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Antoine l'Ermite fonda le premier monastère en Égypte.

Dèce fut proclamé empereur en 248, et donna son nom à la septième grande persécution. Ce fut sous son règne que commença le miracle triséculaire des sept Dormants de la caverne.

Avant l'époque de Dioclé tien (en 296) et de la dixième persécution, qui fut la plus sanglante de toutes, les chrétiens d'Égypte avaient eu quelques moments de calme. Ils venaient d'élever à Alexandrie une église à Marie, lorsque éclata cette persécution. L'Égypte s'émut, se souleva. Dioclétien passa à Alexandrie, et les massacres se multiplièrent. Il ferma les églises et prescrivit, par un édit, d'adorer les idoles. Tous ceux qui refusèrent d'obéir périrent dans les tortures; le patriarche Pierre, sa femme et ses enfants eurent la tête tranchée. Dioclétien fit chercher tous les anciens livres égyptiens sur l'alchimie, et les brûla, afin que personne en Égypte ne pût faire désormais de l'or, et préparer ainsi des richesses qui missent cette contrée en état de se révolter de nouveau.

L'affreux massacre de la persécution dioclétienne sur la terre du Nil fut, comme je l'ai déjà indiqué, une époque dont les chrétiens coptes conservèrent le terrible et glorieux souvenir, en la choisissant pour point de départ de leur ère. Elle est connue sous la qualification d'Ère des martyrs. Le 4 septembre 1846 correspond au dernier jour du mois copte misré (misory, ancien style), le dernier mois de l'an 1562, style de l'ère copte actuelle. Le 9 septembre 1846 correspond au cinquième jour supplémentaire, dernier jour de l'année copte 1562. Mais en comptant depuis l'avénement de Dioclétien vers l'an 296 de JésusChrist, l'ère copte ne devrait dater que de 1551. § VI. École d'Alexandrie. Solitaires. Hérésies. Jacobites. Agitations.

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Un portefaix d'Alexandrie, Ammonius Saccas, fonda une école philosophique, et des hommes d'une intelligence éminente, Plotin, Origène, Porphyre, Longin, Jamblique et Proclus, développèrent la doctrine de cette école et la soutinrent par la force et l'éclat de leur génie et de leur enthousiasme. Ce ne fut qu'au commencement du sixième siècle, sous Justinien, que cette école philosophique prit fin.

A l'époque de sa plus grande élévation, au temps de Porphyre et de Jamblique, l'école d'Alexandrie n'avait pas encore pu compren. dre la partie civilisatrice du christianisme; elle n'en avait vu que la partie mystique, et, dominée encore par ce qu'avait aussi de mystique le système de Platon sur les idées, elle ne prit sa course que dans les directions métaphysiques, dans les régions surnaturelles du théo

logisme, de la contemplation de l'abstrait et de l'absolu; et par là elle aboutit à l'ascétisme le plus raffiné, le plus extatique. Plotin était honteux d'avoir un corps. Les élus de Dieu étaient ceux qui, dans les ardents et immen. ses élans de l'extase, pouvaient s'unir à l'Absolu, à l'Un, à Dieu. Porphyre n'eut ce bonheur qu'une fois dans sa vie; Plotin l'eut trois fois.

L'école d'Alexandrie, pour rivaliser avec l'Église chrétienne dans ce qu'elle avait de plus élevé, admit aussi une trinité. La manière dont se constitua chez elle ce point de doctrine ne fut pas sans puissance sur les esprits des prêtres, évêques, ou patriarches chrétiens qui soulevèrent les questions dans lesquelles les bases premières du dogme furent attaquées ou débattues. C'est à Alexandrie que s'allumèrent l'arianisme, le jacobisme, le nestorianisme, ces trois hérésies qui eurent un retentissement si grand et si prolongé.

