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SOSIE.

Il ne m'importe guére,

Tant pis pour toi.

CLEAN THIS.

Là, là, revien,

SOSIE.

Non, morbleu. Je n'en ferai rien ;
Et je veux être, à mon tour, en colére.
CLEAN THIS.

Va, va, traître, laiffe-moi faire ;

On fe laffe, par fois, d'être femme de bien.

Fin du fecond acte.

ACTE III.

SCENE PREMIERE.

AMPHITRYON.

UI, fans doute, le fort tout exprès me le ca

che ;

Et, des tours que je fais, à la fin, je fuis las.
Il n'eft point de deftin plus cruel, que je fache.
Je ne faurois trouver, portant par tout mes pas,
Celui qu'à chercher je m'attache;
Et je trouve tous ceux que je ne cherche pas.
Mille fâcheux cruels, qui ne penfent pas l'être,
De nos faits avec moi, fans beaucoup me connoître,
Viennent fe réjouir pour me faire enrager.
Dans l'embarras cruel du fouci qui me blesse,
De leurs embraffemens, & de leur allégreffe,
Sur mon inquiétude ils viennent tous charger.

En vain à paffer je m'apprête,
Pour fuir leurs perfécutions,

Leur tuante amitié de tous côtés m'arrête ;
Et, tandis qu'à l'ardeur de leurs expreffions,
Je répons d'un gefte de tête,

Je leur donne, tout bas, cent malédictions.
Ah! Qu'on eft peu flatté de louange & d'honneur,
Et de tout ce que donne une grande victoire,

Lorfque, dans l'ame, on fouffre une vive douleur, e l'on donneroit volontiers cette gloire

Et que!

Pour avoir le repos du cœur !
Ma jaloufie, à tout propos,
Me proméne fur ma difgrace;
Et plus mon efprit y repaffe,

Moins j'en puis débrouiller le funefte cahos.
Le vol des diamans n'eft pas ce qui m'étonne,
On leve les cachets, qu'on ne l'apperçoit pas ;
Mais le don qu'on veut qu'hier j'en vins faire en per
fonne,

Eft ce qui fait ici mon cruel embarras.

La nature par fois produit des reffemblances,
Dont quelques impofteurs ont pris droit d'abuser;
Mais il eft hors de fens que, fous ces apparences,
Un homme pour époux fe puiffe fuppofer;

Et, dans tous ces rapports, font mille différences,
Dont fe peut une femme aifément aviser.

Des charmes de la Theffalie

On vante de tout temps les merveilleux effets ;
Mais les contes fameux qui par tout en font faits,
Dans mon efprit toujours ont paffé pour folie;
Et ce feroit du fort une étrange rigueur,

Qu'au fortir d'une ample victoire,

Je fuffe contraint de les croire,

Aux dépens de mon propre honneur.
Je veux la retâter fur ce fâcheux myftére,
Et voir fi ce n'eft point une vaine chimére,
Qui, fur fes fens troublés, ait fû prendre crédit.
Ah! Faffe le ciel équitable,

Que ce penfer foit véritable;

Et que, pour mon bonheur, elle ait perdu l'esprit !

SCENE I I.

MERCURE, AMPHITRYON. * MERCURE fur le balcon de la maison d' Amphitryon fans être vu, ni entendu par Amphitryon. Omme l'amour ici ne m'offre aucun plaifir,

Comm

Je m'en veux faire au moins qui foient d'autre nature;

Et je vais égayer mon férieux loifír

A mettre Amphitryon hors de toute mesure.
Cela n'eft pas d'un Dieu bien plein de charité;
Mais auffi ce n'eft pas ce dont je m'inquiéte;
Et je me fens, par ma planette,
A la malice un peu porté.
AMPHITRYON.

D'où vient donc qu'à cette heure on ferme cette porte?

MERCURE.

Holà, tout doucement. Qui frappe?

AMPHITRY ON fans voir Mercure.

Moi.

MERCURE.

Qui, moi ?

AMPHITRY ON appercevant Mercure qu'il prend pour Sofie

Ah! Ouvre.

MERCURE.

Comment, ouvre? Et qui donc es-tu toi, Qui fais tant de vacarme, & parles de la forte?

AMPHITRYON.

Quoi! Tu ne me connois pas ?
MERCURE.

Non

Et n'en ai pas la moindre envie.
AMPHITRYON à part.

Tout le monde perd-il aujourd'hui la raifon?
Eft-ce un mal répandu? Sofie, holà, Sofie.
MERCURE.

Hé bien, Sofie, oui, c'est mon nom
As-tu peur que je ne l'oublie ?
AMPHITRYON.

Me vois-tu bien ?

MERCURE.

Fort bien. Qui peut pouffer ton bras A faire une rumeur fi grande ?

Et

que demandes-tu là bas?
AMPHITRYON.

Moi, pendard, ce que je demande ?
MERCURE.

Que ne demandes-tu donc pas ?
Parle, fi tu veux qu'on t'entende.
AMPHITRYON.

Attens, traître. Avec un bâton
Je vais là haut me faire entendre;
Et, de bonne façon, t'apprendre
A m'ofer parler fur ce ton.
MERCURE.

Tout beau. Si pour heurter tu fais la moindre in ftance,

Je t'envoyerai d'ici des meffagers fâcheux.

AMPHITRYON.

O ciel! Vit-on jamais une telle infolence?
La peut-on concevoir d'un ferviteur, d'un gueux ?
MERCURE.

Hé bien ? Qu'est-ce ? M'as-tu tout parcouru par or dre?

M'as-tu de tes gros yeux affez confidéré ?
Comme il les écarquille, & paroît effaré !

Si, des regards, on pouvoit mordre,
Il m'auroit déjà déchiré.
AMPHITRYON.
Moi-même je frémis de ce que tu t'apprêtes

Avec ces impudens propos.

Que tu groffis pour toi d'effroyables tempêtes!
Quels orages de coups vont fondre sur ton dos!
MERCUR E.

L'ami, fi, de ces lieux, tu ne veux difparoître,
Tu pourras y gagner quelque contufion.
AMPHITRYON.

Ah! Tu fauras, maraud, à ta confusion,
Ce que c'eft qu'un valet qui s'attaque à fon maître,
MERCURE.

Toi, mon maître ?

AMPHITRYON.

Oui, coquin. M'ofes-tu méconnoître ?
MERCURE.

Je n'en reconnois point d'autre qu'Amphitryon.
AMPHITRYON.

Et cet Amphitryon, qui, hors moi, le peut être ?
MERCURE.

AMPHITRYON.
Sans doute.

Amphitryon?

Ah! Quelle vifion!

MERCURE.

Dis-nous un peu. Quel eft le cabaret honnête,
Où tu t'es coëffé le cerveau ?
AMPHITRYON.

Comment! Encore?

MERCURE.

Etoit-ce un vin à faire fête?

AMPHITRYON.

Ciel !

MERCURE.

Etoit-il vieux, ou nouveau?

AMPHITRYON.

Que de coups !

MERCURE.

Le nouveau donne fort dans la tête, Quand on le veut boire fans eau.

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