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en d'autres termes, est un élément de l'infini. J'établis ensuite sur les rapports de l'infini avec l'absolu et le relatif, la distinction fondamentale des infinis relatifs et de l'infini absolu, des êtres et de l'Être, distinction qui explique l'analogie universelle, et qui sert de base à la théorie des ordres et des degrés de l'infini, envisagé au point de vue de la quantité et de la qualité.

Le second chapitre contient l'application de l'infini aux mathématiques, c'est-à-dire, l'analyse de l'infini sous le rapport de la quantité. J'esquisse l'histoire de l'infini dans les mathématiques, depuis Archimède jusqu'à Leibnitz. J'examine la nature, les propriétés, les ordres et le mode d'existence des quantités infinitésimales ou de l'infiniment petit, comme principe du calcul différentiel; je pose les règles générales de ce calcul; je retrace l'histoire philosophique de ses variations et de ses méthodes, depuis Leibnitz et Newton jusqu'à nos jours.

Le troisième chapitre contient l'application de l'infini aux divers ordres des êtres ou des essences, c'est-à-dire, l'analyse de l'infini sous le rapport de la qualité et de la perfection. Je distingue la perfection sous le mode du temps et de l'éternité, comme perfectibilité ou progrès, et comme subordination des essences. Je recherche le criterium ou la mesure de la perfection éternelle; j'expose les règles générales qui doivent nous guider dans son appréciation; et je les applique sommairement à la plante, à l'animal, à l'homme; à l'esprit, au corps et à la raison; au monde physique, au monde spirituel et à Dieu. J'examine ensuite la perfection sous le mode du temps, je pose la loi générale du développement des êtres, et je l'applique à l'histoire de l'humanité, et à la vie de chaque homme en particulier.

Le quatrième chapitre contient la combinaison de la quantité et de la qualité des infinis dans l'univers. Je démontre qu'il ne peut exister dans le monde, des êtres infiniment grands ou infiniment petits; qu'ainsi l'univers ne renferme que des choses finies, des esprits et des corps; mais que les esprits et les corps sont infinis en nombre, dans chaque genre et dans chaque espèce, et se développent dans l'infi

nité du temps et de l'espace, par une succession infinie de périodes déterminées de la vie; que l'univers enfin, dans son unité, présente la combinaison infinie des infinités d'infinités d'êtres et d'essences; qu'il est infini dans le temps, dans l'espace, dans la vie, dans la force; qu'il est un dans son essence, par conséquent éternel, immuable, nécessaire; mais que dans cette unité se développent à chaque instant de nouvelles formes ou des mondes nouveaux, par l'infinie combinaison des infinités d'essences; et je résous, à ce point de vue, la question de la création et celle de l'optimisme.

Le cinquième chapitre contient l'application de l'infini à la question de l'individualité. Je montre que les individus sont des êtres infiniment finis, ou déterminés sous tous les rapports, et qu'ils sont contenus, comme tels, dans un infini relatif supérieur, en tant qu'il se détermine intérieurement comme fini; qu'il existe ainsi un principe éternel d'individualité; que ce principe se manifeste particulièrement, dans la nature, par les êtres physiques; dans le monde spirituel, par les esprits particuliers, et dans la raison absolue, par les êtres raisonnables. J'en déduis ensuite une série de conséquences qui confirment quelques-unes des verités reconnues antérieurement dans l'analyse.

Ici commence la partie synthétique de la théorie de l'infini. La synthèse se fonde sur une analyse antérieure qui la justifie. L'analyse et la synthèse forment ainsi les deux parties complémentaires d'une seule et même méthode, qui doit conduire l'esprit humain, par une marche progressive, à la reconnaissance du principe absolu de toute science, et transformer la vérité en certitude. Toutes les vérités partielles observées dans l'analyse doivent trouver leur sanction suprême dans la synthèse. Tel est l'objet du dernier chapitre.

