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Garde-toi bien de fuivre ce tranfport.
CLEAN THIS.-

Si je puis une fois pourtant
Sur mon efprit gagner la chofe...
SOSIE.

Fais à ce difcours quelque' paufe,
Amphitryon revient, qui me paroît content.

SCENE I V.

JUPITER, CLEANTHIS, SOSIE.

JUPITER à part

E viens prendre le temps de rappaiser Alcméne,

JDe bannir les chagrins que fon cœur veut garder;
Et donner à mes feux, dans ce foin qui m'amène,
Le doux plaifir de fe raccommoder.
(à Cléanthis.)`

Alcméne eft là haut, n'eft-ce pas ?
CLEAN THIS.

Oui, pleine d'une inquiétude,
Qui cherche de la folitude;

Et qui m'a défendu d'accompagner fes pas.

JUPITER.

Quelque défenfe qu'elle ait faite
Elle ne fera pas pour moi.

Tome

SCENE V.

CLEANTHIS, SOSIE.

CLEAN THIS.

S

On chagrin, à ce que je voi,
A fait une prompte retraite.

SOSIE.

Que dis-tu, Cléanthis, de ce joyeux maintien,
Après fon fracas effroyable?

CLEAN THIS.

Que, fi toutes nous faifions bien,
Nous donnerions tous les hommes au diable;
Et que le meilleur n'en vaut rien.

SOSIE.

Cela fe dit dans le courroux.

Mais, aux hommes, par trop vous étes accrochées;
Et vous feriez, ma foi, toutes bien empêchées,
Si le diable les prenoit tous.

CLEAN THIS.

Vraiment...

SOSIE.

Les voici. Taifons-nous.

SCENE V I.

JUPITER, ALCMENE, CLEANTHIS, SOSIE.

JUPITER.

V Hélas! Arrêtez, belle Alcméne.

Oulez-vous me défespérer ?

AL CMEN E.

Non, avec l'auteur de ma peine,
Je ne puis du tout demeurer.

JUPITER.

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JUPITER bas à part.

Ses pleurs touchent mon ame,& fa douleur m'afflige.

(haut.)

Souffrez que mon cœur...

ALCMENE.

Non, ne fuivez point mes pas.

JUPITER.

Où voulez-vous aller ?

ALCMEN E.

Où vous ne ferez pas.

JUPITER.

Ce vous eft une attente vaine.

Je tiens à vos beautés par un nœud trop ferré,
Pour pouvoir un moment en être féparé.

Je vous fuivrai par tout, Alcméne.

AL CMENE.

Et moi, par tout je vous fuirai.
JUPITER.

Je fuis donc bien épouvantable?
AL CMEN E.

Plus qu'on ne peut dire, à mes yeux..
Oui, je vous vois comme un monftre effroyable,
Un monftre cruel, furieux,

Et dont l'approche eft redoutable; Comme un monftre à fuir en tous lieux. Mon cœur fouffre, à vous voir, une peineincroya

ble

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C'eft un fupplice qui m'accable;
Et je ne vois rien fous les cieux,
D'affreux, d'horrible, d'odieux,
Qui ne me fût plus que vous fupportable,.
JUPITER.

En voilà bien, hélas ! que votre bouche.dit.
ALCMEN E.

J'en ai dans le cœur davantage;

Et, pour l'exprimer tout, ce cœur a du dépit
De ne point trouver de langage.
JUPITER.

Hé! Que vous a donc fait ma flamme,

Pour me pouvoir, Alcméne, en monftre regarder ?
ALCMEN E.

Ah, jufte ciel ! Cela fe peut-il demander
Et n'eft-ce pas pour mettre à bout une ame ?
JUPITER.

Ah! D'un efprit plus adouci....
AL CMENE.

Non, je ne veux, du tout, vous voir, ni vous entendre.

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Avez-vous bien le cœur de me traiter ainfi ?
Eft-ce là cet amour fi tendre

Qui devoit tant durer quand je vins hier ici 2

AL CMENE.

Non, non, ce ne l'eft pas ; & vos lâches injures »
En ont autrement ordonné.

Il n'eft plus, cet amour, tendre & paffionné ; Vous l'avez, dans mon cœur, par cent vives blef-fures,

Cruellement affaffiné.

C'eft, en fa place, un courroux infléxible,
Un vif reffentiment, un dépit invincible,
Un défefpoir d'un cœur juftement animé,
Qui prétend vous hair, pour cet affront fenfible,
Autant qu'il eft d'accord de vous avoir aimé ;
Et c'eft hair autant qu'il eft poffible.
JUPITER.

Hélas! Que votre amour n'avoit guére de force;.
Si de fi peu de chofe on le peut voir mourir !
Ce qui n'étoit que jeu, doit-il faire un divorce,
Et d'une raillerie a-t-on lieu de s'aigrir? -

AL CMENE.

Ah! C'eft cela dont je fuis offensée,
Et que ne peut pardonner mon courroux.
Des véritables traits d'un mouvement jaloux.
Je me trouverois moins bleffée.

La jaloufie a des impreffions,

Dont bien fouvent la force nous entraîne ;
Et l'ame la plus fage, en ces occafions,
Sans doute, avec affez de peine,.
Répond de fes émotions.

L'emportement d'un cœur, qui peut s'être abufé,
A de quoi ramener une ame qu'il offense ;
Et, dans l'amour qui lui donne naissance,
Il trouve au moins, malgré toute fa violence,,
Des raifons pour être excufé.

De femblables tranfports contre un reffentiment,'
Pour défenfe, toujours ont ce qui les fait naître ;
Et l'on donne grace aifément
A ce dont on n'eft pas le maître.

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