nouvelles de notre pere. Nous paffâmes à Gennes, où ma mere alla ramaffer quelques malheureux reftes d'une fucceffion qu'on avoit déchirée;& de-là,fuyant la barbare injuftice de fes parens, elle vint en ces lieux, où elle n'a prefque vêcu que d'une vie languiffante. ANSELM E. O ciel! Quels font les traits de ta puiffance, & que tu fais bien voir qu'il n'appartient qu'à toi de faire des miracles! Embraffez-moi, mes enfans, & mêlez tous deux vos tranfports à ceux de votre pere. VALER E. Vous étes notre pere? MARIANE. C'est vous que ma mere a tant pleuré? Oui, ma fille, oui, mon fils, je fuis Dom Thomas C'eft-là votre fils? Oui. ANSELM E. HARPAGON. Je vous prens à partie, pour me payer dix mille écus qu'il m'a volés. ANSELM E. HARPAGON. vous avoir volé ? Lui, Lui-même. M. JACQUES. Vous voyez que je ne dis rien. HARPAGON. Oui. Voilà Monfieur le commiffaire qui a reçû fa dépofition, VALER E. Pouvez-vous me croire capable d'une action filàche? HARPAGON. Capable, ou non capable, je veux ravoir mon argent. SCENE DERNIERE. HARPAGON, ANSELME, ELISE, MARIANE, CLEANTE, VALERE, FROSINE, UN COMMISSAIRE, MAISTRE JACQUES,LA FLECHE. ΝΕ CLEANT E. E vous tourmentez point, mon pere, & n'accufez perfonne. J'ai découvert des nouvelles de votre affaire; & je viens ici pour vous dire que, fi vous voulez vous réfoudre à me laiffer épouser Mariane, votre argent vous fera rendu. HARPAGON. Où eft-il? CLEANT E. Ne vous mettez point en peine. Il eft en un lieu dont je répons; & tout ne dépend que de moi. C'est à vous de me dire à quoi vous vous déterminez; & vous pouvez choifir, ou de me donner Mariane, ou de perdre votre caffette. HARPAGON. N'en a-t-on rien ôté ? CLEANTE. Rien du tout. Voyez fi c'eft votre deffein de foufcrire à ce mariage, & de joindre votre confentement à celui de fa mere, qui lui laiffe la liberté de faire un choix entre nous deux. MARIA N E à Cléante Mais vous ne favez pas que ce n'est pas affez que ce (montrant Valére.) confentement; & que le ciel, avec un frere que vous (montrant Anfelme.) voyez, vient de me rendre un pere, dont vous avez à m'obtenir. ANSEL ME. Le ciel, mes enfans, ne me redonne point à vous pour être contraire à vos vœux. Seigneur Harpagon, vous jugez bien que le choix d'une jeune perfonne tombera fur le fils, pluftôt que fur le pere. Allons, ne vous faites point dire ce qu'il n'eft point néceffaire d'entendre; & confentez, ainfi que moi, à ce double hyménée. HARP. A GON. li faut, pour me donner confeil, que je voie ma caffette. CLEANTE. Vous la verrez faine & entiére. HARPA GON. Je n'ai point d'argent à donner en mariage à mes enfans. ANSELM E. Hé bien j'en ai pour eux ; que cela ne vous inquiéte point. HARPAGON. Vous obligerez-vous à faire tous les frais de ces deux mariages? ANSELM E. Oui, je m'y oblige. Etes-vous fatisfait ? HARPAGON. Oui, pourvû que, pour les noces, vous me faffiez faire un habit. ANSELM E. D'accord. Allons jouir de l'allégreffe que cet heureux jour nous préfente. LE COMMISSAIRE. Holà, Meffieurs, holà. Tout doucement, s'il vous plaît. Qui me payera mes écritures? HARPAGON. Nous n'avons que faire de vos écritures. HARPAGON montrant M. Jacques. Pour votre payement, voilà un homme que je vous donne à pendre. M. JACQUES. Hélas! Comment faut-il donc faire? On me donne des coups de bâton pour dire vrai; & on me veut pendre pour mentir. ANSELM E. Seigneur Harpagon, il faut lui pardonner cette im posture. HARPAGON. ANSELM E. Vous payerez donc le commiffaire ? Soit. Allons vîte faire part de notre joie à votre mere. HARPAGON. Et moi, voir ma chére caffette. FIN. |