TO:TO TETE:SESE SE:F0 EPITRE III. A Monfieur ARNAULD, Docteur de Sorbonne. Ui fans peine, au travers des sophismes de ARNAULD, des Novateurs tu découvres la fraude, heur, Lui peint de Charenton l'hérétique douleur, Et balançant Dieu même en fon ame flottante, Fait mourir dans fon cœur la vérité naiffante. Des fuperbes mortels le plus affreux lien, (1) N'en doutons point, ARNAULD, c'eft la honte du bien. Des plus nobles vertus cette adroite ennemie, Peint l'honneur à nos yeux des traits de l'infamie, Affervit nos efprits fous un joug rigoureux, Et nous rend l'un de l'autre efclaves malheureux. (1) Horace, Lib. I. Ep. XVI. vs. 24. Stultorum incurta malus pudor ulcera celta. Par elle la vertu devient lâche & timide. Qui prêche contre un Dieu que dans fon ame il croit? Il iroit embraffer la vérité qu'il voit: Mais de fes faux amis il craint la raillerie, Et ne brave ainfi Dieu que par poltronnerie. C'est là de tous nos maux le fatal fondement. Des jugemens d'autrui nous tremblons follement. Et chacun l'un de l'autre adorant les caprices, Nous cherchons hors de nous nos vertus &nos vices. Miférables jouets de notre vanité! Faifons au moins l'aveu de notre infirmité. Le feu fort de vos yeux pétillant & troublez, Répondra ce malade à fe taire obstiné. Mais cependant voilà tout fon corps gangrené, Le jour fatal eft proche & vient comme un voleur. (2) Ibid. vf. 19. Sed vereor ne cui de te plus quàm tibi credas: Le moment où je parle eft déja loin de moi. (3) Le blé, pour se donner, fans peine ouvrant la terre, N'attendoit point qu'un beuf preffé de l'éguillon Lavigne ofroit par tout des grapes toûjours pleines, (3) Virgile an I. des Georgiques, of. 127. Ipfaque tellus La pefte en même tems, la guerre & la famine Des malheureux humains jurérent la ruine: Mais aucun de ces maux n'égale les rigueurs, Que la mauvaise honte exerça dans les cœurs. De ce nid à l'inftant fortirent tous les vices. L'Avare des premiers en proye à fes caprices, Dans un infame gain mettant l'honnêteté, Pour toute honte alors compta la pauvreté. L'honneur & la vertu n'oférent plus paroître. La piété chercha les deferts & le Cloître. Depuis on n'a point vû de cœur fi détaché Qui par quelque lien netint à ce péché. Trifte & funefte effet du premier de nos crimes! Moi-même, ARNAULD, ici qui te prêche en ces rimes, Plus qu'aucun des mortels par la honte abattu, En vain j'arme contr'elle une foible vertu. Ainfi toûjours douteux, chancelant & volage, A peine du limon où le vice m'engage, J'arrache un pié timide, & fors en m'agitant, Que l'autre m'y reporte, & s'embourbe à l'inftant. Car fi, comme aujourd'hui, quelque rayon de zèle, Allume dans mon cœur une clarté nouvelle, Soudain aux yeux d'autrui s'il faut la confirmer, D'un gefte, d'un regard je me fens alarmer; Et même fur ces vers que je te viens d'écrire, Je tremble en ce moment de ce que l'on va dire. EPITRE IV. AURO r. N vain, pour te loüer, ma Mufe toûjours prête, E Vingt fois de la Hollande a tenté la conquête. Ce païs, où cent murs n'ont pû te résister, GRAND ROI, n'eft pas en vers fi facile à dompter. Pour trouver un beau mot, courir jusqu'au Teffel. Il n'eft Fort entre ceux que tu prens par centaine, Encor,fi tes exploits moins grands & moins rapides Laiffoient prendre courage à nos Mufes timides; Peut-être avec le tems, à force d'y rêver, Par quelque coup de l'art nous pourrions nous fauver, |