donc le bonheur de ne lui être pas defagréable. Il m'as pella à tous fes plaifirs & à tous fes divertissemens c'est-à-dire, à fes lectures & à fes promenades. Il me favorija même quelquefois de fa plus étroite confidence, & me fit voir à fond fon ame entiére. Et que n'y vis-je point! Quel trefor surprenant de probité & de justice! quel fonds inépuisable de piété & de zèle! Bien que fa vertu jettât un fort grand éclat au debors, c'étoit toute autre chofe au dedans; & on voyoit bien qu'il avoit foin d'en tempérer les rayons, pour ne pas bleffer les yeux d'un fiécle auffi corrompu que le nôtre. Je fus fincérement épris de tant de qualitez admirables; & s'il eut beaucoup de bonne volonté pour moi, j'eus aussi pour lui une trés-forte attache. Les foins, que je lui rendis, ne furent mêlez d'aucune raifon d'intérêt mercenaire; & je fongeai bien plus à profiter de fa converfation que de fon crédit. Il mourut dans le tems que cette amitié étoit en fon plus baut point, & le fouvenir de fa perte m'afflige encore tous les jours. Pourquoi faut-il que des Hommes fi dignes de vivre foient fi-tôt enlevez du monde, tandis que des miferables & des gens de rien arrivent à une extrême vieillesse? Je ne m'étendrai pas davantage fur un fu jet fi trifte: car je fens que fi je continuois à en par ber, je ne pourrois m'empêcher de moüiller peut-être de larmes la Préface d'un Ouvrage de pure plaisanterie. L ARGUMENT. E Treforier remplit la premiére Dignité du Chapitre, dont il eft ici parlé, & il officie avec toutes les marques de l'Epifcopat. Le Chantre remplit la feconde Dignité. Il y avoit autrefois dans le Chœur, devant la place du Chantre, un énorme Pupitre ou Lutrin, qui le couvroit prefque tout entier. Il le fit ôter. Le Treforier voulut le faire remettre. De là, arriva une difpute, qui fait le fujet de ce Poëme. LE LUTRIN POEME HER OI-COMIQUE. 00000000 CHANT PREMIER. E chante les combats, & ce Prélat ter rible, Qui par fes longs travaux, & fa force in vincible Dans une illuftre Eglife exerçant fon grand cœur, C'eft en vain que le Chantre abufant d'un faux titre, De ces Hommes facrez rompit l'intelligence, Tanta pe animis cœleftibus iræ. De ce Schifme naiffant débarraffa l'Eglife; Parmi les doux plaifirs d'une paix fraternelle, Ces pieux fainéans faifoient chanter Matines; Quoi! dit-elle, d'un ton qui fit trembler les vitres, Et cette Eglife feule, à mes ordres rebelle, A ces mots, d'un bonnet couvrant fa tête énorme: Dans le réduit obfcur d'une alcove enfoncée, S'éléve un lit de plume à grands frais amassée. Quatre rideaux pompeux, par un double contour, En défendent l'entrée à la clarté du jour. Là, parmi les douceurs d'un tranquile filence, Régne fur le duvet une heureufe indolence. C'est-là que le Prélat muni d'un déjeûner, Dormant d'un leger fomme, attendoit le dîner, La Jeuneffe en fa fleur brille fur fon visage, Son menton fur fon fein defcend à double étage : Et fon corps ramaffé dans fa courte groffeur, Fait gémir les couffins fous fa molle épaiffeur. La Déeffe en entrant, qui voit la nape mise, Admire un fi bel'ordre & reconnoît l'Eglife; Et marchant à grands pas vers le lieu du repos, 7 Au Prélat fommeillant, elle adreffe ces mots: Tudors? Prélat, tu dors? & là-haut à ta place. Le Chantre aux yeux du Chœur étale fon audace, Chante les Oremus, fait des Proceffions, Et répand à grands flots les bénédictions. |