Page images
PDF
EPUB

quité, l'éclat de sa vive couleur avait fixé l'attention des hommes, qui s'en taillèrent des ornements. Comme le corail ne croît point sur les bords de l'Inde, ce sont précisément les Indiens qui semblent toujours y attacher le plus de prix. Au temps de Pline, ils le recherchaient déjà comme la première des raretés; aujourd'hui même les brahmines et les princes asiatiques s'en parent de préférence aux perles que produisent leurs mers, tandis que les Européens donneraient leur plus magnifique corail pour les moindres perles. L'immortel Linné, chez lequel la précision terminologique n'excluait pas les idées riantes qui peuvent s'allier à la majesté de la raison, Linné plaça le corail, comme type, dans le genre qu'il décora du nom d'Isis, et l'appela spécifiquement noble, Isis nobilis. D'autres nomenclateurs en avaient fait une gorgone; il faut convenir que cette dénomination, qui rappelle des monstres hideux à chevelure de serpents, ne donne pas une idée bien juste d'une production appelée par un écrivain naturaliste reine de l'Océan, mais qui n'est pas plus une reine qu'une gorgone. Le nom de corallium, imposé définitivement par notre savant Lamarck, venant du grec (xopáλλiov), nous paraît devoir être préféré, parce qu'il est le plus ancien.

Nulle création n'a plus erré de place en place dans les trois règnes de la nature; le vulgaire et plus d'un savant n'y ont vu qu'une pierre précieuse; pour quiconque n'a connu que sa substance taillée, la méprise est pardonnable. Le corail présente, en effet, l'homogénéité, la dureté et l'éclat des agates; il se polit comme les gemmes, et brille comme le grenat avec les teintes du rubis; car ces teintes sont souvent plus vives que celles du sang, auxquelles on a coutume de les comparer. Divers botanistes, et Tournefort surtout, dans leur zèle pour une science au domaine de laquelle ils essayaient de ramener tout ce qui se ramifie, voulurent que le corail fût une plante, et quand Marsigli aperçut sur ses branches les animalcules que ces branches produisent, il crut y apercevoir des fleurs composées de huit pétales ciliés. Enfin Peyssonel, médecin ou chirurgien français qui visita les Antilles, reconnut l'animalité du corail; il vit que les prétendues fleurs étaient de véritables polypes à bras, à peu près semblables à ceux que Trembley observa plus tard errants dans les eaux douces. Ainsi, sous le microscope d'un observateur scrupuleux, une substance qui, par ses propriétés, appartient à la minéralogie, par son tronc et ses branchages à la botanique, rentra dans la zoologie par sa floraison. La découverte de Peyssonel fut d'abord tournée en ridicule, parce qu'elle renversait des idées admises sans

contestation depuis le temps de Pline; mais Linné, dont la sagacité saisissait le vrai lors même qu'il paraissait le moins vraisemblable, Linné n'hésita point à comprendre le corail dans le règne animal, en tête de ses Zoophytes, c'est-à-dire Animaux-plantes, dénomination heureuse, parce qu'elle indique à la fois la double nature des êtres à qui elle était primitivement appliquée.

Cependant l'on n'avait pas tiré de la triple nature du corail les conséquences qui devaient résulter de la découverte de Peyssonel, et plusieurs savants qui occupent un rang éminent affectent encore de regarder comme peu importantes les découvertes modernes qui complètent celle de notre devancier, parce que ce ne sont ni eux ni leurs faiseurs qui les ont trouvées, et qu'elles dérangent leurs systèmes asservis à trois règnes. C'est aux mots PSYCHODIAIRE et RÈGNE que nous examinerons les motifs d'un dédain si peu philosophique.

Le corail se trouve dans presque toute l'étendue de la Méditerranée, à partir des côtes de France, où il est rare, et ne pare que le revers méridional des rochers, depuis trois mètres de profondeur. A Messine, c'est à deux cents mètres qu'on le recueille; il se trouve à l'entrée de l'Adriatique, aux racines des monts Acrocérauniens, plongées dans les dernières profondeurs du canal de Tarente. C'est à trois cents mètres seulement qu'il croft vers les Dardanelles, où les périls de sa pêche ne sont pas égalés par la valeur des produits. La côte d'Afrique est le parage où le corail est le plus beau et le plus répandu; on ne l'y trouve guère près des rives ; il lui faut au moins un fond de trente mètres, et les petites forêts qu'il y forme descendent jusqu'à deux cents. On a remarqué dans ces lieux, où le corail est l'objet d'un commerce important, qu'un pied de cette production végéto-animale a besoin de huit ans pour parvenir à une grandeur déterminée, dans une eau profonde de huit ou dix brasses; de vingt-cinq à trente ans, à la profondeur de vingt-cinq brasses, qui répondent à trente mètres, et de quarante ans au moins, à cinquante mètres ou au-des

sous.

