Page images
PDF
EPUB

quand il meut avec 1 degré de vitesse A, qui a 1 de masse, est la même que celle qui aurait mu A et B égaux avec de vitesse ; que par conséquent, lorsque A mu choque B en repos, il a la force nécessaire pour le pousser devant lui; de sorte qu'ils iront tous deux ensemble comme une seule masse, avec une vitesse qui sera; de là suivront, comme l'on sait, les règles du mouvement très géométriques. Il ne reste en tout ceci d'obscurité que dans l'idée précise de l'action de Dieu, qui ne doit pas être à notre portée.

III.

Les Newtoniens peuvent dire que, comme les corps ne se meuvent que par la volonté de Dieu, il est possible que par cette même volonté ils s'attirent mutuellement; mais la différence est extrême. Dans le premier cas, la volonté de Dieu ne fait que mettre en œuvre une propriété essentielle à la matière, sa mobilité, et déterminer au mouvement l'indifférence naturelle qu'elle a au repos ou au mouvement. Mais, dans le second cas, on ne voit point que les corps aient par euxmêmes aucune disposition à s'attirer la volonté de Dieu n'aurait aucun rapport à leur nature, et serait purement arbitraire, ce qui est fort contraire à tout ce que nous offre de toutes parts l'ordre de l'univers. Cet arbitraire admis ruinerait toute la preuve philosophique de la spiritualité de l'âme. Dieu aurait aussi bien pu donner la pensée à la matière que l'attraction.

IV.

Si l'on dit que l'attraction mutuelle est une propriété essentielle aux corps, quoique nous ne l'appercevions

pas, on en pourra dire autant des sympathies, des horreurs, de tout ce qui a fait l'opprobre de l'ancienne philosophie scolastique. Pour recevoir ces sortes de propriétés essentielles, mais qui ne tiendraient point aux essences telles que nous les connaissons, il faudrait être accablé de phénomènes qui fussent inexplicables sans leur secours, et encore même alors ce ne serait pas les expliquer.

V.

L'attraction étant supposée, quelles en seront les lois? J'entends bien qu'elle se réglera sur les masses; j'entends aussi qu'elle se réglera sur les distances. Un corps aura besoin d'une force attractive d'autant plus grande, que celui sur lequel il doit agir sera plus éloigné; et, ce qui en est une suite, il exercera d'autant mieux sa force, que ce second corps sera plus proche. De là s'ensuivra nécessairement que l'attraction se fera en raison inverse de la distance, ou, ce qui est le même, sera d'autant plus forte, que la distance sera plus petite; mais il s'ensuivra aussi que cette force sera infinie quand la distance sera nulle, ou que les deux corps se toucheront; ce qui ne paraît pas soutenable. Il y aurait alors entre deux corps qui se toucheraient, une cohésion que nulle force finie ne pourrait vaincre. Si deux corps allaient l'un vers l'autre, il serait toujours d'autant plus difficile de les faire retourner en arrière, qu'ils se seraient plus approchés l'un de l'autre, etc.; car on ne peut pas compter tous les inconvéniens qui naîtraient de cette règle ou loi de l'attraction. Ils auraient beau être enveloppés et déguisés par différentes circonstances physiques, il ne serait pas pos

sible qu'on ne les reconnût et qu'on ne les démêlât souvent; et comme la loi de l'attraction, selon les Newtoniens, n'est pas la simple raison inverse des distances, mais celle de leurs carrés, tous les inconvéniens en deviendraient encore beaucoup plus forts et plus marqués; la cohésion de deux corps qui se toucheraient, deviendrait d'autant plus invincible à toute force finie, etc. On le verra aisément, pour peu qu'on soit géomètre.

VI.

Quand on veut exprimer algébriquement ou géométriquement des forces physiques et agissantes dans l'univers, et qui ont nécessairement, par leur nature, de certains rapports, et sont renfermées dans certaines conditions, il ne suffit pas d'avoir bien fait un calcul dont le résultat sera infaillible, et sur lequel on sera sûr de pouvoir compter; il faut encore, pour contenter sa raison, entendre ce résultat, et savoir pourquoi il est venu tel qu'il est. Ainsi, dans la théorie précédente (8. 14.), on a trouvé, non-seulement que la force centrifuge renferme le carré de la vitesse, mais encore pourquoi elle le renferme nécessairement. Ici, je demande pourquoi l'attraction suit les carrés des distances plutôt que tout autre puissance? Je ne crois pas qu'il fût aisé de le dire.

VII.

Du moins est-il bien certain que cette loi des carrés ne suffirait pas pour expliquer plusieurs phénomènes de chimie si violens, que les plus hautes puissances de

l'attraction ne sembleraient qu'à peine y pouvoir atteindre. Cette loi des carrés n'est donc pas une loi générale de la nature.

VIII.

Les deux corps A et B, égaux en masse, s'attirent avec une force égale, si l'on n'y considère rien de plus : mais cela subsiste-t-il encore, si A, toujours de la même masse, a un plus grand volume que B? Il semble que la force de A soit plus dispersée; mais, d'un autre côté, elle embrassera mieux B, et avec quelque avantage.

IX.

Si A et B, égaux en masse et en volume, ne diffèrent qu'en ce que l'un est solide et l'autre fluide, ontils une force égale? ou quelle sera la différence de leurs attractions?

X.

Les corps A, B, et C, égaux, étant rangés sur la même ligne et avec des distances égales, l'action mutuelle des deux extrêmes A et C passe-t-elle au travers de B, ou y est-elle arrêtée ?

XI.

Mais une chose encore plus importante, c'est de savoir si, avec l'attraction, quelle qu'en soit la loi, on admettra aussi la force centrifuge? Un corps circulant sera attiré, ou vers le centre, ou vers la circonférence

du cercle qu'il décrit, et en même temps il tendra, par sa force centrifuge, à s'éloigner du centre. Cette force, dans le premier cas, diminue donc l'effet de l'attraction; et dans le second, elle l'augmente. L'un ou l'autre cas arrive perpétuellement, sans exception; et les effets toujours certainement altérés par la force centrifuge, le devraient être sensiblement, du moins en quelques occasions rares. Mais cela ne se rencontre jamais les effets de l'attraction sont toujours purs et sans mélange, à cet égard, dans le système newtonien, et par conséquent ce système est incompatible avec la force centrifuge. Cependant c'est une force bien réelle, bien démontrée, bien reconnue, même de ceux qui en reconnaissent encore quelques autres.

XII.

Malgré tout cela, dira-t-on, il est de fait que le système newtonien répond juste à tous les phénomènes. Comment est-il si heureux, s'il est faux? Je conviens qu'il répond juste aux phénomènes célestes; et il ne' laisse pourtant pas d'être faux. Ce paradoxe demande. une assez longue explication.

Les astronomes n'avaient point encore de règle gé-néralé pour la détermination des différentes distances des planètes au soleil, lorsque Képler conçut, en homme d'esprit et en grand philosophe, que, comme tout est lié dans la nature, ces distances inconnues pourraient bien avoir quelque rapport aux révolutions de ces mêmes planètes autour du soleil, dont les temps étaient bien certainement connus.

Il chercha ce rapport, et il trouva cette belle règle

[ocr errors]
« PreviousContinue »