La fierté du Lion auffi vaine que grande Eût bien-tôt expiré fur les remparts d'Oftende; L'orgueilleux Amfterdam, qu'eût foudroyé ton bras, *Fût bien-tôt devenu le tombeau des Etats; Valencienne eût fouffert tous les malheurs de Troye, Elle étoit ta conquête, elle eût été ta proye. Vous donc, Héros cruels, qui même vous vantez De verfer tout le fang de ceux que vous domptez; Princes, dont la fureur a fatigué les Parques, Suivez dans fa bonté le plus grand des Monarques. Vous ne pourrez l'atteindre, encor moins le paffer; Mais le fuivre de loin c'eft beaucoup s'avancer. Et vous, Rois bienfaisans, bons Princes, mais timides, Vous, qui dans vos confeils n'ofez marcher fans guides, Songez que mon Héros eft lui feul fon Confeil Il e le maître du calme & de l'orage. Mais je m'égare ici, moi qui n'ai médité GRAND ROY, que quelques Vers fur ta feu. le bonté. C'est d'elle que tu fçais ce que fçavoit Auguste, Que fouvent la vengeance eft baffe, & même injuste, Qu'un Roi n'est plus un Roi dès qu'il est en cour roux, Et que le plus beau Régne eft toujours le plus doux. Auffi le crime eft-il l'objet feul de ta haine. Tu reprens fans aigreur, tu punis avec peine; Nous ne te voyons point ferme avec dureté, Prompt par impatience, & fier par vanité. Ton air eft obligeant, même quand tu refuses. Tu n'accuses jamais qu'auffi-tôt tu n'excuse. Quiconque enfin te voit, paffe cent fois le jour De l'amour au refpect, du refpect à l'amour. Et quand on te verroit fans Sceptre & fans Cou ronne, On trouveroit toujours un Roi dans ta perfonne. EPITRE AU ROY. Après la deftruction de l'Héréfie. Elle fut prefentée à Sa Majesté en l' Année 1686. O Y, qui fais tout céder au plaifir d'être jufte, gufte, Il eft vrai que l'Europe adore ta Grandeur, Qu'aucun Auteur vénal ne parle de fon Roi. Mais que regardons-nous avec plus de surprise? Les lauriers qu'aujourd'hui tu cuëilles pour l'Eglife. Devons-nous cependant nous étonner, GRAND Roy, De ce que l'Hérétique abjure enfin fa foi? Non. Son efprit charmé voit tous les jours ton zèle courageux brutal, Il voit que tu punis le * * Le Duel, Il voit que dans ton Camp, (a) où tout eft plein (a)Camp d'ardeur, de Main tenon. (b) Ré La licence jamais n'allarme la pudeur. Il voit que tes Edits font diftinguer deux Romes, L'une, où Dieu régle tout, l'autre, où régnent des hommes. forme de Il voit que par tes foins le Cloître (b) dans fes mœurs plufieurs Semble reffufciter fes plus faints Fondateurs; Et qu'enfin c'est Ordres Monafti ques (c) Refidence ques ré par toi que tout Prélat en France Peut fans honte aux Curés prêcher (c) la Réfidence, L'Eglise a même encor d'autres traits de beauté, des Eve Dont le cœur Huguenot n'est pas moins enchanté. Des Ecoles de guerre (d) instruisent la jeunesse A joindre à la vertu la fcience & l'adreffe. Roy. Un Cloître (e) militaire enferme les Guerriers (d) Les Cadets. Qui ne te peuvent plus amaffer de lauriers ; (e) Les Et Saint-Cir enrichi de tes mains libérales. Invali tablie par le des. Prefente à la Pudeur un Temple & des Vaftales. Comment donc l'Hérétique étant ainfi charmé, Comment, s'étant fenti tant de fois l'ame éprise armes. les Après un tel fuccès, que peux-tu defirer? Eft-il rien où ton cœur doive encor aspirer? Tu te plaignois de voir que les plus fortes Villes Ne te coûtoient fouvent que des affauts faciles: Chaque Palme tomboit dès que tu la touchois, Et tu n'en voulois plus fi tu ne l'arrachois : Le Ciel t'en a montré, dont tu n'as pû te plaindre, Puifqu'on defefpéroit de t'y voir même atteindre. Il t'a fait attaquer des efprits qu'autrefois On voyoit devenir les Tirans de nos Rois. Il t'a fait affiéger des cœurs inacceffibles, Où ton zèle a vaincu tant d'erreurs invincibles, La Grace enfin, GRAND ROY, t'a fait exécuter Tout ce qu'à peine un fiécle auroit pu projetter. |