Le corail des bords méridionaux de l'Europe est d'une couleur plus vive; celui des côtes septentrionales d'Afrique est plus considérable dans ses dimensions. Ce n'est point à cause des propriétés médicinales fabuleuses de cette substance qu'on la recherche aujourd'hui, mais pour la parure. La mode donne ou ôte la vogue au corail; mais son emploi reprend toujours faveur, parce que sa matière est réellement fort belle. Il est, en outre, l'un des objets de luxe que le commerce européen trouve le plus d'avantages à porter dans les

Indes. Les peuples noirs ou basanés le préfèrent à toute autre pierrerie; ils surchargent de brillants ou de perles leurs fastueux vêtements, des sceptres et des couronnes; le corail est réservé pour parer les bracelets et les colliers, parce que sa couleur plus mate, qui brille néanmoins sur la peau, n'y forme pas un repoussoir trop contrasté. Tel est le cas que certains peuples africains font du corail travaillé, que l'auteur de cet article se rappelle avoir vu un prince de Madagascar qui, prêt à livrer à un marchand d'esclaves de l'Ile-de-France une délicieuse négresse pour deux cents piastres, préféra en céder la propriété à un jeune officier français pour un collier de corail qui n'avait guère coûté à l'acquéreur que cent écus, dans une boutique du Palais-Royal, lorsque les ornements de ce genre y passaient pour chers.

Ce qu'on appelle vulgairement corail blanc ou corail noir n'est point du corail, mais appartient à d'autres genres de zoophytes.

BORY DE SAINT-VINCENT. CORALLINE. (Histoire naturelle.) Nous n'appellerions point l'attention du lecteur sur ces petites productions de la mer si leur propriété vermifuge, qui les introduisit dans la médecine, ne les avait fait connaître généralement de tout le monde. Nous voudrions, en nous en occupant, dire ce qu'elles sont; mais les naturalistes ne sont pas d'accord à cet égard. Comme dans le corail, les uns y voient des plantes, les autres des petites bêtes; cette dernière idée a le plus de partisans, et les corallines, depuis Linné, sont rangées dans le règne animal, malgré l'opposition de grands botanistes, qui les réclament pour le rameau de la science dont ils s'occupent. Ce. pendant il faut avouer que, malgré l'analogie présentée par les corallines avec les zoophy. tes, on n'a jamais pu y apercevoir la moindre trace de polype; nous y avons vainement cherché des indices d'animalité.

Les corallines, d'une forme et d'une couleur élégante, nuée de vert, de rose et de blanc, croissent en petites touffes composées de rameaux en chapelets, dans les trous des rochers, aux limites de la marée, sur toutes les côtes de l'univers. Quelques-unes des petites espèces européennes, ramassées, lavées légèrement dans l'eau douce, puis desséchées, se répandent dans la pharmacie avec la mousse de Corse, qu'il faut cependant en distinguer. Celle-ci est un fucus. On en donne la décoction, qui, avec du sucre, n'est pas désagréable à boire, aux enfants que tourmentent les vers. et qui refusent le semen-contra ou autres remèdes d'une amertume horrible.

BORY DE SAINT-VINCENT. CORAL-RAG. (Géologie.) Les géologues anglais ont donné ce nom, cause de la grande

quantité de coraux qu'il renferme, à l'étage supérieur du système moyen du grand terrain jurassique, celui qui est compris entre le nimmeridgeclay où notre argile à enogira virgula, et la formation de l'oxfordeclay. Ce groupe se présente avec les mêmes caractères en Angleterre, dans le nord-ouest de la France, au pied de la chaîne des Ardennes, dans les montagnes de la Bourgogne, et dans celles du Jura, où il a pris un développement considérable. On y reconnaît quatre étages, qui sont plus ou moins puissants dans chaque localité :

