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ils détrempent aussi les premières avec de l'essence de térébenthine pure, et les secondes avec de l'essence mêlée d'un peu d'huile siccative.

Les outils dont on se sert pour broyer les cou. leurs sont une table horizontale en pierre, en granit, en verre ou en porphyre, la molette en forme de cône tronqué, et l'amassette, espèce de couteau dont la lame est très-flexible.

Pour broyer les couleurs dangereuses, telles que le blanc de plomb, le minium, le vermillon, le vert de Schweinfurt, le vert-de-gris, etc., les fabricants emploient une machine.

La première machine de ce genre fut inventée par M. Bachelier; elle remplace, dans toutes ses fonctions, l'ouvrier broyeur, sans que celui-ci touche aux matériaux. Elle verse la couleur et le liquide, quel qu'il soit, en temps opportun; et lorsque la couleur est parfaitement broyée, un couteau la ramasse et la verse dans le vase qui doit la recevoir. Le même moteur peut mettre en mouvement plusieurs machines semblables.

Conté avait imaginé, et l'on a exécuté depuis en Angleterre, un moulin qui remplit les mêmes fonctions d'une manière très-ingénieuse et assez satisfaisante. Les fig. 1, 2 et 3 (Voy. l'Atlas, Arts mécaniques, pl. x) en présentent l'élévation et le plan.

A. Båtis du moulin, consolidé par deux barres de fer B.

C. Meule inférieure ou gisante, en fer, environnée d'un cercle en fer galvanisé D, qui retient la couleur.

E. Trou pratiqué dans le cercle, et par où sort la couleur broyée pour tomber dans le vase X. F. Meule supérieure ou tournante, également en fer, ayant au milieu un trou G, recevant la couleur qui s'en échappe pour s'introduire entre les deux meules.

H. Axe vertical en fer qui fait mouvoir la meule supérieure F.

K. Roue d'angle horizontale.

L. Roue d'angle verticale, engrenant avec la roue K, et placée sur l'axe M.

M. Axe portant une manivelle N faisant tourner la meule F.

O Volant portant une manivelle P sur un de ses rayons, où le fixe un écrou J.

R. Trémie; S. Auget suspendu au-dessous par la chaîne T.

V. Vis servant à tendre plus ou moins la chaine T, et à régler l'inclinaison de l'auget S. X. Boîte en cuivre pour recevoir la couleur, ayant ses anses ZZ.

Y. Robinet pour soutirer la couleur.

On emploie aussi des machines composées de deux ou trois cylindres, en granit ou en fonte, agissant comme de véritables laminoirs; telle est celle qui est figurée dans notre Atlas; ARTS MÉCANIQUES, pl. xiv, fig. 1; mais de pareilles machines sont tout au plus utiles pour mélanger en gros, avec facilité et économie de travail, l'eau ou l'huile avec les couleurs déjà ENCYCL. MOD. T. XI.

pulvérisées et tamisées. Dans tous les cas il faut employer préférablement les cylindres en granit, en porphyre ou en pierre lithographique très-dure; car le blanc de céruse broyé avec des cylindres en fer jaunit au bout d'un certain temps. Le bleu de Prusse verdit lorsqu'il a été trituré par le même moyen; les ocres piquent la fonte. On doit achever ensuite le broyage avec des meules horizontales, et c'est là le meilleur mode pour obtenir des couleurs fines, d'un bon emploi, et faciles à étendre avec le pinceau.

Cela se conçoit aisément. La molette ou la meule, agissant par le frottement circulaire alternatif et longtemps prolongé, opère tout à la fois un mélange plus intime de la matière colorante avec le liquide gommeux ou huileux; elle la divise en particules plus fines, mieux réparties, plus arrondies, et par conséquent moins adhérentes entre elles. Mais l'expérience prouve qu'il faut, pour obtenir un bon résultat, que les deux meules tournantes soient construites avec un soin extrême, que les surfaces en contact aient une forme, une courbure et un grain d'une grosseur déterminée.

