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Flamand pour fonger à d'autres machines; & tichons de femer tant de foupçons & de divifions entre le beau-pere & le gendre, que cela rompe le mariage pretendu. Tous deux également font propres à gober les hameçons qu'on leur veuttendre;& entre nous autres fourbes de la premiere clafie, nous re faifons que nous jouer, lors que nous trouvont un gibier auffi facile que celui-là.

SCENE IV.

M. DE POURCEAUGNAĆ,
SBRIGANI.

M. DE POURCEAUGNAC.

Piglia-to su, piglia-lo se, Signor Mensu. Quê

diable eft-ce là? Ah!

SBRIGANI.

: Qu'est-ce, Monfieur, qu'avez-vous?
M. DE POURCEAUGNAC.
Tout ce que je vais me femble lavement.
SBRIGAN I.

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Comment ?

M. DE POURCEAUGNAC, Vous ne fçavez pas ce qui m'eft arrivé dans ce lo gis à la porte duquel vous m'avez conduit? SBRIGA NI.

Non vrayment, qu'est-ce que c'eft?

M. DE POURCEAUGNAC.
Je penfois y être regalé comme il faut.
SBRIGAN I.

Hé bien a

M. DE POURCEAUGNAC. Je vous laiffe entre les mains de Monfieur. Des Medecins habillez de noir. Dans une chaife. Tater le poulx. Comme ainfi foir IE eft fou. Deux gros jouflus. Grands chapeaux Bon dì, bon dì. Six Pantalons. Ta, ra, ta, ta: Ta, ra, ta, ta. Allegrament! Monsu Pouretaunac. Apotiquaire. Lavement. Prenez, Monfieur, prenez, prenez. Hleft benin, benin, Benin. C'est pour déterger, pour déterger,déterger. Piglia-lo sn, Signor Monsu, pighia-la, piglia-la, piglinitosus Jamais je n'ay été fi faoul de fottifes.

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SBRIGANI.

Qu'est-ce que tout cela veut dire ?

M. DE POURCEAUGNAC.

Cela veut dire que cet homme-là, avec les grandes embraflades, eft un fourbe qui m'a mis dans úne maifon pour fe moquer de moy, & me faire une piece.

SBRIGANI.

Cela cft-il poffible?

M. DE POURCEAUGNAC.

Sans doute, ils étoient une douzaine de Poffedez aprés mes chauffes; & j'ay eu toutes les peines du monde à m'échapper de leurs pates.

SBRIGANI

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Voyez un peu, les mines font bien trompeuses! Je l'aurois crû le plus affectionné de vos amis. Voilà un de mes étonnemens, comme il eft poffible qu'il y ait des fourbes comme cela dans le monde. M. DE POURCEAUGNAC, Ne fens-je point le lavement?voyez, je vous prie. SBRIGANI. Eh, il y a quelque petite chofe qui approche de

cela.

M. DE POURCEAUGNAC.

J

J'ay l'odorat & l'imagination toute remplie de cela, & il me semble toûjours que je voy une doyzaine de lavemens qui me couchent en joue.

SBRIGANI.

Voilà une méchanceté bien grande ! & les hommes font bien traîtres & fcelerats!

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M. DE POURCEAUGNAC. Enfeignez-moy, de grace, le logis de Monfieur Oronte; je fuis bien-aife d'y aller tout à l'heure. SBRIGANI.

Ah, ah, vous étes donc de complexion amoureufe, & vous avez ouï párler que ce Monfieur Oronte a une fille....

M. DE POURCEAUGNAC.

Ouy, je viens l'époufer.

SBRIGANI.

L'é.... l'époufer?

M. DE POURCEAUGNAC.

בפי

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Ouy.

299 3

SBRI

SBRIGAN I.

En mariage?

M. DE POURCEAUGNAC.
De quelle façon donc ?

SBRIGANI.

Ah c'eft une autre chofe, & je vous demande

pardon.

M. DE POURCEAUGNAC.

Qu'est-ce que cela veut dire ?

Rien.

SBRIGANI.

M. DE POURCEAUGNA C.
Mais encore?

S BRIGANI

Rien, vous dis-je, j'ay un peu parlé trop vîte.
M. DE POURCEAUGNA C.

Je vous prie de me dire ce qu'il y a là-deffous.
SBRIGANI
Non, cela n'eft pas neceffaire.

