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tout ce que ces philosophes avaient jamais fait de plus grand. Dans toutes les lettres que lui écrit saint Basile, on voit l'estime singulière qu'il faisait de ses ouvrages, et la tendresse qu'il avait pour sa personne. Il lui adressait tous les jeunes gens de Cappadoce qui avaient dessein de s'avancer dans l'éloquence, comme au plus habile maître de rhétorique qui fût alors; et ils en étaient reçus avec une distinction particulière. A l'occasion de l'un de ces jeunes gens, qui était mal partagé du côté des biens de la fortune, Libanius dit une chose qui doit lui faire beaucoup d'honneur : c'est qu'il ne considérait point dans ses disciples les richesses, mais la bonne volonté; que, s'il trouvait un jeune homme pauvre qui montrât un grand desir d'apprendre, il le préférait sans hésiter à tous les plus riches; et qu'il était fort content lorsque ceux qui ne pouvaient rien donner étaient avides de recevoir 1. Il ajoute qu'il n'avait pas eu le bonheur de rencontrer de tels maîtres. En effet, le désintéressement n'était pas la vertu des sophistes. Ceux qui sont chargés de la profession d'enseigner savent qu'ordinairement le fonds le plus fertile en mérite est la pauvreté.

Il écrit à Thémistius, célèbre sophiste, que ses talents et sa sagesse élevèrent aux premières charges de l'état, d'une manière qui montre que Libanius avait de la noblesse de sentiment, et qu'il était touché de l'amour du bien public. « Je ne vous félicite point, lui « dit-il, sur ce que le gouvernement de la ville vous a « été donné; mais je félicite la ville sur le choix qu'elle << a fait de votre personne pour cette importante place.

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« Vous n'avez pas besoin de nouvelles dignités; mais <«< elle a grand besoin d'avoir un gouverneur tel que

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Il serait à souhaiter que Libanius eût été aussi irrépréhensible pour les mœurs qu'estimable pour son caractère d'esprit et pour son éloquence. On lui a reproché aussi d'être trop plein d'estime pour lui-même, et trop grand admirateur de ses propres ouvrages. Cela doit moins étonner. On pourrait presque dire que vanité était la vertu du paganisme.

la

Libanius passa les trente-cinq dernières années de sa vie à Antioche, depuis l'an 354 jusque vers 390, et y professa la rhétorique avec un grand succès. Le christianisme lui fournit encore dans cette ville un illustre disciple en la personne de saint Jean Chrysostôme. Sa mère, qui n'épargnait rien pour le bien élever, l'envoya à l'école de Libanius, le plus habile et le plus renommé des sophistes qui enseignaient alors à Antioche, pour s'y former à l'éloquence sous un si excellent maître. Ses ouvrages, qui l'ont fait appeler bouche d'or, attestent le progrès qu'il y fit. Il fréquenta d'abord Isid. Pelus. le barreau, plaida quelques causes, et fit des déclama1. 2, ep. 42. tions publiques. Il en envoya une à Libanius, qui était

cap. 2.

un éloge des empereurs; et Libanius, en l'en remerciant, lui dit que lui et plusieurs personnes de lettres Sozom. 1. 8, à qui il l'avait fait voir l'avaient admirée. On assure que, quelques amis demandant à ce sophiste, qui était près de mourir, qui il voulait avoir pour successeur de sa chaire, il répondit qu'il eût choisi notre saint, si les chrétiens ne le lui eussent enlevé : mais son écolier avait bien d'autres vues.

S'il faut juger du maître par ses élèves, et de son

mérite par leur réputation, les deux disciples de Libanius que je viens de citer, quand ils seraient les seuls, devraient lui faire un grand honneur. En effet, il passait dans l'esprit de tout le monde pour un excellent orateur. Eunape dit que tous ses termes sont choisis Eunap. c. 14. et élégants, et que tout ce qu'il a écrit a une douceur

et un agrément qui attirent, avec une gaîté et une espèce d'enjouement qui lui servent de sel.

Libanius a laissé une infinité d'écrits, qui consistent en panégyriques, en déclamations et en lettres. De tous ses ouvrages, les lettres ont toujours été le plus

estimées.

FIN DU TOME DIXIÈME.

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DES GRECS, DES PERSES, DES MACÉDONIENS, ETC.

SUITE

DU LIVRE VINGT-QUATRIÈME.

DES SCIENCES ET DES ARTS.

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