Jeanne d'Arc, ou La fille du peuple au XVe siècle: drame, histoire et critique

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J. Claye, 1869 - 291 pages
 

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Page 233 - Oui , Sire, c'est le choix de la nation qui mit d'abord le sceptre entre les mains de vos ancêtres; c'est elle qui les éleva sur le bouclier militaire, et les proclama souverains. Le royaume devint ensuite l'héritage de leurs successeurs ; mais ils le durent originairement au consentement libre des sujets.
Page 237 - Jeanne s'avança vers lui et lui embrassa les genoux, en « pleurant à chaudes larmes » : ., Gentil roi, lui dit-elle, ores est exécuté le plaisir de Dieu, qui vouloit que vous vinssiez à Reims recevoir votre digne sacre, en montrant que vous êtes vrai roi, et celui auquel le royaume doit appartenir ! » Des acclamations entrecoupées de pleurs sympathiques firent retentir de toutes parts les voûtes de la cathédrale.
Page 243 - Méchants, vous ne me diriez donc pas qu'on répandit le sang de France! » Ce mot qui va au cœur, c'est la première fois qu'on le dit. Pour la première fois, on le sent, la France est aimée comme une personne. Et elle devient telle, du jour qu'elle est aimée. C'était jusque-là une réunion de provinces, un vaste chaos de fiefs, grand pays, d'idée vague. Mais, dès ce jour, par la force du cœur, elle est une Patrie. Beau mystère 1 touchant, sublime!
Page 244 - Elle aimait ses amies, ses parents, mais surtout les pauvres.... Or, le pauvre des pauvres , la plus misérable personne et la plus digne de pitié , en ce moment , c'était la France. Elle aima tant la France!... Et la France touchée, se mit à s'aimer elle-même. On le voit dès le premier jour qu'elle paraît devant Orléans. Tout le peuple oublie son péril ; cette ravissante image de la Patrie , vue pour la première fois , le saisit et l'entraîne ; il sort hardiment hors des murs, il déploie...
Page 233 - ... bouclier militaire, et les proclama souverains. Le royaume devint ensuite l'héritage de leurs successeurs; mais ils le durent originairement au consentement libre des sujets. Leur naissance seule les mit ensuite en possession du trône ; mais ce furent les suffrages publics qui attachèrent d'abord ce droit et cette prérogative à leur naissance. En un mot , comme la première source de leur autorité vient de nous, les rois n'en doivent faire usage que pour nous.
Page 175 - ... comme sont souvent les princes dans le malheur ; n'imputant ses misères à personne , sans méfiance, se faisant aimer de tous; chéri de ses serviteurs, leur pardonnant les torts qu'ils avaient envers lui , et se laissant offenser sans prendre de haine ni de rancune. Aussi, quand les princes et les grands seigneurs le quittaient, ou même s'armaient contre lui dans sa détresse, les simples gentilshommes et le peuple s'empressaient à le vouloir défendre; ils arrivaient du fond des provinces,...
Page 244 - Michelet a dit de Jeanne d'Arc : « Elle aima tant la France ! ... Et la France, touchée, se mit à s'aimer elle-même. » Cette France qui s'aime elle-même, et qui s'est unie pour se sauver, demain, de 15 heures à 16 heures, l'ennemi la verra luire dans vos yeux. Et l'ennemi baissera la tête. Car cette flamme, qui ne vacillera pas dans nos regards, c'est l'âme de la patrie vivante. Et cela, cela c'est pour toujours.
Page 233 - Ce n'est donc pas le souverain, c'est la loi, sire, qui doit régner sur les peuples : vous n'en êtes que le ministre et le premier dépositaire ; c'est elle qui doit régler l'usage de l'autorité, et c'est par elle que l'autorité n'est plus un joug pour les sujets, mais une règle qui les conduit, un secours qui les protège, une vigilance paternelle qui ne s'assure leur soumission que parce qu'elle s'assure leur tendresse.
Page 189 - Talbol, qui semble avoir cent bras pour donner l'assaut au ciel; de ce Salisbury, profanateur du temple, et de tous ces arrogants insulaires; elle en triomphera comme elle chasse devant elle un troupeau de moutons. Le Seigneur, le Dieu des batailles sera avec elle; il choisira une créature tremblante; il se glorifiera par un faible jeune fille, car il est le Dieu tout-puissant.
Page 243 - Elle vivait au cœur d'une femme. Tout le fond de ce cœur est dans ces mots naïfs, d'accent profond : « La Pitié qu'il y avoit au royaume de France! » « Je n'ai jamais vu sang de François que mes cheveux ne levassent. » Et encore (n'ayant pas été avertie d'une bataille) : « Méchants, vous ne me diriez donc pas qu'on répandit le sang de France!

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