Avec les machines cylindriques, il faut le dire franchement, pour éclairer les fabricants sur les inconvénients qui résultent de leur emploi, on produit toujours une couleur composée de lames parallèles, susceptibles de contracter une adhérence plus ou moins forte suivant qu'elles sont plus minces, plus égales, plus homogènes, après avoir été triturées plus longtemps. Or, on sait que les corps les plus résistauts sont les plus difficiles à diviser: c'est là le défaut à éviter dans les couleurs préparées pour la peinture, lesquelles ne doivent offrir qu'une résistance faible et qui permette toujours d'isoler et d'étendre facilement leurs molécules.

C'est précisément à ce défaut d'une trop forte agrégation de molécules, qu'on rencontre trop souvent dans certaines couleurs broyées avec des machines cylindriques, que l'on doit attribuer l'emploi abusif et pernicieux de l'essence de térébenthine pour délayer les couleurs sur la palette.

Disons-le en finissant, nous ne saurions trop recommander aux artistes soucieux de faire de belle, bonne et solide peinture, de suivre nos renseignements, fruits de plusieurs années d'étude, d'observation et de pratique.

Wattin, L'art du peintre vernisseur et du fabricant de couleurs.

Montabert, Traité complet de la peinture; 1829.
Bouvier, Manuel du peintre; 1829.
Mérimée, Traité de la peinture; 1830.
Mavicz, Traité du peintre en bâtiment.
Leclère, Observations sur la peinture en bâtiment.
A. ROUGET De Lisle.

COULISSE. (Art dramatique.) Techniquement, et dans son acception la plus restreinte, le 7

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mot coulisse sert à désigner les rainures dans lesquelles glissent les décorations qui se dressent aux deux côtés du théâtre, et l'espace compris entre ces décorations. De chacune de celles-ci à celle qui est placée directement en face, s'étend une ligne imaginaire qui traverse le théâtre d'un côté à l'autre et le divise transversalement en plusieurs zones d'égale largeur. Ces zones, dans le langage théâtral, prennent le nom de plans, et prêtent un utile secours aux dispositions de la mise en scène. L'espace compris entre le manteau d'arlequin et la première coulisse est le premier plan; l'espace compris entre le premier décor et le second est le deuxième plan, le et ainsi de suite, jusqu'à la toile de fond, dernier plan se trouvant de la sorte le plus éloigné du spectateur. Grâce à cette disposition, il devient facile d'indiquer exactement l'endroit où doivent se trouver les accessoires, la place où doivent se tenir les acteurs, en un mot tous les arrangements et toutes les évolutions scéniques, qui, le plus souvent échappent à l'œil du spectateur, mais qui contribuent puissamment à l'ensemble, et dont l'importance est bien comprise par quiconque a fait du théâtre une étude particulière.

Au reste, cette division du plancher dramatique, imaginairé, comme nous l'avons dit, et marquée par des lignes de tout point semblables aux cercles immatériels que les astronomes donnent pour limites aux régions de l'infini, devient de plus en plus conventionnelle. Autre. fois, si la ligne n'existait pas elle avait au moins ses deux bouts, et ses deux points de départ faisaient aisément deviner sa route. Mais l'usage des décorations fermées, devenu tout à fait général, la prive à présent de ce secours visible et palpable on ne la devine plus, on la suppose. L'ancien répertoire offre presque seul des exemples de ce qu'était autrefois l'aspect de la scène là seulement les coulisses ouvrent à chaque plan une entrée et une sortie. Ces rainures, qui au Théâtre-Français empiètent si profondément sur l'espace réservé aux acteurs, et marquent d'avance leur place invariable à la colonne du palais d'Auguste, ou à l'entrée de la maison de Géronte, ont disparu des autres théâtres. La variété des dispositions choisies par les auteurs, selon leur fantaisie ou les besoins de leur pièce, rendait l'ancien système impossible: les décorations s'appuient aujourd'hui sur des portants qui en admettent tous les caprices et en étayent toutes les irrégularités. La vraisemblance a beaucoup gagné à cette réforme, nécessitée ou au moins conseillée par le trop déploré trépas des unités classiques.