1° Un calcaire compacte, dont les premiers strates marneux contiennent encore quelques énogires virgules, en alternant avec les derniers du groupe caractérisé par la présence de cette petite coquille. Ce calcaire prend de la solidité à mesure que les couches deviennent plus anciennes ou plus profondes; sa couleur varie du blanc au gris foncé; il a quelquefois une apparence cristalline; mais le plus ordinairement il est compacte, à grains fins, et donne alors des pierres lithographiques. Quand les couches sont horizontales, la stratification est régulière; mais quand elles sont fort inclinées, comme dans le Jura, elle présente beaucoup d'accidents et des contournements bizarres : cet étage contient souvent des chailles, concrétions de calcaire siliceux, qui peuvent servir à le reconnaître; mais il est surtout caractérisé par une quantité de nérinées, coquilles univalves, accompagnées de coquilles bivalves de diverses grosseurs, lesquelles forment souvent une véritable lumachelle dans la partie inférieure.

2o Le calcaire précédent devient peu à peu oolithique, et finit par être une masse complétement oolithique, d'une couleur jaunâtre, et alors assez solide, ou blanche, alors crétacée et peu solide. La stratification de cette masse est souvent irrégulière, et présente des fissures qui se croisent dans tous les sens. On y remarque des veines spathiques et beaucoup de géodes calcaires tapissées de cristaux. Les nérinées sont ici aussi abondantes que dans l'étage précédent; elles se trouvent accompagnées de térébratules, de grands bivalves et d'une quantité de coraux. Les strates inférieurs se chargent de silice et passent à un, calcaire siliceux.

3o Le calcaire siliceux, compacte ou sublamellaire, forme une assise puissante, à laquelle les Anglais ont particulièrement appliqué le nom de coral-rag, à cause de la grande quantité de coraux qui s'y trouvent enfouis. Chez eux, la roche dominanta est un calcaire mal agrégé, marneux et grisâtre; dans le Boulonnais et le midi de la chaîne du Jura, c'est un calcaire siliceux,

intimement lié à l'oolithe : dans le Porentrui, c'est un calcaire à structure très-irrégulière, présentant des parties spathiques compactes et grainues, qui appartiennent à des polypiers fondus dans la masse. Les coquilles qui accompagnent ces polypiers ont ordinairement le test changé en quartz calcédonien.

4o Dans les îles Britanniques, le Boulonnais elle Jura, le coral-rag repose sur une masse de Sables ferrugineux contenant des strates d'un calcaire graveleux jaunâtre, calcareous grit, avec des concrétions de calcaire siliceux et ferrugineux, sphérites et chailles de M. Thurmann. Ces diverses productions forment quelquefois des tests réguliers.

Les espèces minérales sont rares dans la formation que nous décrivons; on y trouve seulement de la chaux carbonatée, en veines et en cristaux, du quartz calcédonien et des oxydes de fer, qui sont souvent assez abondants pour mériter d'être exploités.

Les restes organiques sont extrêmement nombreux; ceux du règne végétal se réduisent à quelques fragments de cycadées.

Les zoophytes appartiennent aux genres Turbinolia, Astræa, Mæandrina, Cyathophyllum, etc.

des

des

Les coquilles sont des Ammonites, Bélemnites, des Nérinées, des Cérites, Trochus, des Ostracées, des Pholadomies, des Modioles, des Trichytes, des Pectens, des Astartes, des Térébratules, des Trigonies, etc., parmi lesquelles on regarde comme caractéristiques les espèces suivantes :

Nerinea bruntunata, elegans et pulchella, Ostrea gregarea, Trichytes spissa, Astarte minima, Trigonia clavellata.

On y rencontre, en outre, un crustacé, Astacus rostratus, ainsi que des ossements de crocodiles et d'ichthyosaures.

La puissance du groupe corallien peut aller jusqu'à 50m; le sol qu'il occupe est généralement sec et peu fertile : il est cependant couvert de belles forêts de sapins et d'épicéas, dans plusieurs contrées de la chaîne du Jura; on en tire des pierres lithographiques, des pierres de taille, du moellon, d'excellents matériaux pour charger les routes, et des pierres à chaux, parmi lesquelles celles qui ont une couleur jaunâtre donnent une chaux hydraulique.

Dans la Bourgogne, aux environs de Beaune, et dans quelques parties du Jura, le premier étage corallien renferme des brèches rougeâtres, susceptibles de prendre un beau poli, et qui sont exploitées comme marbres; elles donnent des marbres panachés que l'on trouve dans toutes les maisons de la Bourgogne.

