt couverte d'une poussière glauque; ses feuilles sont opposées, grandes, imparipinnées; ses racines sont vivaces, tubéreuses, oblongues et amincies aux extrémités. Wildenow, et après lui de Candolle, divisèrent l'unique espèce du genre Georgina pour en former deux, sous les noms de G. superflua et G. frustranea; mais d'après les travaux d'autres savants, il paraît plus convenable de ne regarder ces deux plantes que comme des variétés d'une seule et même espèce, comme des races susceptibles de transmettre toutes leurs qualités accidentelles par la génération et par la culture, bien qu'on ait observé quelquefois que les graines de l'une donnent naissance à des individus présentant les caractères de l'autre; observation qui confirme la nécessité de réunir ces deux espèces en une seule.

Les variétés de couleur produites dans les dahlias par la culture, sont trop nombreuses pour pouvoir être énumérées ici; il nous suf

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