Dans la langue vulgaire, le mot dont il s'agit a une signification bien plus étendue. Les coulisses embrassent, dans l'idiome pro

fane, ce sanctum sanctorum que la toile sépare de la salle, que certaines petites portes, soigneusement interdites au public, séparent des lieux ouverts à tout le monde; tout cet univers mystérieux qui s'étend de la rampe au foyer des acteurs, du cabinet de la direction au magasin des accessoires, des loges des artistes à la loge du portier. Pour les fous, c'est le paradis; pour ce qu'on appelle les gens raisonnables, c'est l'enfer : et les uns ont tort comme les autres. Les hommes de plaisir commettent une grave erreur en s'imaginant trouver de l'autre côté de cette barrière, si aisée à franchir, un eldorado pavé de voluptés faciles et de joies qu'on peut prendre en se baissant ; les pères de famille ne se trompent pas moins en se persuadant que les séductions dangereuses y poussent dru comme l'herbe des champs, et que la ruine pend aux branches de cet arbre défendu. Certes, les mœurs artistiques se font remarquer par un laisser-aller qu'on ne trouve guère ailleurs; mais les gens qui envoient leurs fils étudier le droit et la médecine à la Chaumière et dans les cafés du Quartier latin, sont-ils bien venus à se montrer si délicats dans leurs préjugés ? Outre que les femmes de théâtre, ces dangereuses si. rènes, sont beaucoup moins séduisantes au delà de la rampe qu'en deçà, bon nombre d'entre elles, à l'heure qu'il est, vivent honnêtement dans leur ménage, jouent la comédie uniquement pour gagner de quoi élever vertueusement leurs filles, et poussent la chose si loin, qu'on est presque fâché de voir le pain quotidien de l'art pétri par des mains si bourgeoises. Quant aux autres, le temps est bien passé où elles faisaient leur déjeuner d'une ferme générale et leur souper d'une fortune princière. Ce ne sont plus aujourd'hui que des courtisanes de la plus vulgaire espèce, et la rue de Bréda est plus dangereuse aux opulences pressées de trépasser que le foyer de la Danse, à l'Académie Royale, ou les coulisses mal famées des Variétés. S'il faut parler de la partie masculine du personnel théâtral, disons que, comme l'autre, elle n'offre qu'un médiocre attrait, partant qu'un médiocre danger, et que quiconque péchera par elle aurait péché sans son aide. S'il y a sur notre scène, quoi qu'en disc plus d'un laudator temporis acti, — de l'esprit, du talent, du génie même, les gens qui usent à notre service, dans le fatigant métier qu'ils exercent, ces hautes facultés, ont autre chose à faire qu'à mériter la réprobation élevée contre eux par le préjugé : ils comprennent d'ailleurs que ce préjugé même leur fait des devoirs à remplir, et se le tiennent pour dit. Pour les autres, plus nombreux, il faut bien le dire, pour ceux qui travaillent à éloigner la réhabilitation prochaine, et défont tous les jours l'ouvrage des plus dignes, le mépris les rend

peu redoutables, et fait bonne justice de cette corruption que le talent n'excuse pas chez eux, qui ne porte avec elle ni charme ni séduction, et que le grand jour où ils sont placés fait paraître aux yeux du plus myope dans toute sa laideur et toute sa sottise.