Les parties marneuses et les oolithes qui se

[blocks in formation]

CORBEAU. (Histoire naturelle.) Corvus. Est-ce parce que les anciens consultaient le corbeau ou du moins son vol dans les plus grandes affaires d'État, ou parce qu'il apprend à parler, ou parce qu'enfin la Fontaine a fait jouer un rôle si plaisant à cet oiseau dans l'un de ses apologues le mieux mis à la portée de l'enfance, que le corbeau jouit d'une certaine célébrité entre les habitants de l'air? C'est ce que nous n'entendrons pas examiner en traitant son histoire naturelle. Considéré dans ses rapports avec l'homme, il nous suffira de dire qu'il est peu d'oiseaux aussi répandus à la surface entière du globe et qui aient fixé plus diversement l'attention. Considérés comme des bienfaiteurs, des hôtes utiles, sans cesse occupés à délivrer la terre des vers et des insectes qui dévastent les champs; regardés comme des envoyés du destin pour présider au salut des malades, on accorde aux corbeaux, en certains cantons, accueil et protection, au point que le chasseur ne les menace jamais. Ailleurs, au contraire, on les regarde comme des dévastateurs; on les accuse de ne point détruire les animaux nuisibles, mais le grain confié à la terre; on les regarde comme des êtres de mau. vais augure, dont la sombre couleur est celle du deuil, et le croassement sinistre, un cri précurseur de quelque trépas. Alors leur tête est mise à prix, leur cadavre est crucifié aux portes des moindres fermes cependant la guerre qu'on leur fait n'en diminue point le nombre; des troupes de corbeaux souvent innombrables n'en couvrent pas moins les campagnes ensemencées aux approches de l'hiver et durant toute la saison morte, sans qu'on puisse prouver que leur présence y cause le moindre dommage; ils s'y promènent d'un pas grave sans que l'approche de l'homme paraisse les effrayer, à moins que celui-ci ne soit armé d'un fusil, ce que les corbeaux discernent de fort loin, et ce qui a fait supposer aux habitants de la campagne qu'ils sentaient ou devinaient la poudre. Ce préjugé est surtout enraciné dans nos provinces méridionales, parce qu'on croit y avoir observé que si, au lieu d'un fusil chargé, qui fait fuir le corbeau d'une grande distance, le campagnard ne porte qu'un simple bâton, le corbeau, que ne trompe point l'apparence, se laisse approcher.

Les corbeaux sont caractérisés par un bec gros, droit, comprimé sur les côtés, tranchant par les bords, courbé vers la pointe, avec les narines chargées de poils aigus et dirigés en avant; du reste, beaucoup d'autres oiseaux

leur ressemblent; car dans cette classe d'animaux, il est bien plus difficile d'établir des coupes génériques que dans la plupart des autres; aussi le genre Corbeau, depuis que les ornithologistes ont multiplié les divisions, s'est-il appauvri de beaucoup d'espèces réparties dans des genres nouveaux ; mais en même temps il s'est enrichi d'espèces nouvelles rapportées par les voyageurs.de toutes les parties du globe.

Ce sont des oiseaux turbulents, querelleurs, bavards, défiants; et, soit prévoyance ou manie, ils cachent tout ce qu'ils saisissent et qui leur est superflu pour le moment; mais leur mémoire étant trop bornée pour qu'ils puissent retrouver leurs cachettes, ce qu'ils y portent demeure, la plupart du temps, perdu pour eux. Ils se plient à la domesticité, et apprennent à prononcer quelques mots. Il est, au reste, peu d'oiseaux dont les facultés intellectuelles soient plus développées. « Si l'on s'en rapporte, dit certain ornithologiste, à M. Dupont de Nemours, académicien fort estimable, bon philanthrope d'ailleurs, qui, dans un mémoire lu en 1806 à l'Institut de France (classe des sciences physiques et mathématiques), assurait avoir passé deux hivers dans la société des corbeaux, ils ont un langage communicatif qu'il finit par comprendre. Cet observateur a même publié les fragments d'un dictionnaire au moyen duquel on peut traduire plusieurs de leurs mots; il est à regretter que M. Dupont de Nemours n'ait pas poussé plus loin ses recherches; il fût peutêtre parvenu à entamer quelque conversation avec les corbeaux, lesquels nous en eussent probablement plus appris sur les hautes régions de l'atmosphère que le voyage en ballon du savant Gay-Lussac. » Quoi qu'il en soit, nous citerons seulement, dans le genre dont il est question, les espèces suivantes, qui sont le plus répandues :

