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annuel. Il n'y a dans une supposition, comme dans un
marché, que ce qu'on y met. Je ne voulais alors expli
quer qu'un seul mouvement; et dans tout cet ouvrage,
une de mes plus grandes attentions a été de démêler
extrêmement les idées pour ne pas embarrasser l'esprit
des ignorans, qui étaient mes véritables marquises. Il
est vrai qu'un peu auparavant j'avais établi les deux mou-
vemens de la terre; mais je ne m'étais pas pour cela privé
du droit de les pouvoir séparer ensuite, quand la net-
teté de l'explication, ou l'ornement de la matière le
demanderaient. Cette supposition est d'autant plus par-
donnable, que je n'en ai tiré aucune conséquence phi-
losophique, ni que je prétendisse donner pour vraie ;
et c'est une chose que je crois avoir assez exactement
observée dans le mélange perpétuel de vrai et de faux,
qui compose ce petit livre. Quand j'ai voulu raisonner,
j'ai taché d'établir des principes solides. Quand il n'a été
question que de badiner, je n'y ai point regardé de si
près. Mais, que direz-vous, Monsieur, et que dirait
l'auteur de la lettre, si je soutenais que ma supposition
peut être exactement et philosophiquement vraie?
Mon spectateur suspendu en l'air serait enfermé dans
l'atmosphère; et il faut bien qu'il y soit pour être à por-
tée de voir les objets que je lui fais considérer. Or,
l'atmosphère enveloppe la terre, et ne l'abandonne ja-
mais. L'atmosphère suit le mouvement que la terre a
sur son axe, et en même temps elle suit la terre qui
tourne autour du soleil. Mon homme ne serait immo-
bile qu'à l'égard du mouvement par lequel l'atmosphère
tourne sur l'axe de la terre, mais non pas
à l'égard du
mouvement par lequel l'atmosphère et la terre, tout
ensemble, tournent autour du soleil. Ainsi, la terre ne

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se retirerait point de dessous lui, et différens peuples passeraient en vingt-quatre heures sous ses yeux. Je n'en ai pas voulu tant dire à la marquise, surtout dans les commencemens. Mais l'auteur ne doit pas être traité comme elle. Voilà, Monsieur, tout ce que j'ai à répondre à la principale, et, ce me semble, à l'unique objection de l'auteur; car, ce qu'il dit après cela ne me regarde point. Il demande ce que deviendrait le spectateur abandonné par la terre, et s'il tomberait dans le soleil? Je n'en sais en vérité rien, et il serait bon d'avoir sur ce sujet quelques expériences avant que d'en raisonner. A parler sérieusement, cela dépend du système de la pesanteur, non pas renfermé dans notre petit tourbillon de la terre, mais étendu au grand tourbillon qui comprend le soleil et toutes les planètes. Il y a bien de l'apparence que les planètes pèsent, à l'ẻgard du soleil, comme les corps terrestres à l'égard de la terre, et quelques philosophes modernes nous ont déjà ouvert de grandes vues sur cette matière. Mais à Dieu ne plaise que je m'y aille embarquer. L'auteur ne paraît pas bien convaincu que le soleil tourne sur son axe. Les astronomes croient pourtant avoir observé qu'il tourne en vingt-sept jours. On s'en est assuré par les taches; et d'ailleurs, il paraît inpossible, selon la mécanique, qu'un corps placé au centre d'un liquide qui tourne, se dispense de tourner sur lui-même.

FIN DES MONDES.

HISTOIRE

DES ORACLES.

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PRÉFACE.

Il y a long-temps qu'il me tomba entre les mains un livre latin sur les Oracles des Païens, composé depuis peu par Van-Dale, docteur en médecine, et imprimé en Hollande. Je trouvai que cet auteur détruisait, avec assez de force, ce que l'on croit communément des oracles rendus par les démons, et de leur cessation entière à la venue de Jésus-Christ; et tout l'ouvrage me parut plein d'une grande connaissance de l'antiquité, et d'une érudition très étendue. Il me vint en pensée de le traduire, afin que les femmes, et ceux même d'entre les hommes qui ne lisent pas volontiers du latin, ne fussent point privés d'une lecture si agréable et si utile. Mais je fis réflexion qu'une traduction de ce livre ne serait pas bonne pour l'effet que je prétendais. Van - Dale n'a écrit que pour les savans, et il a eu raison de négliger des agrémens dont ils ne feraient aucun cas. Il rapporte un grand nombre de passages qu'il cite très fidèlement, et dont il fait des versions d'une exactitude merveilleuse, lorsqu'il les prend du grec; il entre dans la discussion de beaucoup de points de critique, quelquefois peu nécessaires, mais toujours curieux. Voilà ce qu'il faut aux gens doctes. Qui leur égayerait tout cela par des réflexions, par des traits, ou de morale, ou même de plaisanterie, ce serait un soin dont ils n'auraient pas

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