Au reste, pour quiconque ne craint pas d'affronter avant le dîner les mystères de la cuisine, c'est un spectacle assez curieux que celui de ces officines où s'élaborent les vingttrois repas offerts quotidiennement au public parisien. Bien loin qu'il y ait des termes de comparaison pour faire comprendre ce qui se passe là, c'est l'ensemble des choses accomplies derrière la toile qui fournit des métaphores à l'envers des comédies humaines, tant le pittoresque et l'originalité, le bizarre et l'imprévu, y enfantent à qui mieux mieux l'étonnement et l'hilarité. Gavarni a vulgarisé bon nombre de ces joyeux contrastes : le pompier offrant du tabac à la jeune première; l'ingénue disant des gaudrioles; la danseuse exécutant des battements et levant le pied à une hauteur indécente; le régisseur faisant résonner sa cloche et infligeant aux retardataires des amendes mal reçues; la mère d'actrice sermonnant sa fille; l'acteur tragique riant aux éclats; l'acteur comique ruminant tristement, dans quelque coin, une épître grave et sérieuse; les costumes variés; les visages hideux sous la peinture qui doit les rendre charmants pour le public, etc., etc. Au reste, ce tableau, plein de rires et de gaieté, est loin d'être exactement vrai : les artistes consciencieux, et Dieu merci! il y en a encore, emploient autrement le temps de repos que leur laissent les intermittences de leur rôle; ils songent à la pièce, au public, aux applaudissements; ils se reposent de ce qu'ils ont fait et se préparent à ce qu'ils vont faire. D'ailleurs, les coulisses sont peu fréquentées pendant les représentations : les gens étrangers au théâtre en sont complétement écartés, et l'on n'y voit guère, outre les pompiers de service, que le régisseur, fort attentivement occupé à suivre sur la brochure la pièce qui se joue, et à avertir les acteurs quand vient le moment de leur entrée en scène.

SAINT-AGNAN CHOLER.

COUP DE THÉATRE. ( Littérature.) Cette expression, vieillie, surannée, et tombée dans le langage vulgaire, sert à désigner les surprises que l'auteur dramatique ménage à ses auditeurs, et fait surgir tout à coup au milieu de son action. Il y a coup de théâtre toutes les fois qu'un secours inespéré, un revirement imprévu ouvre une issue à la situation acculée dans un abîme, ou la jette violemment du jour dans les ténèbres; il y a coup de théâtre aussi (car la comédie emploie ce genre d'effet aussi bien que le drame) quand

une rencontre inattendue, un choc subit d'intérêts ridicules, un conflit soudain de caractères joyeusement dessinés ou de passions prises sous leur côté trivial, arrachent inopinément le rire aux spectateurs. Il faut citer en ce genre l'admirable scène où le fils d'Harpagon, mis en présence de l'usurier qui le vole, reconnaît son père dans ce même usurier. Rappelons encore le moment où Tartufe, se couvrant la tête devant Orgon qui veut le chasser de sa maison, le foudroie en lui répondant : « C'est à vous d'en sortir. » Cet exemple nous servira de transition pour passer aux exemples plus nombreux tirés du drame; car, s'il est emprunté à une œuvre comique, le frisson qui monte aux cœurs de l'auditoire à l'instant où se révèle, dans toute sa hideuse vigueur ce caractère si horriblement vrai change, par une transformation soudaine, la comédie en drame, et la joie en terreur. La tragédie, dans son allure digne et compassée, n'a pas fait un usage bien fréquent de cette féconde ressource, bien que le Sortez! de Roxane et la coupe empoisonnée de Cléopâtre (dans Rodogune) y touchent de bien près. La tragédie marchait en ligne droite, et du point de départ le spectateur pouvait voir déjà s'allonger devant lui, unie et brillante, cette large route pavée de poésie. Mais le drame va par des sentiers tortueux et ombragés, où les coudes fréquents multiplient les aspects imprévus, et il a réparé le temps perdu, à cet égard, par sa majestueuse aïeule: ainsi Hernani, entendant, dans le silence de sa nuit nuptiale, le cor funèbre qui lui ordonne la mort; ainsi Triboulet, croyant tenir sous son pied le roi tué par lui, et entendant tout à coup la voix de François Ier qui s'éloigne en chantant; ainsi Ruy Blas, saisissant l'épée pendue au côté de don Salluste, et se changeant subitement de victime en vengeur. Ajoutons à ces exemples connus de chacun un autre exemple, pris dans un ordre de littérature moins élevé, et que nous citerons tout au long, parce qu'il appartient à une de ces pièces dont l'intérêt fait tout le mérite, el dont la disparition sur l'affiche annonce le trépas à peu près complet et immédiat.