Dans la trinité alexandrine, le Dieu triple et un est ainsi présenté : l'Unité, incompréhensible, au-dessus de tout; - l'Intelligence ou le λóyos, qui est produite par l'Unité, et identique à l'Etre, et cependant l'Unité n'est ni l'Étre; ni l'Intelligence; - l'Ame universelle ou l'Esprit, principe mobile, génératrice du mouvement, produite par l'Intelligence, principe immobile. La seule force de la raison ne peut s'élever que jusqu'à l'Ame universelle, la force de la philosophie, jusqu'à l'Intelligence immobile, c'est-à-dire aux essences des êtres; la force seule de l'amour, l'extase pure, peut s'élever jusqu'à l'Un absolu, le Bien.

Cette théodicée alexandrine, comme on le voit, manque de cette bonté attentive qu'on appelle Providence. Il n'y a pas le Saint-Esprit, ou l'amour qui unit le Père et le Fils du Dieu chrétien; il n'y a que trois hypostases placées en série.

Pendant que l'école d'Alexandrie se forma, s'éleva, vécut, le christianisme grandit; il s'assit sur le trône de Constantin, précédant l'alexandrisme, qui faillit s'asseoir sur le trône de Julien.

En Égypte se préparait un grand bouleversement, celui de l'arianisme. D'autre part, cette contrée n'avait jamais que des intervalles de repos interrompus par l'avidité de ses gouverneurs politiques. Car, depuis le commencement de la conquête romaine, cette contrée fut soumise à une administration en grande partie exceptionnelle, différente de celle des autres pays vaincus. L'Égypte fut établie le grenier de Rome, et le préfet chargé de gouverner répondait des récoltes et de l'envoi des produits à la métropole. La crainte de confier une trop grande puissance aux gou. verneurs avait conduit les empereurs romains à laisser subsister dans presque toutes les

provinces des assemblées qui communiquaient directement avec le souverain lui-même. L'Égypte fut du nombre des pays soumis qui n'eurent pas d'assemblées, et la tyrannie des préfets y fut la cause de nombreuses révoltes.

Toutefois l'Égypte, éloignée du centre des persécutions, offrant à la contemplation le silence de ses déserts, parut un asile convenable à ceux qui voulaient consacrer tous les moments de leur vie aux pieuses pratiques de la religion, à la méditation de ses maximes. De saints anachorètes vinrent se retirer dans les solitudes qui bordent les deux côtés de la vallée du Nil, surtout dans la Thébaïde. Ce fut là l'origine des ordres monastiques, des monastères, autres refuges solitaires au milieu des contrées habitées. L'Égypte vit bientôt, avec ses églises, s'élever de ces pieuses retraites : plus de cent asiles de cette nature s'établirent peu à peu dans la seule vallée de Habyb. Environ quatre-vingts autres se fondèrent sur le reste du sol égyptien, et plusieurs donnèrent abri à des vierges et à de saintes femmes.

Mais revenons sur nos pas, et voyons rapidement les hérésies qui remuèrent l'Église d'Égypte, et par suite toute la chrétienté. Les mouvements religieux des chrétiens d'Égypte sont la partie saillante de leur histoire, leur histoire personnelle, depuis l'occupation de leur pays par les Grecs et ensuite par les Romains.

Un prêtre d'Alexandrie, Libyen d'origine, poëte et prosateur brillant, controversiste hardi et subtil, Arius, souleva une hérésie qui mit l'Église en feu, et qui enfanta des résultats vivant encore à présent dans le schisme grec.

Déjà Origène, à force de subtiliser les formes philosophiques et dialectiques païennes, et de se rapprocher ainsi des subtilités de l'école d'Alexandrie, avait fait naître chez beaucoup de chrétiens le désir d'examiner par le raisonnement la nature de Jésus. Selon Origène, Jésus est au second rang dans la conception de Dieu; il nous transmet la bonté du Père, et porte au Père nos prières; par cette idée, l'arianisme était préparé; car c'est sur ce point de relation que porte cette hérésie.

