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ARNOLPHE.

Non, c'est que je songeois. . . .

HORACE.

Cet entretien vous lasse;

Adieu : j'irai chez vous tantôt vous rendre grâce.

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Qui s'en feroit peut-être un sujet de colère.

ARNOLPHE, croyant qu'il revient encore.

Oh!....

Oh! que j'ai souffert durant cet entretien!
Jamais trouble d'esprit ne fut égal au mien.
Avec quelle imprudence, et quelle hâte extrême,
360 Il m'est venu conter cette affaire à moi-même!

Bien que mon autre nom le tienne dans l'erreur,
Étourdi montra-t-il jamais tant de fureur?
Mais ayant tant souffert, je devois me contraindre,
Jusques à m'éclaircir de ce que je dois craindre,
365 A pousser jusqu'au bout son caquet indiscret,
Et savoir pleinement leur commerce secret.

Tâchons à le rejoindre (1): il n'est pas loin, je pense,
Tirons-en de ce fait l'entière confidence.

Je tremble du malheur qui m'en peut arriver, 370 Et l'on cherche souvent plus qu'on ne veut trouver.

(1) Tâchons de le rejoindre.» (Éd. 1673, 1674, 1682.)

FIN DU PREMIER ACTE.

ACTE II.

SCÈNE PREMIÈRE.

ARNOLPHE.

Il m'est, lors que j'y pense, avantageux sans doute
D'avoir perdu mes pas, et pu manquer sa route;
Car enfin de mon cœur le trouble impérieux
N'eût pu se renfermer tout entier à ses yeux :
375 Il eût fait éclater l'ennui qui me dévore,

Et je ne voudrois pas qu'il sût ce qu'il ignore.
Mais je ne suis pas homme à gober le morceau,
Et laisser un champ libre aux vœux du damoiseau (1) :
J'en veux rompre le cours, et, sans tarder, apprendre
380 Jusqu'où l'intelligence entre eux a pu s'étendre.

[J'y prends, pour mon honneur, un notable intérêt : Je la regarde en femme, aux termes qu'elle en est; Elle n'a pu faillir, sans me couvrir de honte, Et tout ce qu'elle a fait (2) enfin est sur mon compte.] 385 Éloignement fatal! voyage malheureux!

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ARNOLPHE.

Paix. Venez çà tous deux.

Passez là; passez là. Venez là, venez, dis-je.

GEORGETTE.

Ah! vous me faites peur, et tout mon sang se fige.

ARNOLPHE.

C'est donc ainsi qu'absent vous m'avez obéi? 390 Et tous deux, de concert, vous m'avez donc trahi?

GEORGETTE.

Eh! ne me mangez pas, Monsieur, je vous conjure.

ALAIN, à part.

Quelque chien enragé l'a mordu, je m'assure.

ARNOLPHE.

Ouf! Je ne puis parler, tant je suis prévenu :
Je suffoque, et voudrois me pouvoir mettre nu.
395 Vous avez donc souffert, ô canaille maudite,

Qu'un homme soit venu...? Tu veux prendre la fuite?
Il faut que sur le champ. . . . Si tu bouges. ..! Je veux
Que vous me disiez.... Euh! Oui, je veux que tous deux....
Quiconque remuera, par la mort! je l'assomme.

400 Comme est-ce que chez moi s'est introduit cet homme?
Eh! parlez, dépêchez, vite, promptement, tôt,

Sans rêver. Veut-on dire?

ALAIN et GEORGETTE.

Ah! ah!

Je meurs.

GEORGETTE.

ALAIN.

Le cœur me faut.

ARNOLPHE.

Je suis en eau prenons un peu d'haleine; Il faut que je m'évente, et que je me promène. 405 Aurois-je deviné, quand je l'ai vu petit,

Qu'il croîtroit pour cela? Ciel! cela? Ciel! que mon cœur pâtit! Je pense qu'il vaut mieux que de sa propre bouche Je tire avec douceur l'affaire qui me touche. Tâchons à modérer notre ressentiment : 410 Patience, mon cœur, doucement, doucement.

Levez-vous, et rentrant, faites qu'Agnès descende. Arrêtez. Sa surprise en deviendroit moins grande : Du chagrin qui me trouble ils iroient l'avertir, Et moi-même je veux l'aller faire sortir. 415 Que l'on m'attende ici.

SCÈNE III.

ALAIN, GEORGETTE.

Ses regards m'ont fait

GEORGETTE.

Mon Dieu! qu'il est terrible! peur, mais une peur horrible;

Et jamais je ne vis un plus hideux chrétien.

ALAIN.

Ce Monsieur l'a fâché, je te le disois bien.

GEORGETTE.

Mais que diantre est-ce là, qu'avec tant de rudesse

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