Nous verrons bien autre chofe; Pourfuivons notre entretien. Je quitte la partie. MERCURE arrêtant Sofie. Où vas-tu? SOSIE. Que t'importe? MERCURE. Je veux favoir où tu vas. Me faire ouvrir cette porte. Si jufqu'à l'approcher tu pouffes ton audace, Quoi ! Tu veux, par ta menace Comment chez nous ? SOSIE. Oui, chez nous. MERCURE. O le traître ! Tu te dis de cette maison ? SOSIE. Fort bien. Amphitryon n'en est-il pas le maître ? MERCURE. Hé bien? Que fait cette raison? Je fuis fon valet MERCURE. Toi? SOSIE. Moi. SOSIE. Pourquoi ? De quelle rage eft ton ame saisie ? MERCURE. Moi? Je ne le prens point, je l'ai toujours porté. MERCURE. O le menfonge horrible, & l'impudence extrême ! Tu m'ofes foutenir que Sofie eft ton nom? SOSIE. Fort bien. Je le foutiens par la grande raison Qu'ainfi l'a fait des Dieux la puiffance fuprême ; Et qu'il n'eft pas en moi de pouvoir dire non, Et d'être un autre que moi-même. MERCURE. Mille coups de bâton doivent être le prix SOSIE battu par Mercure. Juftice, citoyens. Au fecours, je vous prie. MERCURE. Comment, bourreau, tu fais des cris De mille coups tu me meurtris, C'eft ainfi que mon bras SOSIE. L'action ne vaut riend Tu triomphes de l'avantage Que te donne fur moi mon manque de courage, De vouloir profiter de la poltronnerie De ceux qu'attaque notre bras. Battre un homme à jeu fûr n'eft pas d'une belle ame Hé bien, es-tu Sofie à préfent? Qu'en dis-tu? Tes coups n'ont point en moi fait de métamorphofe, Encor? Cent autres coups pour cette autre impus dence. SO.SI E. De grace, fais tréve à tes coups. Fais donc tréve à ton infolence.. SOSIE. Tout ce qu'il te plaira, je garde le filence. MERCURE. Es-tu Sofie encor? Di, traître SOSIE. Hélas! Je fuis ce que tu veux. Difpofe de mon fort tout au gré de tes vœux ; MERCURE. Ton nom étoit Sofie, à ce que tu difois ? Il est vrai, jusqu'ici j'ai cru la chofe claire; M'a fait voir que je m'abufois. MERCURE. C'est moi qui fuis Sofie, & tout Thebes l'avoue Toi, Sofie? SOSIE. MERCURE. Oui, Sofie ; &, fi quelqu'un s'y joue Ciel! Me faut-il ainfi renoncer à moi-même, De ce que je fuis poltron! Sans cela, par la mort.... MERCURE. Entre tes dents, je pense, Tu murmures je ne fais quoi ? SOSIE. Non; mais, au nom des Dieux, donne-moi la licence De parler un moment à toi. MERCURE. Parle. SOSIE. Mais promets-moi, de grace, MERCURE. Paffe; Va, je t'accorde ce point. Qui te jette, di-moi, dans cette fantaisie? SOSIE. Ah! Tout doux ; Nous avons fait tréve aux coups. Quoi? Pendard, impofteur, coquin... SOSIE. Pour des injures, Di-m'en tant que tu voudras; Ce font légères bleffures, Et je ne m'en fàche pas. MERCURE. Tu te dis Sofie ? SOSIE. Oui. Quelque conte frivole.... MERCURE. Sus, je romps notre tréve, & reprens ma parole. N'importe. Je ne puis m'anéantir pour toi, S'avifa-t-on jamais d'une chofe pareille? Rêvai-je? Est-ce que je fommeille? Ai-je l'efprit troublé par des tranfports puiffans? Ne fens-je pas bien que je veille? Ne fuis-je pas dans mon bon fens? |