M. DE POURCEAUGNAC.
De grace.

SBRIGANI.
Point, je vous prie de m'en difpenfer.

M. DE POURCEAUGNAC.
Eft-ce que vous n'étes pas de mes amis ?
SBRIGAN I.

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Si fait, on ne peut pas l'être davantage.
M. DE POURCEAUGNA C.
Vous devez donc ne me rien cacher.
SBRIGA NI.

C'est une chofe où il y va de l'interêt du prochain.
M. DE POURCEAUGNAC.

Afin de vous obliger à m'ouvrir vôtre cœur,voilà une petite bague que je vous prie de garder pour l'amour de moi..

SBRIGAN I.

Laiffez-moi confulter un peu fi je le puis faire en confcience. C'est un homme qui cherche fon bien, qui tâche de pourvoir fa fille le plus avantageufement qu'il eft poffible; & il ne faut nuire à perfonne. Ce font des chofes qui font connues à la verité, mais j'iray les découvrir à un homme qui les igno*, & il eft defendu de fcandalifer fon prochain:

Ccla

:

Cela eft vrai; Mais d'autre part voilà un étranger qu'on veut surprendre, & qui de bonne foi vient Le marier avec une fille qu'il ne connoît pas, & qu'il n'a jamais veue; un Gentilhomme plein de franchife, pour qui je me fens de l'inclination, qui me fait l'honneur de me tenir pour fon ami, prend confiance en moi, & me donne une bague à garder pour l'amour de lui. Ouy, je trouve que je puis vous dire les chofes faus bleffer ma confcience: mais tâchons de vous les dire le plus doucement qu'il nous fera pothible, & d'épargner les gens le plus que nous pourrons. De vous dire que cette fille-là mene une vie deshonnête, cela feroit un peu trop fort; cherchons pour nous expliquer, quelques termes plus doux. Le mot de galante auffi n'eft pas aflez; celuy de coquette achevée, me femble propre à ce que nous voulons, & je m'en puis fervir, pour vous dire honnêtement ce qu'elle eft.

M. DE POURCEAUGNAC.
L'on me veut donc prendre pour dupe?
SBRIGANI.

Peut-être dans le fond n'y a t'il pas tant de mal que tout le monde croit, & puis il y a des gens,aprés tout,qui fe mettent au deflus de ces fortes de chofes, & qui ne croyent pas que leur honneur depende.... M. DE POURCEAUGNAC.

Je fuis vôtre ferviteur, je ne me veux point mettre fur la tête un chapeau comme celui-là, & l'on aime à aller le front levé dans la famille des Pourceaugnacs.

Voilà le Pere.

SBRIGANI.

M. DE POURCEAUGNA C.

Ce vieillard-là ?

SBRIGANI.

Ouy, je me retire.

SCENE V.

ORONTE, M. DE POUR.
CEAUGNAC.

M. DE POURCEAUGNAC.

Bonjour, Monfieur, bon jour.

Q99 4

ORON

ORONTE.

Serviteur, Monfieur, ferviteur.

M. DE POURCEAUGNAC. Vous étes Monfieur Oronte, n'eft-ce pas ? ORONTE.

Ony.

M. DE POURCEAUGNAC. Et moi, Monfieur de Pourceaugnac.

ORONTE.

A la bonne heure.

M. DE POURCEAUGNAC. Croyez-vous, Monfieur Oronte, que les Limefins foient des fots?

ORONTE.

Croyez-vous, Monfieur de Pourceaugnac, que les Parifiens foient des bêtes?

M. DE POURCEAUGN AC.

Vous imaginez-vous, Monfieur Oronte, qu'un homme comme moi foit fi affamé de femme ? ORONTE.

Vous imaginez-vous, Monfieur de Pourceaugnac, qu'une fille comme la mienne foit fi affamée de mari?

SCENE VI

JULIE, ORONTE, M. DE
POURCEAUGNAC.

JULIE.

N vient de me dire, mon Pere, que Monfieur

doute, & mon cœur me le dit. Qu'il est bien fait ! qu'il a bonair! & que je fuis contente d'avoir un tel époux! Souffrez que je l'embraffe, & que je lui témoigne....

ORONT E.

Doucement, ma Fille, doucement.

M. DE POURCE AUGNAC. Tu-dieu, quelle galante! comme elle prend feu d'abord!

ORONT E.

Je voudrois bien fçavoir, Monfieur de Pourceaugnac, par quelle raifon vous venez....

J U.

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