Arius s'annonça d'abord comme ayant reçu de Dieu la connaissance et la sagesse, et proclamant son rationalisme, il attaqua la plus haute question de la théodicée chrétienne : il nia le dogme du Verbe incarné, coéternel et consubstantiel au Père. C'était nier l'HommeDieu, abaisser le Christ à l'état simple d'homme, et par suite culbuter les bases du christianisme, foi et culte. Il n'y avait plus de rédemption; les cérémonies de l'Église devenaient vides de sens, et les martyrs n'étaient que des idolâtres. Arius et ses partisans demandaient aux femmes qui les écoutaient :

<< Aviez-vous un fils avant d'en avoir mis un << au monde? Vous n'en aviez pas. Dieu n'en << avait pas non plus avant d'avoir engendré. >>

En général, les femmes acceptèrent l'arianisme, et sept cents vierges d'Alexandrie et de la Maréotis s'attachèrent à Arius comme à leur père spirituel car sa piété et ses œuvres de bien les avaient aussi entraînées. Alexandre, patriarche d'Alexandrie (en 320), écrivit au novateur, défendit le principe orthodoxe, et convoqua un synode des évêques suffragants d'Alexandrie. Arius fut déclaré hérésiarque et excommunié; mais il écrivit à nombre d'évêques, et plusieurs le déclarèrent innocent.

L'Égypte se troublait dans sa foi. Constantin écrivit à Alexandre et à Arius, les blâma d'entretenir une discussion insoluble, et leur ordonna de se taire. Mais la querelle s'animait. Un concile fut convoqué à Nicée, et trois cent dix-buit évêques s'y rendirent. Plus de trois cents voix votèrent contre Arius, et prononcèrent son exil. Le procès-verbal de cette célèbre œcuménie fut le symbole de Nicée, l'œuvre de saint Athanase, qui fut le génie du concile.

Après la mort d'Alexandre, Athanase eut le patriarcat d'Alexandrie. Arius réussit à se faire rappeler d'exil, et Athanase, calomnié auprès de l'empereur Constantin, fut à son tour exilé et relégué à Trèves, dans la Gaule.

Arius mourut subitement, et les orthodoxes ne manquèrent pas de crier au miracle. L'arianisme, néanmoins, gagna jusqu'à la cour de Constantinople, et des centaines d'évêques l'aeceptèrent. Des conciles même, ceux de Milan et de Rimini par exemple, le proclamèrent vrai. Du reste, ce ne fut que vers le milieu du septième siècle que cette doctrine s'affaiblit:

La pensée première de l'arianisme fut recueillie et proclamée par Mahomet, qui répète à tout moment, dans son Coran, que Dieu ne peut avoir d'enfant, de fils, et que Jésus est le Verbe ou la parole de Dieu.

L'arianisme dominait à la cour sous Constance, et de même à Antioche, à Alexandrie. Athanase, rappelé à son patriarcat, en fut encore chassé, et fut remplacé par Lucius l'arien. Athanase, revenu de nouveau à son siége, y resta jusqu'à sa mort.

Pierre lui succéda; mais les machinations des ariens d'Égypte le forcèrent de s'enfuir, et Lucius fut rappelé. Lucius, trois ans après, fut obligé de céder le siége à Pierre, qui n'y resta qu'un an, et fut remplacé par Arius, le Sébécáty, évêque d'Antioche. Ensuite, Timothée dirigea le patriarcat pendant sept ans, et ce fut dans cet intervalle qu'eut lieu le second concile de Constantinople, où Makédonion (Pélage), qui avait proclamé l'origine créée du Saint-Esprit, fut condamné. A cette même époque, plusieurs églises furent élevées à

Alexandrie, et quelque temps après, sous Arcadius, fut construit le couvent de la Mule, vis-à-vis Toura, l'ancienne Troie d'Égypte.

Vers le milieu du cinquième siècle de l'ère chrétienne, pendant que Kirillos (Cyrille) occupait le siége patriarcal d'Alexandrie, vécut saint Schenoudi, célèbre théologien parmi les Coptes. C'est à cette même époque que Nestorius enseignait que Marie n'était point mère de Jésus, fils de Dieu; qu'elle avait donné le jour à un homme qui avait reçu une puissance surhumaine, celle des miracles; que le nom de fils de Dieu était une forme, une figu. re, et qu'il indiquait seulement qu'en cet homme était descendu le Verbe, le fils éternel engendré du Père. Par là, Jésus avait eu en lui deux substances, les deux natures divine et humaine, deux personnes, mais une seule puissance.