Le CHOUCAS, Corvus monedula Linné, représenté dans les planches enluminées de Buffon (no 523). Sa longueur est de treize pou. ces ou un peu plus; sa couleur d'un noir chatoyant, si ce n'est à la partie supérieure de la tête et du cou, qui est cendrée. Habitant, comme les chouettes, les vieilles tours, les clochers et les créneaux des vieux châteaux, les choucas y vivent en ménage, paire par paire, le mâle et la femelle également fidèles; ils célèbrent la renaissance de leurs amours annuelles par un bavardage insupportable; et lorsque le temps des premiers transports passé amène celui des soins dus à la progéniture, les choucas descendent dans les jardins des villes, afin d'y couper de petits rameaux qui doivent servir à la construction de nids, rassemblés souvent en grand nombre et contigus sur un même édifice, où les familles, rappro

chées sans doute dans un esprit de défense mutuelle, vivent dans la meilleure intelligence. Les œufs, au nombre de cinq, sont verdâtres, parsemés de quelques taches brunes. Les petits demeurent longtemps attachés à leurs parents, qui semblent leur témoigner d'autant plus de tendresse, que, devenus plus grands, ils ont cependant moins besoin de leurs soins. De ces penchants sociaux résultent sans doute ces troupes souvent immenses que forment les choucas à l'arrière-saison, soit dans les cités, sur les toits des plus hautes églises, soit dans les champs, où nous en avons vu, particulièrement entre Iliescas et Tolède, dans la Castille, obscurcir le ciel lorsqu'ils volaient, dans toute l'étendue du mot, et sans qu'il y ait rien d'exagéré dans cette expression. Nous les avons aussi vus, particulièrement dans les villes malpropres de la Pologne, jusque dans Varsovie, descendre dans les rues à peine pavées, el familiers au point d'y percher sur le dos des pourceaux qu'on y laisse vaguer.

La CORBINE, Corvus Corone Linné, représentée dans les planches enluminées de Buffon (no 483). Cet oiseau est l'un des plus communs dans nos campagnes, où nous le voyons, à la fin de l'automne', former des troupes nombreuses qui, s'élevant tout à coup de la surface des champs, font retentir les airs de leur croassement sinistre; au printemps, chaque couple, fidèle dans ses amours, s'isole pour vaquer aux soins de la ponte et de l'éducation des petits. La corbine, dont le nom scientifique rappelle les malheurs de Coronis, vit d'insectes, de reptiles, de vers, et se jette sur les charognes.

Le FREUX OU FRAYONE, Corvus frugilegus Linné, représenté dans les planches enluminées de Buffon (no 484), ne se nourrit point, comme la corbine, de la chair des animaux morts; les vers et les grains lui suffisent; aussi n'est-il pas mauvais à manger; et c'est par préjugé qu'on le repousse de nos tables; les pauvres habitants des campagnes en font d'excellents bouillons. Il vit également par troupes innombrables dans l'arrière-saison, en se mêlant alors aux réunions de la précédente, avec laquelle on le confond souvent.

Le CORBEAU NOIR ou proprement dit, Corvus corax Linné, représenté dans les planches enluminées de Buffon (n° 495), est le plus gros des animaux du genre. II descend rarement dans les plaines; solitaire, farouche, il vit dans les forêts montagneuses, et il est réellement un oiseau de proie, donnant la chasse aux jeunes lapins, aux levrauts et aux petits canards. C'est lui qui, de tout temps, fut regardé comme de sinistre augure, et dont le vol fut consulté par la superstition. On prétend qu'il vit fort longtemps, et nous en

avons vu un individu de la plus grande taille, qui était élevé dans un cabaret de Bretague depuis plus de trente ans, à ce qu'on nous as

sura.

La CORNEILLE MANTELÉE, Corvus cornix Linné, représentée par Buffon dans les planches enluminées (n° 72). Cette espèce, vulgairement connue sous le simple nom de Corneille, est commune dans nos campagnes, où elle présente les mêmes habitudes que le Freux, dont elle diffère seulement par son corps cendré, la tête, le dessus du cou, la gorge, les ailes et la queue y étant seuls d'un beau noir. C'est elle à qui l'on a fait une réputation d'étourderie qu'elle ne mérite cependant point: car, au contraire, c'est un oiseau prudent et avisé; elle ne se jette sur les charognes que dans une extrême nécessité. Les vers, les reptiles, les limaces et le grain font sa nour. riture de prédilection.