Lazare le Pâtre est muet depuis quinze ans : il a été éprouvé de toutes les manières; prisonnier, on lui a promis sa liberté; affamé, on lui a promis du pain, s'il voulait parler ou écrire. Il n'a pas dit un mot. Il est donc bien réellement condamné au silence. Aussi complote-t-on devant lui la mort d'un innocent; cette catastrophe s'accomplira si, à une heure convenue, le signal habituel que les soldats en faction se transmettent d'une extrémité de la ville à l'autre ne va pas des fenêtres de la chambre où le crime se décide à la prison où il doit se commettre. L'heure vient, et Lazare, le muet, est seul dans la chambre.

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COUP DE THÉATRE Alors il va aux portes, toujours lent et silencieux; puis il ouvre la fenêtre, se penche au dehors, et de la voix d'un homme qui rend la liberté à sa langue enchaînée depuis quinze ans, il crie : « Sentinelles, veillez ! » Le signal se répète en s'éloignant : celui qui devait mourir est sauvé.

L'effet est puissant, et le coup de théâtre est là avec toutes ses qualités, d'autant plus louables, qu'il joint à ses autres avantages celui de la nouveauté.

Or, il faut dire qu'il est loin d'être toujours aussi délicat. Il serait difficile d'énumérer les reconnaissances, plus ou moins bien mises en œuvre, qui l'ont défrayé pendant bien longtemps, et, celles-ci usées, quoique l'on n'y ait pas renoncé tout à fait, il serait malaisé de dénombrer les ressources cherchées dans ce qu'on appelle les entrées à effet. Cette sorte d'ingredient, qui entre généralement dans les œuvres dramatiques d'ordre inférieur, avec l'abondance et l'à-propos de la muscade de Boileau, consiste dans l'apparition soudaine d'un personnage, qui, se jetant à travers une situation perplexe comme le Quos ego... à travers la tempête, vient changer complétement l'aspect des choses, et démolir les toiles d'araignée tissées par l'auteur. Le moindre inconvénient de ces reproductions incessantes, c'est que les spectateurs, pour peu qu'ils aient vu jouer un petit nombre d'autres œuvres du même genre, savent parfaitement comment finiront les embarras accumu. lés par l'intrigue, et voient le fil à travers le dédale. Que devient alors le coup de théâtre ? D'après ce qui en a été dit, on doit comprendre que deux conditions sont indispensables à son existence : l'intérêt, dans ce qui le précède, et l'imprévu, quand il arrive. Ces deux con ditions se touchent et se tiennent; il faut que les complications du drame soient assez puissamment émouvantes pour que le spectateur désire une issue à ce labyrinthe de terreur et de pitié; il faut que cette porte, destinée à s'ouvrir à un moment donné, soit assez bien cachée pour que l'attente de l'événement, la crainte et l'espérance tiennent l'émotion sur pied et la curiosité en éveil.

SAINT-AGNAN CHOLER.

COUPE-RACINES. (Agriculture.) Indépendamment des graines et des fourrages, on cultive encore, pour la nourriture du bé tail, des racines que les animaux ne mangent qu'avec une certaine difficulté dans l'état où on les obtient à la récolte. Les bêtes vieilles dont la denture est usée, et celles qui, trop jeunes, n'ont pas encore leurs dents complétement développées, ne peuvent profiter de ces aliments que lorsqu'ils ont été découpés en morceaux de dimensions convenables. Tel est le cas des betteraves, rutabagas, carottes, etc.

