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JULIE.

Julie s'approche de M. de F. le regarde d'un air languiffant, & luy veut prendre la mains Que je fuis aife de vous voir! & que je brûle d'impatience....

ORONT E.

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Ah, ma Fille, ôtez-vous de là, vous dis-je.
M. DE POURCEAUGNAC.

Ho, ho, quelle égrillarde!

ORONTE.

Je voudrois bien, dis-je, fçavoir par quelle raifon, s'il vous plaît, vous avez la hardieffe.... M. DE POURCEAUGNAC.

Vertu de ma vie !

ORONTE, à Julie.

Encor, qu'eft-ce à dire cela?

JULIE.

Ne voulez-vous pas que je careffe l'époux que

S vous m'avez choifi?

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ORONTE.

Non, rentrez là dedans.

JULIE.

Laiffez-moy le regarder.

ORONTE.

Rentrez, vous dis-je.

JULIE.

Je veux demeurer là, s'il vous plaît.

ORONTE.

Je ne veux pas, moi ; & fi tu ne rentres tout à l'heure, je....

JULIE.

Hé bien, je rentre.

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ORONT E.

Ma fille eft une fotte, qui ne fçait pas les chofes.
M. DE POURCEAUGNAC.

Comme nous luy plaifons!

ORONT E.

To ne veux pas te retirer ?

JULIE

Quand est-ce donc que vous me marierez avec

Monfieur?

ORONT E.

Jamais: & tu n'es pas pour lui.

Qgg

JV

JULIE

Je le veux avoir, moi, puis que vous me l'avez promis.

ORONT E.

Si je te l'ai promis, je te le dépromets.
M. DE POURCEAUGNAC.

Elle voudroit bien me tenir..

JULIE.

Vous avez beau faire, nous ferons mariez enfemble en dépit de tout le monde.

ORONT E.

Je vous en empêcherai bien tous deux, je vous affure. voyez un peu quel vertige lui prend. M. DE POURCEAUGNAC.

Mon Dieu, nôtre Beau-pere prétendu, ne vous fatiguez point tant;on n'a pas envie de vous enlever vôtre fille, & vos grimaces n'attraperont rien. ORONTE.

Toutes les vôtres n'auront pas grand effet.
M. DE POURCEAUGNAC.

Vous étes-vous mis dans la tête que Leonard de Pourceaugnac foit un homme à acheter chat en poche? & qu'il n'ait pas là-dedans quelque morceau de judiciaire pour fe conduire, pour le faire informer de l'hiftoire du monde, & voir en fe mariant, fi fon honneur a bien toutes fes fûretez ?

ORONT E.

Je ne fçay pas ce que cela veut dire : mais vous étes-vous mis dans la tête,qu'un homme de foixan. te & trois ans ait fi peu de cervelle, & confidere fi peu fa fille, que de la marier avec un homme qui a ce que vous fçavez, & qui a été mis chez un Medecin pour être penfé?

M. DE POURCEAUGNA C. C'eft une piece que l'on m'a faite, & je n'ay au

cun mal.

ORONT E.

Le Medecin me l'a dit luy-même.

M. DE POURCEAUGNA C. Le Medecin en a menti; je fuis Gentilhomme, & je le veux voir l'épée à la main.

ORONTE

Je fçay ce que j'en duis croire, & yous ne m'a

bu

buferez pas là deffus, non plus que fur les dettes que vous avez affignées fur le mariage de ma fille. M. DE POURCEAUGNAC.

Quelles dettes ?

ORONT E.

La feinte ici eft inutile, & j'ay veu le marchand Flamand, qui, avec les autres creanciers, a obtenu depuis huit mois Sentence contre vous.

M. DE POURCEAUGNAC. Quel marchand Flamand? quels creanciers? quelle Sentence obtenue contre moi? ORONT E.

Vous fçavez bien ce que je veux dire.

SCENE

VII.

LUCETTE, ORONTE, M. DÉ POURCEAUGNAC.

LUCETTE contrefaisant la Languedocienne.
H tu es affy, & à la fy yeu te trobi aprés abé fat

foufteni ma bifto?