La PIE, Corvus pica Linné, représentée dans les planches enluminées de Buffon (no 488), est aussi une espèce du genre Corbeau; mais elle y est à la tête d'une petite division que caractérisent la légèreté des formes et la longueur de la queue, jointe à une plus petite taille. Tout le monde connaît cet oiseau pétulant, sauteur, étourdi, acariâtre et bavard; on lui attribue beaucoup d'intelligence et de penchant pour la rapine, que l'observation a souvent constaté. Il n'est pas d'oiseaux à qui l'amour de leur progéniture inspire autant de courage on a vu des pies attaquer jusqu'au faucon qui, planant sur leur nid, semblait en vouloir aux petits qui s'y trouvaient. La pie s'apprivoise aisément, et la facilité avec laquelle on lui apprend à prononcer le nom de Margot le lui a fait imposer chez les gens de la campagne. Il est des pies tout à fait blanches, ainsi que des corbeaux, en dépit de l'expression proverbiale, Noir comme un corbeau, ou blanc et noir comme une pie.

Le GEAI, Corvus glandarius Linné, représenté dans les planches enluminées de Buffon (no 481). Le vulgaire, habitué à l'idée que la couleur noire est le caractère du corbeau, ne se doute pas que le geai soit tellement son voisin dans la nature, que l'ornithologiste s'est trouvé dans la nécessité de réunir le corbeau et le geai sous un même nom générique. Cependant, le geai, sous beaucoup de rapports, est un oiseau semblable, seulement plus petit et paré d'autres couleurs : qui n'a remarqué la huppe dont il est couronné, arrêté son œil sur la suavité de la couleur vineuse de son plumage, et surtout admiré l'éclat de ces petites plumes nuées de noir et de divers bleus, qui lui forment comme deux épaulettes, en relevant la beauté des ailes? Ces petites plumes furent recherchées pour la parure des dames au temps de Louis XV;

partout elles brillaient dans les plus riches toilettes. Le geai, qui s'apprivoise fort bien, comme tous les oiseaux du genre dans lequel les naturalistes ont reconnu qu'il devait rentrer, est l'un des plus beaux, mais des plus nuisibles habitants de nos vergers. Il se nourrit de châtaignes, de fruits rouges et de racines bulbeuses, qu'il sait fort bien arracher, après avoir reconnu, entre toutes leurs voisines, les plantes qui les donnent.

L'Asie, l'Afrique et l'Amérique produisent un grand nombre d'oiseaux qui rentrent encore dans le genre dont il vient d'être question; tous ont à peu près les mêmes mœurs. L'amour des petits est porté chez tous au plus haut degré, et leur cri est généralement désagréable. On en connaît en tout environ une cinquantaine d'espèces.

BORY DE SAINT-VINCENT.

CORDAGE. (Marinc.) Nom générique de toutes les espèces de cordes employées à bord d'un vaisseau, telles que les câbles, grelins, aussières, et toutes les manœuvres dormantes et courantes qui composent le gréement. Le cordage dont on se sert dans la marine est ordinairement fabriqué avec du chanvre; cependant on en fabrique quelquefois en pitte (filaments d'une espèce d'aloès), en quer (enveloppe filamenteuse de la noix de coco), ou en bastin (espèce de jonc qui croît dans le Levant). La manière dont se fait le cordage, et tout ce qui concerne les expériences pour en éprouver la force, sont des parties essentielles de l'art du cordier, et seraient déplacés dans cet article.

t

PARISOT.

CORDE. (Géométrie.) C'est la longueur qui s'étend d'un point d'une courbe à un autre point. Nous ne considérerons ici que les cordes du cercle. On démontre, dans les éléments, que :

1° De ces quatre conditions: être perpendiculaire à une corde, la couper par moitié, diviser l'arc de cercle en deux parties égales, enfin passer par le centre, toute droite qui remplit deux de ces conditions satisfait nécessairement aux deux autres;

2o Les cordes qui se croisent dans un cercle se coupent en parties réciproquement proportionnelles, c'est-à-dire que les deux parties d'une corde sont les extrêmes d'une proportion, et que celles de l'autre corde en sont les moyens;

3o Les cordes égales sous-tendent des arcs de cercle égaux, et réciproquement;

4o Des cordes parallèles interceptent entre elles sur la circonférence des arcs égaux.

Ces propositions, et plusieurs autres encore, sont démontrées dans les traités de géométrie, et nous ne pouvons que les énoncer ici. Nous donnerons plus de détails aux pro

« PreviousContinue »