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rie, comment ta mère fut obligée d'aller toucher le corps de Chrysostôme et demander pardon pour se guérir de la terrible maladie dont elle était frappée. » Pulchérie se lève, et applique à Dioscore un soufflet qui lui brise deux dents. En même temps, plusieurs des assistants se précipitent sur le patriarche alexandrin et lui arrachent la barbe. La condamnation et l'exil de Dioscore sont prononcés, et Bartdous est désigné pour lui succéder au patriarcat.

Le monophysisme ainsi outragé s'acquit de nombreux partisans, et de ce moment se formèrent deux camps ennemis: celui des jacobites, ou partisans de Dioscore, et celui des mélikites ou royaux, impériaux, partisans des croyances du souverain. Une haine implacable sépara désormais les Kibt et les Grecs. Cette scission date de 173 de l'ère copte ou dioclétienne. Dioscore se retira en Palestine; il avait siégé quatorze ans à Alexandrie.

Les jacobites furent ainsi appelés du nom de Jacob, que portait Dioscore avant son patriarcat. Mais on a prétendu que Jacob était le nom d'un disciple de Dioscore, que son maître envoyait prêcher, au milieu des chrétiens, les croyances rejetées par le concile de Chalcédoine. Selon une autre opinion, il était disciple de Sévère, patriarche d'Antioche.

Un nouveau concile fut convoqué en 431 pour juger ce nouveau schisme. Le lieu de l'assemblée fut Éphèse, et deux cents évêques s'y rendirent. Nestorius ne se présenta pas; il fut condamné comme hérétique, et exilé dans la Thébaïde; il se fixa dans Akhmym (Panopolis), où il mourut sept ans après. L'hérésie nestorienne eut une vogue immense en Asie, et suscita des troubles sérieux. Eutychès, pour réfuter le nestorianisme, prétendit que dans Jésus le corps était insaisissable, ayant été absorbé par la nature divine, comme une goutte d'eau dans la mer. Eutychès fut condamné aussi comme hérétique. Son idée, reprise ensuite par Dioscore, vingt-mée, où on le brûla. On élut ensuite Timothée cinquième patriarche d'Alexandrie, fut le motif d'un nouveau schisme, celui des Coptes: ce fut le monophysisme.

Dioscore soutint qu'il n'y avait eu dans Jésus-Christ qu'une seule substance, une seule personne, une seule nature, une seule puissance. L'empereur Marcien suivait le principe adopté dans l'Empire, et reconnaissait dans Jésus les deux substances, les deux natures, les deux puissances, mais une seule personne ou hypostase. Dioscore condamna cette foi; et Marcien, irrité de cette audace, décida la mort du patriarche alexandrin. On apaisa la colère de Marcien, et on convoqua une œcuménie à Khalcadonyah ou Chalcédoine. Six cent trente-quatre évêques composèrent ce jury: ils engagèrent le patriarche à se ranger à l'opinion générale. Dioscore répondit qu'un empereur n'avait rien à voir dans les questions délicates du dogme; qu'il n'avait qu'à s'occuper des affaires de l'État, et à suivre la voie de la vérité en matière d'orthodoxie.

Pulchérie, femme de l'empereur, était présente à l'assemblée, et assise à côté de Marcien. Pulchérie rappela alors comment sa mère avait déposé Jean Chrysostôme de ses fonctions. -« Tu sais, répliqua Dioscore à Pulché

Six ans après l'exil de Dioscore, Marcien mourut. Les Alexandrins alors égorgèrent, dans l'église, Bartâous comme mélikite: on traîna son cadavre à l'amphithéâtre de Ptolé

patriarche. Il était jacobite. Trois ans après, il fut exilé par un préfet envoyé de Constantinople, et Sévère, évêque mélikite, fut porté au patriarcat. Mais Timothée fut ensuite rappelé.