M. DE POURCEAUGNAC. Qu'est-ce que me veut cette femme-là? LUCETTE.

Que te boli, infame! tu fas femblan de nou me pas connouyffe, & nou rougifles pas, impudent que tu fios, tu nou rougiffes pas de me beyre? Nou faby pas, Mouffur, s'aquos bous dont m'an dich que bouillo efpoufa la fillo; may yeu bous declari que yeu foun fa fenno, & que ya fet ans, Mouffur, qu'en paflan à Pezenas el auguet l'adreffe dambé fas mignardifos, comme fap ta pla fayre, de me gaigna lou cor, & m'oubliget per aquel mouyen à ly douna la man per l'efpoufa.

Oh, oh.

ORONT E.

M. DE POURCEAUGNAC.

Que diable eft ceci ?

LUCETTE.

Lou trayte me quitet trés ans aprés, fullou pres tefte de qualques affayres quel'apelaboun dins foun Q996

Pais,

Pais, & defpey noun n'ay refçauput quafi de nou belos may dins lou tens qu'y loungeabilou mens, m'an dounat abift, que begnio dins aquefto bilo, per fe remarida dambé une autre jouyne fillo, que fous parens ly an procurado, fenffe faupre rez de foun premié mariatge. Yeu ay tout quirat en diligenflo, & me foliy rendudo dins aqueste loc lou puieu qu'ay poufcut, per m'oupoufa en aquel cri minel mariatge, & confondre as eyls de tout lou mounde lou plus méchant das homes.

M. DE POURCEAUGNAC,

Voilà une étrange effrontée !

LUCETTE.

Impudent, n'as pas honte de m'injuria, alloc d'eftre confus das reproches fecrets que ta confcientfo te deu fayre?

M. DE POURCEAUGNAC,
Moy, je fuis vôtre mari?

LUCET TE.

Infame, gaufos-tu dire lou contrari? He tu fabes be, per ma peno, que n'es que trop bertat, & plagueflo al Çel qu'aco nou tougheflo pas, & que m'augueffos layffado dins l'eftat d'innouffenço, & dins la tranquillitat oun moun amo bibio,daban que tous charmes & tas trounpariés nou m'en bengueflon malhuroufamen fayre fourty; yeu nou ferio pas reduito à fayre lou trifte perfounatge qu'yeu fau prefentamen; à beyre un marit cruel mefprefa touto l'ardou que yeu ay per el, & me laiffa fenfle cap de pietat abandonnado à las mourteles doulous que yeu reffenti de fas perfidos accious.

O'RONTE.

Je ne fçaurois m'empêcher de pleurer. Allez, Vous êtes un mech ant homme.

M, DE POUR CEAUGNAC. Je ne connois rien à tout ceci.

SCENE VIII.

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NERINE en Picarde LUCETTE
ORONTE, M. DE POUR C.
*ONERINE contrefaifant la Picarde.
H je n'en pis plus,je fis toute effoflée. Ah,finfa-

A je

ron,

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ron tu m'as bien fait courir, tu ne m'écaperas mie. Juftiche, juftiche; je boute empefchement au mariage. Cheft mon meri, Monfieur, & je yeux faire pindre che bon pindar-là.

M. DE POURCEAUGNAC.

Encor!

ORONTE.

Quel Diable d'homme eft-ceci?

LUCET TE.

Et que boulés-bous dire, ambe boftre empachomen, & boftre pendarie? Qu'aquel homo es boftre marit?

NERIN E.

Ouy, Medeme, & je fis fa femme.

LUCETTE.

Aquo es faus, aquos yeu que foun fa fenno; & fe deu eftre pendut, aquo fera yeu que lou faray penja. NERINE

Je n'entains mie che baragoin-là.

LUCETTE.

Yeu bous dify que yeu foun fa fenno.

Sa femme?

Oy.

NERINE.

LUCETTE

NERIN E.

fis.

Je vous dis que cheft my, encore in coup, qui le

LUCETTE.

Et yeu bous foufteni yeu, qu'aquos yen.
NERIN E.
Il ya quetre ans qu'il m'a épofée.

LUCETTE.

Et you fet ans ya que m'a prefo per fenne

NERINE.

J'ay des gairants de tout ce que je dy.

LUCET TE

Tout mon païs lou fap.

NERINE.

No ville en eft temoin.

LUCET TE

Tout Pezenas a bift noftre mariage.

NERINE.

Tout Chin Quintin a affisté à no noche.

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