Page images
PDF
EPUB

AVERTISSEMENT

DES ÉDITEURS.

Les observations que nous avons placées en tête de la Théologie pastorale s'appliquent plus particulièrement encore au cours d'Homilétique, et nous devons y renvoyer le lecteur.

Les manuscrits originaux, nombreux et divers sur certaines portions du cours, ont dû être comparés entre eux, et celui qui a servi de base à notre travail a été fréquemment enrichi d'idées empruntées aux autres. Pour les points sur lesquels M. Vinet n'a laissé que des notes sommaires insuffisantes, on a eu recours aux cahiers de ses auditeurs, et, comme dans la Théologie pastorale, on a marqué d'un signe [ ] destiné à les faire reconnaître, les passages empruntés à ces cahiers, et ceux qui, reproduisant le texte original, ont dû être modifiés à quelque égard, soit qu'il ait fallu compléter des phrases inachevées, soit qu'on ait dû lier entre eux des fragments détachés en les rapprochant les uns des autres. Cette précaution n'a été négligée que lorsqu'il s'agissait de détails trop insignifiants pour qu'on pût en tenir compte.

L'ouvrage que nous publions aurait, il est vrai, été plus achevé, surtout sous le rapport de la forme, si l'auteur l'avait revu lui-même; toutefois, la dernière forme qu'il a donnée, après des révisions successives, à plusieurs portions étendues de son cours, est sans doute, à peu de chose près, celle à laquelle il se serait arrêté, et on peut la considérer comme définitive. En tout cas, ce volume reproduit dans toutes ses parties, avec une scrupuleuse fidélité, la pensée de M. Vinet sur l'une des branches les plus importantes de son enseignement; aussi ne mettons-nous pas en doute qu'accueilli avec empressement par le public restreint auquel il s'adresse tout d'abord, il ne soit lu également en dehors de ses limites avec un vif intérêt et un grand profit.

HOMILÉTIQUE.

INTRODUCTION.

L'office du ministère évangélique se compose de différents éléments, au milieu desquels domine la parole. La religion chrétienne, religion de liberté et de persuasion, est une parole. Jésus-Christ, qui est à la fois l'auteur et l'objet du christianisme, est appelé la Parole (1). Même avant d'être venu en chair, il parlait déjà intérieurement à la conscience de tout homme; car la parole n'est pas seulement cette série de sons articulés qui porte des idées dans les esprits, la parole est la pensée même. La pensée est une parole, comme la parole est une pensée. Mais cette Parole qui parlait hors du temps et intérieurement, a parlé dans le temps et extérieurement. Jésus-Christ a parlé par les faits, il a parlé par sa vie et par sa mort; mais il a parlé aussi dans le sens ordinaire de ce mot. Il a prêché (2). Nous sommes appelés à répéter ses paroles; mais il nous envoie comme il a été envoyé; c'est-à-dire

(1) Jean, I, 1-4, 14.

...

(2) « Summus ecclesiastes Dei filius, qui est imago patris absolutissima, qui virtus et sapientia genitoris est æterna, per quem Patri visum est humanæ genti largiri quidquid bonorum mortalium generi dare decreverat, nullo alio <«< cognomine magnificentius significantiusve denotatur in sacris litteris, quam « quum dicitur verbum, sive sermo Dei. » ERASMUS, Ecclesiastes, lib. I, cap. II.

[ocr errors]

que, comme il s'est uni à la pensée de son Père, il veut que nous nous unissions à la sienne; que nous soyons un avec lui, comme il est un avec son Père ; il frappe sur notre esprit comme sur un airain sonore, qui ne retentit pas sans vibrer; il veut que, comme nous sommes les fils de sa pensée, nos frères deviennent les fils de la nôtre. Dieu a voulu que l'homme fût pour l'homme le canal de la vérité. La paternité naturelle est le symbole de nos rapports spirituels : nous nous engendrons mutuellement (1). Il ne s'agit pas seulement de paroles à transmettre et à répéter, mais d'une vie à communiquer; il faut que ces vérités dont se compose l'Évangile soient devenues vivantes et personnelles dans des personnes vivantes. La Parole n'a pas parlé une fois pour toutes (à moins qu'on ne prenne la lettre pour la Parole); la Parole parle sans cesse, et la lettre de l'Évangile n'est que le milieu nécessaire à travers lequel cette Parole parle à tous. L'institution du ministère ne s'explique que par là. Le ministre est ministre de la Parole de Dieu. Le christianisme, religion de la pensée, doit être parlé (2).

On est autorisé à appeler ministres de l'Évangile, ou pasteurs, des hommes qui n'exercent pas le ministère de la parole; on ne ferait en cela que suivre l'exemple des apôtres et de la primitive Église ; mais c'est aussi entrer dans leur sens que de donner la prééminence à l'enseignement, c'est-à-dire à la parole,

(1) Voyez l'Essai sur la manifestation des convictions religieuses, pages 111-112. (2) Voyez Théologie pastorale, pages 5-6, et le commencement du Résumé de la première partie de l'Homilétique.

« PreviousContinue »