De quel air il vous plaît que ceci foit traité.. Ou bien ufer de complaifance? Non, je ne te veux obliger, Bon. C'eft affez, laiffez-moi faire ; AMPHITRYON. Sur l'ordre que tantôt je t'avois sû prescrire... SÓSIE. Je fuis parti, les cieux d'un noir crêpe voilés, Peftant fort contre vous dans ce fâcheux martyre Et maudiffant vingt fois l'ordre dont vous parlez. AMPHITRYON, Comment, coquin? SOSIE. Monfieur, vous n'avez rien qu'à dire Je mentirai, fi vous voulez. AMPHITRYON: Voilà comme un valet montre pour nous du zéle Paffons. Sur les chemins que t'eft-il arrivé ? Poltron! SOSIE. D'avoir une frayeur mortelle SOSIE. En nous formant, nature a fes caprices Divers penchans en nous elle fait obferver. Les uns, à s'expofer, trouvent mille délices ; Moi, j'en trouve à me confervery, SOSIE. J'ai, devant notre porte, En moi-même, voulu répéter un petit, Sur quel ton, & de quelle forte Je ferois du combat le glorieux récit. Enfuite? Et qui? AMPHITRYON. SOSIE. On m'eft venu troubler, & mettre en peine. SOSIE. Sofie. Un moi, de vos ordres jaloux, Que vous avez, du port, envoyé vers Alcméne; Et qui, de nos fecrets, a connoiffance pleine, Comme le moi qui parle à vous. AMPHITRYON. Quels contes! SOSIE. Non, Monfieur, c'eft la vérité pure, Ce moi, pluftôt que moi, s'eft au logis trouvé; Je vous dis AMPHITRY ON. D'où peut procéder, je te prie, Eft-ce fonge? Eft-ce yvrognerie? Ou méchante plaifanterie ? Non, c'eft la chofe comme elle eft, Je fuis homme d'honneur, j'en donne ma parole; Que le moi, que voici, chargé de laffitude, Il faut être, je le confeffe, D'un efprit bien pofé, bien tranquille, bien doux Pour fouffrir qu'un valet de chanfons me repaiffe. Non 9 SOSIE. Si vous vous mettez en courroux, Vous favez que d'abord tout ceffe. fans emportement je te veux écouter; Non, vous avez raifon ; & la chofe à chacun Mais cela ne laiffe pas d'être. Le moyen d'en rien croire, à moins qu'être infenfé 2 Je ne l'ai pas crû, moi, fans une peine extrême. J'ai vu que c'étoit moi, fans aucun ftratagême; Des pieds, jufqu'à la tête, il eft comme moi fait, Beau, l'air noble, bien pris, les maniéres charmantes, Enfin deux gouttes de lait Ne font pas plus reffemblantes ; Et, n'étoit que fes mains font un peu trop pefantes, J'en ferois fort fatisfait. AMPHITRYON, A quelle patience il faut que je m'exhorte! Bon, entré ? Hé, de quelle forte ? Ai-je voulu jamais entendre de raison ? SOSIE. Avec un bâton, Dont mon dos fent encore une douleur très-forte Oui, moi. Non pas le moi d'ici, Mais le moi du logis qui frappe comme quatre. AMPHITRYON. Te confonde le ciel de me parler ainfi ! SOSIE. Ce ne font point des badinages. Sur le moi qui vous parle, a de grands avantages Et ce diable de moi m'a roffé comme il faut C'eft un drôle qui fait des rages.. AMPHITRYON. Achevons. As-tu vû ma femme 2 SOSIE SOSIE. Non. AMPHITRYON. Pourquoi ? SOSIE. Par une raison affez forte. AMPHITRYON. Qui t'a fait y manquer, maraud? Explique-toi. Faut-il le répéter vingt fois de même forte? Ce moi, qui le feul moi veut être, Il faut que ce matin, à force de trop boire, Je veux être pendu, fi j'ai bû que de l'eau ; Il faut donc qu'au fommeil tes fens fe foient portés, Tout auffi peu. Je n'ai point fommeillé ; Et n'en ai même aucune envie. Je vous parle bien éveillé, J'étois bien éveillé ce matin, fur ma vie ; Et bien éveillé même étoit l'autre Sofie, Quand il m'a fi bien étrillé. Tome V. D |