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Si les pommes de terre, beaucoup moins volu mineuses, en général, que les racines que nous venons de citer, sont plus facilement mangées par le bétail, il convient cependant de les couper aussi avant de les faire consommer, afin d'éviter un accident susceptible de quelque gravité : en effet, il arrive parfois que des tubercules entiers, pris avec avidité par les animaux, sont avalés sans avoir été préalablement broyés, et s'engagent dans l'œsophage, sans pouvoir arriver jusqu'à l'estomac ; souvent ce n'est qu'avec beaucoup de peine que l'on parvient à débarrasser le conduit esophagien du corps qui l'obstrue. Si donc il est utile, dans une exploitation agricole, de posséder divers appareils pour préparer la nourriture au bétail, comme un hache-paille pour diviser les fourrages, un moulin pour concasser les graines, il est indispensable d'avoir un coupe-racines, c'est-à-dire une machine au moyen de laquelle ou puisse aisément découper les racines fourragères destinées aux bestiaux, de manière à en rendre la consommation possible pour quelques-uns et facile pour tous.

On a imaginé un assez grand nombre de coupe-racines : l'un des plus simples et des plus expéditifs (1) consiste essentiellement en une trémie ouverte latéralement à sa partie inférieure, et en un disque de tôle d'environ un mètre de diamètre, placé verticalement contre le côté libre de la trémie, et qu'on peut faire tourner sur son axe au moyen d'une manivelle. Ce disque est muni de trois lames également espacées et dirigées dans le sens des rayons; il porte à sa circonférence une roue de fonte qui doit consolider le tout et former volant. Dans son mouvement de rotation, le disque avec ses lames rase l'ouverture latérale de la trémie, attaque les racines qui y ont été placées, et les coupe en tranches de six à huit millimètres d'épaisseur. Deux hommes, dont l'un tourne la manivelle, tandis que l'autre alimente la trémie, peuvent couper en une heure jusqu'à mille kilogram. mes de racines, quantité équivalente à la ration journalière d'une quarantaine de vaches, ou bien à celle d'un troupeau de quatre à cinq cents bêtes à laine.

Il convient, surtout pour les pommes de terre, de ne couper, chaque fois, que ce qui peut être consommé dans la journée. Avant cette opération, les racines doivent être nettoyées avec soin de la terre qui adhère à leur surface.

Les tranches, obtenues comme nous venons de le dire, conviennent parfaitement aux bêtes à cornes; mais pour les moutons, il est utile de les subdiviser en petits fragments que les

(1) Voyez David Low, Éléments d'agriculture pra tique, tome jer.

animaux ramassent avec plus de facilité. On peut approprier la machine décrite ci-dessus à ce dernier usage: il suffit pour cela d'établir sur le disque, dans un plan perpendiculaire à celui des lames, des pointes de couteaux faisant saillie de deux centimètres du côté de la trémie, et disposés de façon que leur taillant vienne rencontrer les racines à découper. Pendant le mouvement de rotation du disque, les pointes de couteaux pénètrent dans l'épaisseur des racines, et les tranches détachées par les grandes lames, au lieu d'être entières, se trouvent divisées en bandes dont la largeur dépend de la distance qui a été laissée entre les couteaux.

Dans la petite culture, on peut couper les racines au moyen d'une sorte de couteau plié en S, ou plus simplement encore, formé de quatre tranchants disposés en croix. En dessus se trouve une douille destinée à recevoir un bâton qui sert de manche. Avec cet instrument, on peut d'un seul coup partager une betterave en quatre morceaux. En toutes circonstances, il convient fort bien pour écraser grossièrement les pommes de terre cuites que l'on veut donner aux animaux. LOEUILLIET.