Le sixième chapitre contient, en outre, la doctrine de Dieu, comme infini absolu. Je démontre qu'il existe nécessairement un être absolument infini, qui n'embrasse en soi aucun élément fini, mais enveloppe essentiellement tous les ordres et tous les genres d'infinis relatifs. Je détermine succinctement la nature de l'Être, ses attributs fondamentaux,

et ses rapports avec le monde et les êtres finis. Ces rapports peuvent se réduire à trois points principaux : la supériorité infinie de l'infini absolu sur les infinis relatifs, de Dieu sur le monde; la contenance ou la détermination du monde en Dieu, des infinis relatifs dans l'infini absolu, qui est leur cause et leur raison; et l'unité ou l'identité d'essence entre la cause et l'effet, entre la raison et son contenu, entre Dieu et le monde. C'est le développement scientifique des formules de St.-Paul et de St.-Anselme, que j'ai prises pour épigraphe : Ex ipso et per ipsum et in ipso sunt omnia. Ex ipsa summa essentia et per ipsam et in ipsa sunt omnia.

Je crois de mon devoir de déclarer, en terminant, que j'ai profité dans cet écrit, des conseils qu'ont bien voulu me donner M. Ahrens, professeur de philosophie et de droit naturel, M. Meyer, professeur de mathématiques, et M. Guillery, professeur de chimie à l'université de Bruxelles. J'ai également mis à contribution les leçons de métaphysique données par M. Ahrens. Ce témoignage donnera une plus grande autorité à ma parole. J'en exprime à ces savants professeurs ma vive gratitude, et les prie d'agréer l'hommage de mon faible travail.

G. TIBERGHIEN.

THÉORIE DE L'INFINI

CHAPITRE PREMIER

DU FINI ET DE L'infini EN GÉNÉRAL

Sommaire.

1. Nous avons les notions du fini et de l'infini. 2. La notion de l'infini ne peut être résolue dans celle de l'indéfini. - 3. Le fini exprime un défaut de réalité. Il est une négation, non absolue, mais relative. Il n'existe pas de fini absolu. 4. L'infini est en lui-même tout ce qui est réel et positif. Il est l'affirmation de la réalité. Toute essence est infine. - 5. L'infini est une notion positive; le fini, une notion négative. L'infini est la totalité d'essence. Il est sans parties. — 6. L'origine de la notion du fini est dans les sens; celle de l'infini, dans la raison. — 7. L'infini est la raison et la cause du fini. Développement des idées de cause et de raison. Tout ce qui est fini a une raison infinie. 8. L'ordre chronologique du fini et de l'infini est le même que leur ordre logique. — 9. Il n'y a point de contradiction entre le témoignage de la raison et celui des sens. 10. L'infini n'a aucune forme particulière. 11. Il est immuable et identique. Conséquences relatives aux êtres finis. 12. L'infini est un. Unité d'essence et de nombre. Conséquences. 13. L'infini est pur et simple. Corps simples; idées simples. Immortalité de l'âme. — 14. L'infini est éternel. Toute essence est en dehors et au-dessus du temps. Infinité du temps. - 15. L'infini est parfait, sans développement, sans devenir. Chaque être est parfait en lui-même. 16. Le fonds de la vie est le bien. Toute essence est bonne. Le bien est un élément de l'infini; le mal résulte de la finité des êtres. — 17. L'infini est nécessaire ; le fini est possible. Toute essence est nécessaire et constitue une nécessité pour les êtres. Possibilité finie et infinie. 18. L'infini est absolu; le fini, relatif. Toute essence contient un principe absolu. - 19. Combinaison de l'infini avec l'absolu et le relatif. Infinis relatifs; infini absolu. 20. L'infini absolu possède d'une manière absolue tous les caractères de l'infini, que les infinis relatifs ne possèdent que d'une manière relative. Analogie universelle. 21. Éléments contenus dans tout infini relatif. 22. Distinction des infinis relatifs en ordres et en genres, d'après la quantité et la qualité.

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1. Toute conscience possède simultanément, avec une évidence plus ou moins grande, les notions du fini et de l'infini, comme idées irré

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