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Jutte improvisée de plusieurs mois, la France a déposé les armes, elle a eu le droit de dire une tout est perdu fors l'honneur! » Très-bien très-bien !)

seconde fois (Mouvement.

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(Assemblée nationale, séance du 27 mai 1872.)

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Il est une institution qui permettra aux peuples de désarmer, et garantira, prochainement, nous l'espérons, - la paix publique, c'est la confédération, avec constitution d'un tribunal international, juge souverain des contestations qui pourront survenir entre les associés.

Cette idée n'est pas d'aujourd'hui; elle date de l'antiquité. Nous en trouvons un germe dans la confédération des divers Etats de la Grèce ancienne, qui instituèrent le conseil des amphictyons, ou même dans la ligue achéenne, entre les villes du Péloponèse. Nous en voyons, en ce siècle, des ébauches dans les confédérations de Suisse, d'Allemagne et des Etats-Unis. Henri IV, - ou Sully, a entrevu l'idéal; l'exilé de Sainte-Hélène lui-même, eut, sur son rocher, quelque perspective analogue, mais toujours en y imprimant le cachet de son moi dominateur. L'empereur Alexandre Ier de Russie était travaillé d'un ardent désir d'établir un Congrès des

Nations pour empêcher le recours aux armes (1). Le sage roi des Belges, Léopold Ier, avait la même pensée. De généreux auteurs, tels qu'Emery de La Croix, en 1623, sir Wiliam-Temple, l'abbé de SaintPierre, Penn, Fénelon, J.-J. Rousseau, Franklin, C. Desmoulins, Kant, J. Bentham, etc., etc., ont pressenti les bases du problème qui préoccupe un grand nombre de contemporains éminents, et dont la solution s'imposera un jour à tous les esprits. Déjà, Richard Cobden parvint à faire adopter à lord Palmerston ses vues sur la création d'un tribunal d'arbitrage international.

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Les ennemis de la paix, tous ceux qui espèrent pêcher dans l'eau trouble de la guerre, — et malheureusement, ils sont encore trop nombreux, se sont efforcés, par eux-mêmes ou par leurs satellites, de dépopulariser cette idée à la fois si grande et si simple, en déversant le ridicule sur elle et sur ses partisans. Mais cette arme est déjà émoussée. Le monde, pour tout œil impartial, marche, à pas plus ou moins lents, vers l'association. Les sociétés politiques tendent, quoi qu'on dise et quoi qu'on fasse,

(1) Lire dans l'Etude historique sur les arbitrages dans les conflits internationaux, par M. H. Bellaire, un détail trèsglorieux pour ce prince.

à sortir de l'état de nature, compliqué de civilisation, qui les place, dans leurs rapports réciproques, mille fois au-dessous des bêtes féroces; car celles-ci, nonseulement, ne s'entre-dévorent pas elles-mêmes, mais ne se battent guère qu'individuellement et au premier sang; elles ne se battent jamais sans cause et sans but appréciables, comme le font les hommes, par pur amour de l'art stratégique.

Les Etats qui se piquent de civilisation à l'intérieur, finiront par être logiques et conséquents avec euxmêmes; ils renonceront à la barbarie les uns à l'égard des autres. C'est la tendance palpable de l'humanité, qu'il faut constater en dépit des plus sanglants démentis. J'en atteste de récents errements

plus ou moins solennellement inaugurés à Paris, à Londres, à Genève..., qui ont eu la gloire de montrer << où est le danger, où est le salut, >>> et qui ont prévenu de terribles conflagrations. J'en atteste aussi un progrès effectif dans la voie de l'entente et du contrat social appliqué aux Etats : je veux dire le concert des principales nations européennes, pour exercer sur les mers une surveillance génerale et commune destinée à empêcher la traite des noirs. << Pourquoi n'y aurait-il pas une police internationale, comme il y a une police municipale et une police nationale? Pourquoi serait-il plus permis

de troubler celle-là que celles-ci? » (F. Passy.) Déjà les nations ont bien adopté une première police commune, en faisant des traités d'extradition.

Ne cessons de le proclamer: l'association fait un pas, élargit son cercle et franchit une barrière à chaque étape de la civilisation, dont elle est, par ses progrès, une sorte de thermomètre. L'homme, né sociable, et ne pouvant vivre que de société, a commencé par s'associer à son semblable pour fonder la famille; les familles se sont ensuite réunies en tribus, les tribus se sont elles-mêmes agglomérées en nations, réunissant graduellement les communes et les provinces. Pourquoi l'humanité ne gravirait-elle pas le dernier échelon? Pourquoi, s'arrêtant dans le développement de ce génie sociable, reculerait-elle devant la conséquence et la conclusion de son principe vital, devant la confédération des nations elles-mêmes?

<< Evoquerons-nous, aujourd'hui, des fantômes de Guyenne, de Normandie, de Bourgogne, de Champagne, de Franche-Comté? A Dieu ne plaise! Une même âme, une même vie, un même souffle parcourt aujourd'hui la France entière. Mais si la conscience de ce pays, dans la suite de son histoire, s'est élevée, par degré, de la commune à la province, de la province à la France, cette progression ne doit pas s'arrêter à ces termes. En effet, toute belle

qu'elle est, toute resplendissante qu'elle est dans la famille des peuples, la France n'est pourtant qu'une province de l'humanité. » (Edgar Quinet.)

Non, la guerre, peu à peu vaincue et paralysée à tant de degrés successifs de la progression humaine, et déjà battue en brèche dans son dernier retranchement, ne peut pas être éternelle.

M. Michel Chevalier, à la réunion, en 1869, de la Société des Amis de la Paix, après avoir exalté les merveilles accomplies par les Américains, grâce à la paix et à la liberté (1), recommandait chaudement la fondation, en Europe, d'institutions analogues à celles des Etats-Unis, et, par exemple, d'un congrès européen, d'une diète internationale. Il réclamait l'abolition de l'écrasant fardeau du régime guerrier, sous le poids duquel l'Europe, promptement déchue, verrait fatalement succomber les institutions libérales et la civilisation.

<<< Les diplomates sont venus à leur tour, dit M. F. Passy, et ils ont commencé à formuler des vœux et à rédiger des articles en faveur de l'arbitrage international; ils ont fait plus, ils y ont eu recours. Si bien que cet arbitrage, dont on continue à rire

(1) En 70 ans, leur richesse collective, qui ne représentait pas le dixième de la nôtre en 1789, s'est accrue à ce point qu'elle est, en 1861, égale à celle de la France, sinon supérieure.

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