L'art poétique: épitres, odes, poésies diverses, épigrammes

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Librairie de la Bibliothèque Nationale, 1901 - Poetry - 158 pages
 

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Page 9 - J'aime mieux un ruisseau qui, sur la molle arène, Dans un pré plein de fleurs lentement se promène, Qu'un torrent débordé, qui d'un cours orageux, Roule, plein de gravier, sur un terrain fangeux, Hâtez-vous lentement, et, sans perdre courage, Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage. Polissez-le sans cesse et le repolissez : Ajoutez quelquefois, et souvent effacez.
Page 8 - Surtout qu'en vos écrits la langue révérée Dans vos plus grands excès vous soit toujours sacrée. En vain vous me frappez d'un son mélodieux, Si le terme est impropre , ou le tour vicieux : Mon esprit n'admet point un pompeux barbarisme, Ni d'un vers ampoulé l'orgueilleux solécisme. Sans la langue, en un mot, l'auteur le plus divin Est toujours., quoi qu'il fasse, un méchant écrivain.
Page 25 - C'est donc bien vainement que nos auteurs déçus, Bannissant de leurs vers ces ornements reçus, Pensent faire agir Dieu, ses saints et ses prophètes, Comme ces dieux éclos du cerveau des poètes ; Mettent à chaque pas le lecteur en enfer, N'offrent rien qu'Astaroth, Belzébuth, Lucifer. De la foi d'un chrétien les mystères terribles D'ornements égayés ne sont point susceptibles.
Page 8 - Enfin Malherbe vint ; et, le premier en France, Fit sentir dans les vers une juste cadence, D'un mot mis en sa place enseigna le pouvoir, Et réduisit la muse aux règles du devoir. Par ce sage écrivain la langue réparée N'offrit plus rien de rude à l'oreille épurée. Les stances avec grâce apprirent à tomber; Et le vers sur le vers n'osa plus enjamber.
Page 5 - Un style trop égal et toujours uniforme En vain brille à nos yeux, il faut qu'il nous endorme. On lit peu ces auteurs, nés pour nous ennuyer, Qui toujours sur un ton semblent psalmodier. Heureux qui, dans ses vers, sait, d'une voix légère, Passer du grave au doux, du plaisant au sévère!
Page 77 - Et son trop de lumière, importunant les yeux, De ses propres amis lui fait des envieux. La mort seule ici-bas , en terminant sa vie , Peut calmer sur son nom...
Page 8 - Marchez donc sur ses pas; aimez sa pureté, Et de son tour heureux imitez la clarté. . Si le sens de vos vers tarde à se faire entendre , Mon esprit aussitôt commence à se détendre; Et, de vos vains discours prompt à se détacher, Ne suit point un auteur qu'il faut toujours chercher.
Page 22 - Bientôt l'amour, fertile en tendres sentiments, S'empara du théâtre ainsi que des romans. De cette passion la sensible peinture Est pour aller au cœur la route la plus sûre.
Page 5 - Un auteur quelquefois, trop plein de son objet, Jamais sans l'épuiser n'abandonne un sujet. S'il rencontre un palais, il m'en dépeint la face ; II me promène après de terrasse en terrasse; Ici s'offre un perron; là règne un corridor; Là ce balcon s'enferme en un balustre d'or. II compte des plafonds les ronds et les ovales. Ce ne sont que festons, ce ne sont qu'astragales *. Je saute vingt feuillets pour en trouver la fin.
Page 87 - Tout charme en un enfant dont la langue sans fard , A peine du filet encor débarrassée , Sait d'un air innocent bégayer sa pensée. Le faux est toujours fade, ennuyeux, languissant; Mais la nature est vraie , et d'abord on la sent : C'est elle seule en tout qu'on admire et qu'on aime. Un esprit né chagrin plaît par son chagrin même. Chacun pris dans son air est agréable en soi : Ce n'est que l'air d'autrui qui peut déplaire en moi.

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