A Timothée succéda Athanase, puis Jean, etc. Ce fut du temps d'Athanase que fut incendié l'amphithéâtre, de Ptolémée. Sous le règne de l'empereur Anastase, les mélikites et les jacobites travaillèrent à faire prévaloir chacun leur croyance. Anastase, pencha pour la foi dioscorienne, et il fut accusé d'hérésie par les évêques et les patriarches mélikites.

Justinien, ardent mélikite, écrivit à Timothée d'accepter la foi proclamée à Chalcédoine. Timothée refusa, et Justinien décida la mort du patriarche. On intercéda, et Timothée fut exilé. Paul, mélikite, le remplaça; mais deux ans après il fut assassiné par les jacobites: son successeur, aussi mélikite, Deilous, ne siégea que cinq ans à Alexandrie. Ce furent cinq années de trouble, après lesquelles il fut obligé de s'enfuir.

Justinien, impatienté de l'indocilité des chrétiens Kiht, envoya en Égypte Apollinaire, officier de l'Empire, et le fit suivre de près d'un corps de troupes. Apollinaire, arrivé à Alexandrie, se rend à l'église, au milieu des fi

dèles, endosse le vêtement patriarcal et commence les prières. La foule scandalisée allait le lapider. Apollinaire s'enfuit. Le dimanche suivant, il annonce qu'il a à communiquer une dépêche de l'Empereur, et convoque le peuple à l'église. Les troupes s'assemblent. Apollinaire monte en chaire, et annonce aux assistants qu'ils aient à renoncer aux principes jacobites, et à prévenir les effets de la colère de l'Empereur. On s'agite, on menace. A un signe d'Apollinaire aux soldats, un affreux massacre remplit l'église de sang. Plus de 100,000 victimes, dit-on, succombèrent. Une foule considérable s'enfuit d'Alexandrie aux couvents de la vallée de Habib. Les mélikites s'emparèrent des églises jacobites, et de ce jour le siége patriarcal de ces derniers fut au couvent de Saint-Macaire, dans la vallée que je viens d'indiquer.

Apollinaire, devenu patriarche, siégea à Alexandrie pendant dix-sept ans. Il eut pour successeur Jean, melikite, puis Theodose, jacobite, puis Dèce, mélikite, etc.; et toutes ces alternatives furent accompagnées de vexations, de persécutions réciproques entre les deux partis.

Sous le règne de l'empereur Maurice, le moine Mårôn propagea une nouvelle scission religieuse, et enseigna que dans Jésus il y avait deux natures, une seule volonté ou puissance, et une seule personne; ce schisme, né à Émesse, envahit la Syrie et eut des partisans jusqu'à la cour de Constantinople : l'empereur Héraclius lui-même y inclina.

Héraclius, après avoir abattu les Perses, déjà vaincus par Maurice, passa en Judée, vengea les chrétiens des outrages des Juifs, et se rendit ensuite en Égypte. Le patriarcat d'Alexandrie était entre les mains de Benjamin, jacobite, qui avait dirigé l'Église égyptienne pendant les dix années que les Perses avaient dominé en Égypte. Héraclius, qui haïssait le jacobisme, voulut mettre à mort Benjamin; mais le patriarche avait pris la fuite. L'empereur fit saisir Mina, frère de Benjamin, et le fit brûler vif. Puis il nomma Firach patriarche d'Alexandrie, et retourna à Constantinople.

Mais déjà, disent les Arabes, avait apparu la religion sainte, l'islamisme, qui devait bientôt enlever aux chrétiens la Syrie et l'Égypte.

§ VII. Invasion de l'Égypte par les musulSiége du Casr-el-Chama. Soumission des Coptes.

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Lorsque Mahomet crut voir l'avenir de son œuvre à peu près assuré, il commença à écrire ses Épitres à tous ceux qui, près ou loin, avaient quelque puissance sur des tribus, une contrée, un pays, et les appela à subir sa nou、

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velle foi. C'était la cinquième année de l'hégire.

