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In n'écoutera plus que la voix qui le preffe
De s'arracher à vos plaifirs.

Bientôt vous le vérrez, renonçant à lui-même,
Reprendre les liens dont il èft échappé ;
Toujours de l'intérêt d'un monarque qu'il aime,
Toujours de fa gloire occupé..

Allez, illuftre appui de fes vaftes provinces,
Allez, mais revenez, de leur amour épris,
Organe des décrèts du plus fage des princes,
Veiller fur fes peuples chéris.

C'est pour eux qu'autrefois, loin de votre patrie,
Confacré de bonne heure à de nobles travaux,
Vous fites admirer votre heureuse industrie

A fes plus illuftres rivaux.

La France vit briller votre zèle intrépide
Contre le feu naiffant de nos derniers débats.
Le Batave vous vit oppofer votre Egide
Au cruel démon des combats.

Vos voeux font fatisfaits. La difcorde et la guèrre
N'ôfent plus rallumer leurs tragiques flambeaux;
Et les Dieux appaifés rédonnent à la terre
Des jours plus fereins et plus beaux.
Ce Chef de tant d'états, à qui le Cièl difpenfe
Tant de riches tréfors, tant de fameux bienfaits,
A déjà de ces dieux reçu la récompenfe

De fa tendreffe pour la paix.

Il a vu naître enfin de fon épouse aimée
Un gage précieux de fa fécondité,

Et qui va deformais de l'Europe charmée
Affermir la tranquillité.

Arbitre tout-puiffant d'un Empire invincible,
Plus maître encore du coeur de fes fujets heureux,
Qu'a-t-il à defirer, qu'un ufage paisible

Des jours qu'il a reçus pour eux ?

Non, non: Il n'ira point, après tant de tempêtes
Reffufciter encore d'antiques differents;
Il fait trop que fouvent les plus belles conquêtes
Sont la perte des conquérants.

Si toutefois l'ardeur de fon noble courage
L'engageoit quelque jour au-delà de fes droits;
Ecoutez la leçon d'un Socrate fauvage,

Faite au plus puiffant de nos Rois.

Pour

Pour la troisième fois du fuperbe Vérfailles
11 fefoit aggrandir le parc délicieux :
Un peuple harraffé de ces vastes murailles
Creufoit le contour spacieux.

Un feul contre un vieux chêne appuyé, fans mot dire,
Sembloit à ce travail ne prendre aucune part.
A quoi rêves tu là, dit le Prince? Hélas, Sire,
Répond le champêtre vieillard,

Pardonnez. Je fongeois que de votre héritage
Vous avez beau vouloir élargir les confins:
Quand vous l'aggrandiriez trente fois davantage,
Vous aurez toujours des voifins.

S

ODE, TIRE'E DU PSEAUME XIV.

Caractère de l'Homme jufte.

EIGNEUR, dans ton temple adorable
Quel mortel eft digne d'entrer?
Qui pourra, grand Dieu, pénétrer
Ce fanctuaire impénétrable,

Où tes faints inclinés, d'un oeil refpectueux,
Contemplent de ton front l'éclat majestueux?
Ce fera celui qui du vice
Evite le fentier impur:

Qui marche d'un pas ferme et fur
Dans le chemin de la juftice;
Attentif et fidèle à diftinguer ta voix,
Intrépide et fêvère a maintenir tes loix.
Ce fera celui dont la bouche
Rend hommage à la vérité :
Qui fous un air d'humanité

Ne cache point un coeur farouche:
Et qui par des difcours faux et calomnieux,
Jamais à la vertu n'a fait baiffer les yeux.
Celui devant qui le fuperbe,
Enflé d'une vaine fplendeur,
Paroit plus bas dans fa grandeur
Que l'infecte caché fous l'herbe.

Qui bravant du mêchant le fafte couronné,

Honore la vertu du jufte infortuné,
Celui, dis je, dont les promeffes

Sont

Sont un gage toujours certain :
Celui qui d'un infame gain

Ne fait point groffir fes richeffes:
Celui qui fur les dons du coupable puiffant
N'a jamais décidé du fort de l'innocent.
Qui marchera dans cette voie,

Comblé d'un éternel bonheur
Un jour des élus du Seigneur,
Partagera la fainte joie :

Et les frémiffements de l'enfèr irrité
Ne pourront faire obftacle à sa felicité

ODE, TIRE'E DU PSEAUME XVIII.

