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jours tourneront contre moi; & que je ne parviendrai point à convaincre mon effrontée? O ciel, feconde mes deffeins, & m'accorde la grace de faire voir aux gens que l'on ne déshonore.

Fin du fecond acte.

ACTE II I.

SCENE PREMIER E.

CLITANDRE, LUBIN.
CLITAN D'RE.

LA nuit eft avancée, j'ai peur qu'il ne foit trop

tard. Je ne vois point à me conduire. Lubin.

Monfieur.

Est-ce par ici?

LUBIN.

CLITANDRE.

LUBIN.

Je pense que oui. Morgué voilà une fotte nuit, d'être fi noire que cela.

CLITAN DRE.

Elle a tort affurément; mais, fi d'un côté elle nous empêche de voir, elle empêche de l'autre que nous ne foyions vûs.

LUBIN.

Vous avez raison, elle n'a pas tant de tort. Je voudrois bien favoir, Monfieur, vous qui étes favant pourquoi il ne fait point jour la nuit.

CLITANDRE.

C'eft une grande queftion, & qui eft difficile. Tu es 'curieux, Lubin ?

LUBIN.

Oui. Si j'avois étudié, j'aurois été fonger à des chofes où on n'a jamais fongé.

CLITANDRE.

Je le crois. Tu as la mine d'avoir l'efprit fubtil & pénétrant.

LUBIN.

Cela eft vrai. Tenez. J'explique du Latin, quoique jamais je ne l'aye appris ; &, voyant l'autre jour écrit fur une grande porte, collegium, je devinai que cela vouloit dire collége.

CLIT ANDRE.

Cela eft admirable! Tu fais donc lire, Lubin?
LUBIN.

Oui, je fai lire la lettre moulée; mais je n'ai jamais fû apprendre à lire l'écriture.

CLIT ANDRE.

(après avoir frappé dans fes mains..) Nous voici contre la maifon. C'eft le fignal que m'a donné Claudine.

LUBIN.

Par ma foi, c'eft une fille qui vaut de l'argent ; & je l'aime de tout mon cœur.

CLITANDRE.

Aussi t'ai je amené avec moi pour l'entretenir.

LUBIN.

Monfieur, je vous fuis....

CLIT ANDRE.

Chut. J'entens quelque bruit.

SCENE IL

ANGELIQUE, CLAUDINE, CLITANDRE, LUBIN.

CLaudine, ANGELIQUE.

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(Scéne de nuit. Les acteurs fe cherchent les uns les autres, dans l'obscurité. )

CLIT ANDRE à Lubin.

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Quoi?

LUBINà Angélique, qu'il prend pour Claudine. Claudine.

CLAUDINE à Clitandre, qu'elle prend pour Lubin, Qu'est-ce ?

CLIT ANDRE à Claudine, croyant parkın à Angélique.

Ah! Madame, que j'ai de joie.

LUBIN à Angélique, croyant parler à Claudine. Claudine, ma pauvre Claudine.

CLAUDINE à Clitandre.

Doucement, Monfieur.

ANGELIQUE à Lubin.

Tout beau, Lubin.

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CLAUDINE à Clitandre.

Vous avez pris l'une pour l'autre.

LUBIN à Angélique.

Ma foi, la nuit on n'y voit goutte.

ANGELIQUE.

Eft-ce pas vous, Clitandre ?

CLITAN DRE.

Oui, Madame.

ANGELIQUE

Mon mari ronfle comme il faut, & j'ai pris ce temps

pour nous entretenir ici.

CLITAN DRE.

Cherchons quelque lieu

pour nous afféoir. CLAUDINE.

C'eft fort bien avifé.

(Angélique, Clitandre, & Claudine vont s'asséoir dans le fond du théatre. ).

LUBIN cherchant Claudine.

Claudine, où eft-ce que tu es ?

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SCENE III.

ANGELIQUE, CLITANDRE, & CLAUDINE affis au fond du théatre, GEORGE DANDIN, à moitié déshabillé, LUBIN.

J'A

GEORGE DANDIN à part.

'Ai entendu defcendre ma femme, & je me fuis vîte habillé pour defcendre après elle. Où peutelle être allée ? Seroit-elle fortie?

LUBIN cherchant toujours Claudine.

(prenant George Dandin pour Claudine.) Où es-tu donc, Claudine? Ah! Te voilà. Par ma foi, ton maître eft plaifamment attrapé, & je trouve ceci auffi drôle que les coups de bâton de tantôt dont on m'a fait récit. Ta maîtreffe dit qu'il ronfle à cette heure, comme tous les diantres ; & il ne fait pas que Monfieur le Vicomte & elle font ensemble pendant qu'il dort. Je voudrois bien favoir quel fonge il fait maintenant. Cela eft tout-à-fait rifible.De quoi s'avife-t-il auffi d'être jaloux de fa femme, & de vouloir qu'elle foit à lui tout feul ? C'est un impertinent, & Monfieur le Vicomte lui fait trop d'honneur. Tu ne dis mot, Claudine. Allons, fuiVons-les, & me donne ta petite menotte que je la baife. Ah! Que cela eft doux ! Il me femble que je mange des confitures.

(à George Dandin, qu'il prend toujours pour Claudine, & qui le repouffe rudement.) Tu-Dieu, comme vous y allez? Voilà une petite menotte qui eft un peu bien rude.

GEORGE DANDIN.

Qui va là ?

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