COUPELLATION. (Technologie.) C'est une opération métallurgique par laquelle on sépare, au moyen du plomb, l'argent et l'or de diverses substances étrangères. Elle est fondée sur la propriété qu'ont l'argent et l'or d'être inoxydables dans les circonstances où l'on opère, tandis que les métaux qui les accompagnent, passant à l'état d'oxydes, sont ab. sorbés par la matière même de la coupelle. Le plomb est le seul métal commun dont l'oxyde puisse pénétrer la matière poreuse qui forme la coupelle; mais quand il est en proportion suffisante, la litharge qu'il produit par l'oxydation peut entraîner divers autres oxydes métalliques qui se trouvent de même absorbés par la coupelle. Les métaux qui donnent naissance à ces oxydes peuvent donc, comme le plomb, être séparés ainsi de l'or ou de l'argent auxquels ils étaient alliés. Ceux-ci restent, après l'opération, à l'état de pureté dans la coupelle.

On pratique la coupellation en petit pour Pessai des matières d'or et d'argent; mais c'est aussi un procédé qu'on suit en grand pour extraire l'argent de divers minerais. Nous ne considérons ici que ce dernier cas, nous proposant de parler plus tard de la coupellation comme moyen d'essai. Voy. ESSAIS.

Les matières qu'on soumet en grand à la coupellation pour en extraire l'argent ont diverses origines: elles proviennent, soit des minerais de plomb argentifère, soit des minerais de cuivre argentifère, soit enfin des minerais qui renferment tout à la fois du plomb, du cuivre et de l'argent.

Les minerais de la première classe sont d'abord traités comme minerais de plomb (voy. PLOMB), et la coupellation sert ensuite à séparer l'argent du plomb d'œuvre obtenu; les minerais de la seconde classe, qui contiennent du cuivre et de l'argent, sont traités ordinairement pour cuivre noir (voy. CUIVRE); et celui-ci, soumis à la liquation (voy. ce mot), fournit du plomb argentifère qu'on traite comme le précédent, par coupellation, pour en extraire l'argent. Quant aux minerais de la troisième classe, renfermant du cuivre et du plomb argentifères, on en retire, par un traitement préalable, du plomb d'œuvre et du cuivre noir, et ils donnent ainsi les mêmes produits que les précédents.

En résumé, comme on le voit, l'argent se trouve toujours concentré dans un alliage final, formé principalement par le plomb et accessoirement par quelques métaux étrangers, tels que le cuivre, le fer, etc., en petite quantité. Décrivons maintenant le traitement qu'on fait subir à cet alliage pour en extraire l'argent ce traitement est la coupellation.

Le plomb d'œuvre étant placé sur la sole du fourneau, on porte la température au rouge, et l'on projette le vent sur la masse fondue au moyen des soufflets qui débouchent sous le dôme. Le plomb s'oxyde en même temps que les métaux étrangers qui l'accompagnent, et, comme la température est encore peu élevée, ces oxydes se rassemblent à la surface en poudre noire qu'on retire du fourneau et qui, sous le nom d'abstrichs, est employée dans le traitement préliminaire du minerai. La température s'élevant, l'oxydation des métaux étrangers continue, et la litharge fondue se rassemble le long des parois du fourneau; on l'évacue au dehors par un trou de coulée pratiqué dans la sole du fourneau, et elle consti tue un produit utile de l'opération, soit qu'on la livre au commerce à l'état de litharge, soit qu'on la soumette à un traitement ultérieur pour en retirer le plomb. Cependant, l'alliage primitif, perdant ainsi le plomb et les métaux étrangers, devient de plus en plus riche en argent. Tant que le plomb s'oxyde, la chaleur produite par la combustion maintient la masse au rouge blanc, tandis que la sole du fourneau n'est qu'au rouge sombre; mais l'éclat de cette masse est voilé par la mince couche de litharge qui la recouvre et qui reproduit dans ces circonstances le phénomène connu de la lumière irisée. Mais dès que la litharge cesse de se former, la surface de l'argent apparaît tout à coup très-brillante, et ce phénomène qu'on désigne sous le nom d'éclair indique la fin de l'opération. On projette alors de l'eau froide sur la masse en fusion, et l'on retire le gâteau d'argent. Ordinairement, le plomb d'œuvre a une telle teneur en argent que, de

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