Mouvements d'une áme qui s'élève à la connoiffance de Dieu par la contemplation de fes ouvrages.

L

ES cieux inftruifent la terre

A révérer leur Auteur.
Tout ce que leur globe enferre
Célébre un Dieu créateur.
Quel plus fublime cantique
Que ce concert magnifique
De tous les célestes corps !
Quelle grandeur infinie!
Quelle divine harmonie
Réfulte de leurs accords!
De fa puiffance immortelle
Tout parle, tout nous infruit,
Le jour au jour la révèle,
La nuit l'annonce à la nuit.
Ce grand et fuperbe ouvrage

N'èt point pour l'homme un langage
Obfcur et mystérieux :

Son admirable structure
Eft la voix de la nature,

Qui fe fait entendre aux yeux.
Dans une eclatante voute

Il a placé de fes mains

Ce foleil qui dans fa route
Eclaire tous les humains.

En

Environné de lumiere,

Cet aftre ouvre fa carière

Comme un époux glorieux,
Qui dès l'aube matinale
De fa couche nuptiale
Sort brillant et radieux.
L'univers à sa presence,
Semble fortir du néant.
Il prend fa course, il s'avancé
Comme un fuperbé géant.
Bientôt fa marche feconde
Embraffe le tour du monde
Dans le cercle qu'il décrit ;
Et par fa chaleur puiffante
La nature languiffante
Se ranime et fe nourrit.

Oh! que tes oeuvres font belles !
Grand Dieu, quels font tes bienfaits!

Que ceux qui te font fidèles

Sous ton joug trouvent d'attraits !
Ta crainte inspire la joie :
Elle affure notre voie;
Elle nous rend triomphants :
Elle éclaire la jeuneffe,
Et fait briller la fageffe
Dans les plus foibles enfants.
Soutiens ma foi chancelante,
Dieu puiffant: Inspire-moi
Cette crainte vigilante,
Qui fait pratiquer ta loi :
Loi fainte, loi defirable,
Ta richeffe èft préférable
A la richeffe de l'or;
Et ta douceur èft pareille
Au mièl dont la jeune abeille
Compofe fon chèr trèfor.
Mais fans tes clartés facrées,
Qui peut connoître, Seigneur,
Les foibleffes égarées
Dans les replis de fon coeur!
Prête-moi tes feux propices.
Viens m'aider à fuir les vices

Ꮓ Ꮓ

Qui

-Qui s'attachent à mes pas.
Viens confumer par ta flâme
Ceux que je vois dans mon âme,
Et ceux que je n'y vois pas.
Si de leur cruel empire
Tu veux dégager mes fens;
Si tu daignes me fourire,
Mes jours feront innocents.
J'irai puifer fur ta trace,
Dans les fources de ta grace;
Et de fes eaux abreuvé,
Ma gloire fera connoitre
Que le Dieu qui m'a fait naître,
Eft le Dieu qui m'a fauvé.

IDYLLES DE THE OCRITE.

IDYLLE VIII.

DAPHNIS, MENALque, un Berger.

MENALQUE fefoit paître fes brebis fur de hautes

montagnes, et y rencontra l'aimable Daphnis, qui gardoit auffi fon troupeau de boeufs. Ces deux Bergers étoient blonds: Tous deux à la fleur de l'âge: Tous deux habiles à chanter, et à jouer de la flute. Ménalque ap perçut le premier Daphnis, et lui parla ainfi :

Menalque.

Daphnis, Pafteur de troupeaux mugiffants, veux-tu difputer avec moi le prix du chant? Je t'avoue fincèrement qu'il ne me fera pas difficile de remporter la victoire. Daphnis lui répondit en ces termes :

Daphnis.

Ménalque, conducteur de brebis couvertes de riches toifons, favant joueur de fluite, tes chants, quels que foient tes efforts, ne l'emporteront point fur les miens!

Me.

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