Håteb fut chargé de porter la lettre écrite au Moucaukis ou gouverneur d'Égypte, ou prince des Kibt. Le Moucaukis, craignant une révolte des Coptes, n'ose embrasser la religion nouvelle; mais il écrit une lettre à Mahomet, et lui envoie des présents, parmi lesquels se trouvaient deux jeunes filles nées d'une famille illustre entre les familles cop

tes.

Le saint prophète mit une des deux sœurs, nommée Maria, au nombre de ses concubines. Mahomet n'eut de fils que de Maria, et il le nomma Ibrahim. Cet enfant, qui ne vécut que seize mois, était la joie de Mahomet. « Si Dieu « m'eût laissé mon fils, dit Mahomet après la perte de cet enfant, j'aurais à l'avance et à « tout jamais exempté les Coptes de payer le «< droit de djizich. » Le djizieh est le droit de vie sauve payé par les vaincus aux musulmans... Plus tard, Mouawiah exempta de tout impôt et de capitation les Coptes de Hafn, village du district d'Ansina (Antinoopolis), où Maria était née.

Mahomet, comme je l'ai déjà indiqué, avait annoncé à ses religionnaires la conquête de l'Égypte; cette préoccupation, dit-on, le retrouva au lit de la mort. Quelques heures avant d'expirer, il s'évanouit par trois fois, et à chaque fois qu'il reprit ses sens, il dit : « Au nom du «< ciel! traitez avec bonté les crépus au teint « bronzé. » On lui demanda qui il voulait désigner : - « Ce sont, dit-il, les Coptes d'Egyp te, car ils seront votre secours et votre appui. Ils cultiveront pour vous la terre, et << par là vous laisseront le temps de prier et de «< combattre pour la loi sainte. Qui aura la << pensée seulement de leur faire du mal sera « coupable de ce mal.... » Nous verrons que cette recommandation ne fut guère suivie.

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Amr, que les orientalistes même parmi les Européens appellent Amrou, je ne sais pourquoi, fut préparé dès avant l'apparition de l'islamisme à la conquête de l'Égypte; car dès ce temps, disent les légendes, il fit un voyage de Syrie à Alexandrie avec un diacre copte à qui il avait sauvé la vie, et un incident particulier prédit que Amr gouvernerait un jour P'Égypte. A une grande fête annuelle des Grecs les hauts personnages s'assemblaient à l'amphithéâtre, et en présence de la foule se jetaient une balle d'or; celui dans la manche duquel elle venait tomber arrivait, avant de mourir, à gouverner l'Égypte. Amr assista à la fête, et la balle lui vint dans la manche. On rit de ce hasard; et cette fois on ne crut pas à la balle, on l'accusa de s'être trompée... L'avenir la justifia.... Amr partit.

La dix-huitième année de l'hégire, quand Omar le khalife marchait sur Djâbyeh, non loin

de Damas, Amr, fils d'El-As, proposa au khalife de faire la conquête de l'Égypte. Omar refusa; il craignait de compromettre ses succès, en détachant de son armée un corps de troupes trop considérable. Quelques mois après il céda; et le quatrième ou cinquième mois de l'année suivante Amr se mit en marche avec 4,000 hommes. Mais Omar lui dit : « Si je t'é<< cris de revenir, et que ma lettre t'arrive << avant que tu sois sur les terres d'Égypte, << retourne sur tes pas. Si tu es sur le sol d'Égypte, continue ta route. >>

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Peu de temps après que Amr fut parti on éveilla la défiance d'Omar, en représentant Amr comme un homme audacieux, entreprenant, et peut-être capable de tenter pour lui-même la conquête qu'on lui avait permise. Omar écrivit à Amr de revenir à Djâbyeh. Amr était déjà à Rafeh, à une étape d'El-Arych, quand la lettre lui fut apportée; et soupçonnant qu'on lui ordonnait de retourner en Syrie, il ne voulut recevoir la lettre que lorsqu'il serait sur le sol égyptien. Là, il ouvrit la lettre, expliqua à ses soldats la convention faite entre Omar et lui, et termina par ces mots : « Nous << sommes en Égypte; marchons en avant, « sous la protection de Dieu. >>

Le Moucaukis, prévenu de l'approche de l'ennemi, se transporta au Casr-el-Chama ou Castel du Flambeau, citadelle de la Babylone d'Égypte, et située alors sur l'emplacement où s'éleva par la suite le Vieux-Caire ou Misr. La défense de ce fort avait été confiée à un Grec appelé Mandacôur.

