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GERONTE.

N'y avoit-il point d'autre promenade ?
SCAPIN,

Cela eft vrai. Mais faites promptement.

GERONTE.

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Tien, Scapin, je ne me fouvenois pas que je viens juftement de recevoir cette fomme en or,& je ne croyois pas qu'elle dût m'être fi-tôt ravie. Il luy prefente fa bourse, qu'il ne laisse pourtant pas aller dans fes tranfports il fait aller fon bras de côté & d'autre, & Scapin le fien pour avoir la bourse. Tien. Va-t-en racheter mon fils.

Oui, Monfieur.

SCAPIN.

GERONT E.

Mais di à ce Turc que c'eft un fcelerat.

SCAPIN.

Oui.

GERONTE.

Un infame.

SCAPIN

Oui.

GERONTE.

Un homme fans foi, un voleur.

SCAPIN.

Laiffez moi faire.

GERONTE.

Qu'il me tire cinq cens écus contre toute forte de

droit.

SCAPIN.

Oui.

GERONTE.

Que je ne les lui donne ni à la mort, ni à la vie.

Fort-bien.

SCAPI N.

GERONTE.

Et que fi jamais je l'attrape, je sçaurai me van

ger de lui.

Ttt 3

SCA

Oui.

SCAPIN.

GERONT E, rémet la bourse dans
Sa poche, & s'en va.

.

Va, va vîte requerir mon fils.

SCAPIN, allant aprés lwy.
Monfieur.

Hola,

GERONTE.

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Ah, c'eft la douleur qui me trouble l'efprit.

Je le voi bien.

SCAPIN.

GERONTE.

Que diable alloit-il faire dans cette galere? Ah maudite galere! Traître de Turc à tous les diables!

SCAPIN.

Il ne peut digerer les cinq cens écus que je lui arrache; mais il n'eft pas quitte envers moi, & je veux qu'il me paye en une autre monnoye, l'impofture qu'il m'a faite auprés de fon fils.

SCENE

II.

OCTAVE, LEANDRE, SCAPIN.

H

OCTAV E.

E' bien, Scapin, as-tu réüffi pour moi dans ton entreprise?

LEANDRE.

As-tu fait quelque chofe pour tirer mon amour de la peine où il eft?

SCAPIN.

Voilà deux cens piftoles que j'ay tirées de vôtre

pere.

ОСТА

OCTA V E.

Ah que tu me donnes de joye!

SCAPIN.

Pour vous, je n'ay pû faire rien.

LEANDRE vent s'en aller.

Il faut donc que j'aille mourir; & je n'ay que faire de vivre, fi Zerbinette m'eft ôtée.

SCAPIN.

Hola, hola, tout doucement. Comme diantre vous allez vite !

LEANDR E Se retourne.

Que veux-tu que je devienne?

SCAPIN.

Allez, j'ai vôtre affaire ici.

LEANDRE revient.

Ah! tu me redonnes la vie.

SCA PIN.

Mais à condition que vous me permettrez à moi, une petite vangeance contre vôtre pere, pour le tour qu'il m'a fait.

LEANDRE.

Tout ce que tu voudras.

SCAPIN.

Vous me le promettez devant témoin.

Oui.

LEANDRE.

SCAPIN.

Tencz, voilà cinq cens écus.

LEANDRE.

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Allons en promptement acheter celle que j'a

dore.

Fin du fécond Afte.

Tet 4

ACTE

ACTE III.

SCENE. I.

ZERBINETTE, HIACINTE, SCAPIN, SILVESTRE.

O

SILVESTRE.

UY, vos amans ont arrêté entr'eux que vous fuffiez enfemble; & nous nous acquitons de l'ordre qu'ils nous ont donné.

HIACINTE

Un tel ordre n'a rien qui ne me foit fort agreable. Je reçois avec joie une compagne de la forte; & il ne tiendra pas à moi, que l'amitié qui eft enire les perfonnes que nous aimons, ne se répande entre nous deux.

ZER BINETTE. J'accepte la propofition, & ne fuis point perfonne a reculer, lorsqu'on m'attaque d'amitié.

SCAPIN.

Et lors que c'eft d'amour qu'on vous attaque ?
ZERBINETTE.

Pour l'amour, c'eft une autre chofe; ony court un peu plus de rifque, & je n'y fuis pas fi hardie. SCAPIN.

Vous l'étes, que je croi, contre mon Maître maintenant; & ce qu'il vient de faire pour vous, doit vous donner du cœur pour répondre comme il faut à fa paffion.

ZERBINETTE.

Je ne m'y fie encore que de la bonne forte; & ce n'eft pas affez pour m'affûrer entierement, que ce qu'il vient de faire. J'ay l'humeur enjoüée, & fans ceffe je ris; mais tout en riant, je fuis. ferieufe fur de certains chapitres; & ton Maître s'abufera, s'il croit qu'il lui fuffife de m'avoir achetée pour me voir toute à lui. Il doit lui en coûter autre chofe que de l'argent;& pour répondre à fon amour de la maniere qu'il fouhaite, il me faut un don de fa

foi

foi qui foit affaifonné de certaines ceremonies qu'on trouve neceffaires.

SCAPIN.

C'eft-là auffi comme il l'entend. Il ne prétend à vous qu'en tout bien & en tout honneur: & je n'aurois pas été homme à me mêler de cette affaire, s'il avoit une autre pensée.

ZER BINET TE.

C'eft ce que je veux croire, puis que vous me le dites; mais du côté du pere, j'y prévoi des empêchemens.

SCAPIN.

Nous trouverons moyen d'accommoder les cho

fes.

HIACIN TE.

La reflemblance de nos deftins doit contribuer encore à faire naître nôtre amitié; & nous nous voyons toutes deux dans les mêmes allarmes, toutes deux expofées à la même infortune.

ZERBINETTE.

Vous avez cet avantage,au moins,que vous fçavez de qui vous étes née ; & que l'appuy de vos parens que vous pouvez faire connoître, eft capable d'ajuster tout, & peut affûrer vôtre bonheur, & faire donner un confentement au mariage qu'on trouve fait. Mais pour moi je ne rencontre aucun fecours dans ce que je puis être, & l'on me voit dans un état qui n'adoucira pas les volontez d'un pere qui ne regarde que le bien.

HIA CINTE Mais auffi avez vous cet avantage,que l'on ne tente point par un autre parti, celui que vous aimez. ZERBINETTE.

Le changement du cœur d'un amant n'eft pas ce qu'on peut le plus craindre. On fe peut naturellement croire affez de merite pour garder fa conquê te; & ce que je vois de plus redoutable dans ces fortes d'affaires, c'eft la puiffance paternelle, auprés de qui tout le merite ne fert de rien.

HIACIN TE.

Helas pourquoi faut-il que de juftes inclinations fe trouvent traversées? La douce chofe que d'aimer, lors que l'on ne voit point d'obstacle à ces

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