La première rencontre entre les Arabes et les Égyptiens eut lieu à Farma ou Farama. Elle fut suivie de nombreuses escarmouches. Le succès resta aux musulmans. Dès ce moment le patriarche Benjamin écrivit aux jacobites ou Coptes de prendre parti pour les Arabes, ou au moins de ne pas s'opposer à leur marche.

Amr fut bientôt à Bilbeis. Là il eut encore à soutenir de fréquentes attaques. Arrivé à Oumm-Deneyn, il trouva une vigoureuse résistance. Il triompha et se dirigea sur le Casrel-Chama. Le Moucaukis y était. Le siége fut ouvert immédiatement. Le Casr était bien fortifié, entouré d'un large fossé, et défendu principalement par des Grecs ou troupes d'Héraclius. Les efforts des musulmans avaient peu de succès, et le siége pouvait traîner en longueur. Amr demanda du secours à Omar, et Omar lui envoya 12,000 hommes, en quatre corps, sous les ordres de quatre chefs; mais Zobeyr, l'un d'eux, avait le commandement supérieur. Amr alla à la rencontre de l'armée. Aussitôt arrivé, et sans même descendre de cheval, Zobeyr alla visiter tous les abords du Casr, distribua ses troupes sur les divers points d'attaque, et prépara un assaut général.

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<< sacrifie ma vie à Dieu, » lui dit-il; et il prend une échelle et va la dresser sur le flanc de la citadelle. Il monte; il paraft sur le mur au cri de : « Dieu est grand! » Toute l'armée le suit en criant: « Dieu est grand! » Les Grecs, étonnés, s'éloignent. Zobeyr, et ceux qui l'ont suivi de près se précipitent dans la citadelle, courent à la porte, l'ouvrent... et la masse des musulmans pénètre dans l'enceinte. C'était le vendredi, le premier jour de la vingtième année de l'hégire.

Le Moucaukis, réfugié de l'autre côté du Nil, envoie une députation vers Amr pour lui proposer un accommodement.. Amr garde les députés deux jours dans son camp, afin de leur laisser juger ce qu'étaient les soldats de la foi islamique. Puis il les congédia, avec cette seule réponse pour le Moucaukis: << Trois cho«ses, choisis : ou l'islamisme et alors nous << sommes frères ; ou un droit de capitation, et « vous êtes nos sujets; ou la guerre jusqu'à << ce que Dieu décide entre vous et nous. >> Ces paroles brèves et catégoriques frappèrent les esprits. Une nouvelle députation fut expédiée pour demander à Amr d'envoyer quelques officiers pour traiter de la paix. Le chef arabe choisit dix individus et parmi eux Obâ. dah; Obâdah était noir, vigoureux, et de taille gigantesque. C'est lui qui fut chargé de répondre au prince cople, mais avec ordre de ne pas sortir des trois alternatives déjà proposées.

Obadah partit avec ses neuf compagnons. On discuta; la sagesse et la fermeté des paroles du noir imposèrent. Le Moucaukis offrit de grandes sommes d'or, et chercha à effrayer les Arabes par le nom et la force des Grecs. Obâdah n'accepta aucune transaction; il s'en tint aux trois propositions d'Amr, et partit sans avoir rien terminé.

Pour les Coptes, les conditions étaient dures; la guerre leur paraissait trop dangereuse, et on ne leur offrait que l'apostasie ou l'esclavage. Ils délibérèrent, discutèrent. Mais ce ne fut que dans une entrevue entre Amr et le Moucaukis qu'on ratifia les conditions du traité suivant:

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